La semaine passée, la French Tech (et son directeur Grégoire Vigroux) a organisé à Bucarest, la deuxième édition de "Sustainability Meets Profitability", un événement dont l'objectif était de débattre autour de la thématique du développement durable et des entreprises. L'événement a réuni plus de 400 personnes et s'est tenu à l'Université Roumaine-Américaine. A travers une table ronde, les intervenants, dont des experts en développement durable, des dirigeants d'entreprise et des entrepreneurs, ont pu partager leurs points de vue sur la question. Comment les entreprises et les start-ups s’adaptent-elles pour répondre aux exigences de durabilité, tout en assurant une croissance à court terme et une survie à long terme?


Stefan Budulan, directeur national des ventes chez Up, rappelle la définition de la durabilité telle que déterminée par les Nations Unies en 1987: "la satisfaction des besoins des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire leurs propres besoins." Il rajoute que cela ne s’arrête pas à la lutte contre le changement climatique mais englobe 3 piliers: celui économique, social et environnemental. Il rajoute: "j’espère que la mise en œuvre des normes ESRS (Normes européennes d'information en matière de durabilité) et de la directive CSRD (Directive sur les rapports de développement durable des entreprises) mettra enfin fin aux pratiques de greenwashing et garantira la prédominance de véritables efforts de durabilité."
George Durdilly, président d'Airbus en Roumanie, considère que le développement durable devrait dorénavant faire partie de l’ADN de toutes les industries: "c’est un peu comme lorsque nous étions confrontés à la numérisation il y a plusieurs décennies, et nous pouvons nous attendre à ce que, dans les années à venir, la durabilité soit un sujet tout aussi central". En ce qui concerne le transport aérien, il rappelle que Airbus a réduit les émissions de NOx de 90 % "mais ce n'est pas suffisant! Même si le transport aérien ne représente que 3% des émissions de CO2, cela n'a pas d'importance, nous avons le même devoir que tous les autres." Et pour u la modernisation de sa flotte il rappelle le fait qu'il y a quelques années Airbus a mis en place un code de conduite et s'est engagé à veiller à ce que ses pratiques commerciales soient conformes à des normes et principes d’éthique des affaires. "Le respect de l’éthique fait partie de cette durabilité, on ne peut plus jouer avec les droits de l’homme. Je peux vous dire que lorsque Airbus réalise une vente, nous exigeons du gouvernement un certificat concernant son client, car c'est une responsabilité commune."

Alex Skouras co-fondateur d'Alesonor Real Estate Development, un complexe résidentiel proposant des logements verts autour de Bucarest, met en évidence le fait que les conflits actuels, notamment la guerre en Ukraine, a été un facteur qui a mis indirectement la durabilité au premier plan: "ces dernières années, toutes les tensions politiques et l’instabilité liée au prix de l’énergie, ont mené a une énorme volatilité des prix, des coûts à la hausse, une imprévisibilité totale, ce qui a mis la durabilité sur le devant de la scène. Les consommateurs ont besoin d'un logement durable, indépendant, moins gourmand en énergie."
En ce qui concerne l’agriculture, pour Boualem Saidi, responsable du groupe Bayer (Roumanie, Bulgarie, Moldavie), le grand défi de ce secteur est de produire plus et de façon plus respectueuse de l’environnement. "Aujourd’hui nous sommes 8 milliards de personnes mais en 2050 nous serons près de 10 milliards d’humains. Cela signifie clairement que nous devons produire beaucoup plus de nourriture, mais la question est comment y parvenir de manière durable?" Il rappelle que le secteur agricole est responsable de 23% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, tout en étant en même temps une victime du changement climatique. "L'agriculteur peut faire partie de la solution. Il existe désormais une opportunité fantastique pour les agriculteurs pour réduire leurs émissions de CO2, notamment à travers certains pratiques agricoles qui permettent de stocker le carbone dans les sols. Cela permettra aussi de renforcer la résilience des agriculteurs." Pour lui l’innovation est aussi une des clés du développement durable. "Nous développons en ce moment chez Bayer des produits qui utilisent moins de ressources naturelles comme des semences qui seront résistantes à la sécheresse et consommeront moins d'eau." Mais le numérique aussi peut être mis au service des acteurs des filières agricoles: "nous avons de nombreux outils digitaux, comme des images satellite et des capteurs, qui vont offrir aux agriculteurs les données nécessaires pour comprendre avec précision ce qui se passe dans leur champ, et leur permettre ainsi de prendre les bonnes décisions."

Enfin, Raul Pop, co-fondateur de CERC (Circular Economy Coalition) pointe le fait qu’en Roumanie, c’est le secteur privé, notamment les banques et les investisseurs, qui font avancer les choses en termes de durabilité et de changement systémique, bien plus que l'état. "Ils ont cette capacité de parcourir toute l'économie et d'imposer plus ou moins volontairement des critères verts par exemple ou des critères ESG lorsqu'ils prêtent ou investissent de l'argent, ce qui fait avancer les choses dans le bon sens."

Les autres intervenants de la soirée étaient:
- Flavia Popa - secrétaire générale BRD
- Theodora Ghenciu - fondatruce de eECO.ro
Sur le même sujet
