Cette semaine, la French Tech a organisé un événement intitulé "GreenTech Finance for a Low Carbon Future" qui explore les possibilités qu'offre la GreenTech pour construire un avenir durable et à faible émission de carbone. A travers une table ronde, les intervenants, dont des fondateurs de startups, des chefs d'entreprise et des ONG ont partagé leurs points de vue et expériences dans le domaine des technologies vertes. L'événement a été modéré par Jamil Benabdallah, PDG et co-fondateur de The Zero Fund et membre du conseil d'administration de La French Tech Bucarest.


L'événement était aussi l'occasion de célébrer les 10 ans de la French Tech, un écosystème qui compte plus de 20 000 startups (dont 25 licornes), qui ont levé ensemble plus de 13,5 milliards d’euros en 2022. Grâce à ces investissements, la France conserve aujourd'hui sa position de leader parmi les écosystèmes tech au sein de l’UE.
Mais d'abord qu'est-ce que la GreenTech? La GreenTech est un mouvement dont l'objectif est de mettre l'innovation numérique au service de la protection de l'environnement. Cette initiative, née aux États-Unis, et qui prend de plus en plus d'ampleur dans le monde entier, regroupe des entreprises qui développent des solutions innovantes dans différents secteurs pour réduire l'impact néfaste de l'activité humaine sur notre planète. Et comme le rappelle Jamil Benabdallah: "Dans la course à la neutralité carbone d’ici 2050, la collaboration entre entreprises, ONG et startups dans le domaine des GreenTech est devenue primordiale." Les discussions ont exploré les trois étapes essentielles pour atteindre la neutralité carbone : estimer, réduire et compenser l’empreinte carbone d’une entreprise.
Selon le dernier rapport publié par la Banque Mondiale, la Roumanie serait responsable de seulement 3% des émissions de gaz à effet de serre de l'EU. Mais sans la mise en place de mesures concrètes, ces émissions sont censées augmenter et risquent de compromettre l'objectif d'atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. C'est pourquoi il faut se tourner d'urgence vers les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique, comme le pointe Anca Otilia Nutiu, Directrice Exécutive chez BRD - Groupe Société Générale. "C'est ici que le rôle des banques devient crucial. C'est pourquoi on a pris l'engagement, au niveau du groupe, de réduire de 80% les financements dans le secteur de la production de pétrole et de gaz à l’horizon 2030. Et en ce qui concerne la Roumanie, la BRD a pour objectif d'investir 1 milliard d'euros jusqu'en 2025 dans des projets d'énergies vertes et d'efficacité énergétique, accessibles autant aux compagnies qu'aux particuliers." Anca Otilia Nutiu rappelle que seulement 4% des prêts accordés par le système bancaire roumain sont alloués à des projets d'énergie verte et d'efficacité énergétique. "Il y a un énorme potentiel à saisir!"

Sébastien Record, spécialiste AgriTech et Agriculture de Précision en Europe Centrale chez Gaiago, rappelle que le secteur agricole est responsable d'environ 25% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. "Mais on peut faire en sorte que l'agriculture devienne une partie de la solution au dérèglement climatique." Et une de ces solutions pourrait être le "carbon farming", qui pourrait se résumer par l'ensemble des pratiques agricoles dont l'objectif est de préserver et d'améliorer la capacité des sols à absorber et à stocker durablement du carbone. "La particularité du sol est d'être l'un des plus gros réservoirs de carbone" explique Sébastien Record. Mais à cause de l'agriculture intensive et notamment l'utilisation massive de fertilisants et de pesticides, la capacité de stockage des sols agricoles s'est détériorée avec le temps. "Il existe aujourd'hui des solutions intelligentes et précises pour restocker durablement du carbone dans les sols agricoles. Si on augmente de 0,4 % par an la quantité de carbone dans les sols, on peut y stocker l'équivalent de ce que l'humanité produit chaque année! Le potentiel est énorme!" Mais pour inciter les agriculteurs à passer de l'agriculture conventionnelle au "carbon farming" et contribuer à la lutte contre le changement climatique, il faudrait mieux les rémunérer. Grâce aux crédits carbone, on peut rétribuer les agriculteurs en fonction de la quantité de carbone qu’ils capturent dans les sols et la biomasse. "C'est gagnant-gagnant: d'abord pour nous les consommateurs, mais aussi pour les entreprises qui pourront acheter des crédits carbone et compenser ainsi leurs émissions de CO2", conclut Sébastien Record.
Saviez-vous que 40% de la nourriture produite dans le monde est jetée et que le gaspillage alimentaire représente à lui seul 10% des émissions de CO2? C'est de là qu'est parti Luka Zivkovic, co-fondateur de bonapp.eco, une startup roumaine de lutte contre le gaspillage alimentaire. "En plus d’avoir un impact négatif sur l’environnement, le gaspillage alimentaire est responsable de pertes financières colossales pour les commerçants. Généralement les enseignes les plus importantes de la grande distribution sont conscientes de la question du gaspillage alimentaire, mais pour les plus petites chaînes il y a un manque de données et même un déni de ce problème. Quand nos équipes prouvent aux commerçants que la lutte contre le gaspillage alimentaire leur permet, en plus d'avoir un impact positif sur la planète, d’augmenter leur chiffre d’affaires, les choses commencent à se débloquer." C'est ainsi que bonapp.eco a développé une application mobile qui veut résoudre le problème de gaspillage alimentaire en connectant les consommateurs aux commerçants, dans le but de vendre de la nourriture ou des produits dont la date d’expiration est proche.

Barbara Promberger-Fuerpass, directrice exécutive chez Carpathia, une ONG roumaine qui lutte pour la conservation et à la restauration de l'écosystème naturel des Carpates, rappelle que les forêts sont de véritables puits de carbone. "Les Carpates sont l’un des plus importants écosystèmes d’Europe et la Roumanie a un énorme rôle à jouer en ce qui concerne la séquestration de carbone." C'est pourquoi la fondation Carpathia a lancé un nouveau projet, actuellement en phase de validation, qui permettra de préserver et développer le secteur forestier grâce à la finance carbone. "Notre but est de financer la protection des forêts des Carpates en mettant en vente des crédits carbone. Sur toute la durée du projet, cela nous permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 2 millions de tonnes!" Et ils ne s'arrêtent pas là, un autre projet encore plus important vise la mise en vente de "charismatic carbone", des crédits qui ont le potentiel d’apporter des bénéfices à la biodiversité, aux populations ainsi qu’au climat. "En plus de la séquestration du carbone, nous voulons aussi nous engager sur la partie socio-économique, en travaillant avec les communautés locales, en développant des emplois verts dans la région et en réensauvageant l'écosystème grâce à la réintroduction du bison européen, du castor, ... ". Pour finir, elle précise qu'elle cherche des partenaires et non pas des entreprises qui sont dans le "greenwashing".
Les autres intervenants de la soirée étaient:
Flavia Popa - Secrétaire Générale, BRD - Groupe Société Générale.
Lucian Botea - Vice-président de l'Université roumano-américaine.
Thierry Ollivero - Directeur général, Air Liquide.
Ilinca Prahoveanu - Consultante, Econos.
Marian Gheorghe - Responsable des ventes et des solutions, Capgemini.
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