Le Petit.Journal.com de Bucarest a publié une série d’articles sur les monuments de Bucarest qui ont marqué l’histoire de ces 100 dernières années. Découvrons les édifices emblématiques de la capitale qui ont eu des liens avec la France et sa culture.
Construit autour du slogan « Donnez un leu pour l’Athénée ! » (Dati un leu pentru Ateneu !), le bâtiment monumental de l’Athénée reste aujourd’hui un repère dans le paysage culturel bucarestois et un symbole de la fraternité franco-roumaine.
L’histoire de l’Athénée roumain ou « Ateneul Roman » débute en 1865, sous la forme d’une société portant le même nom, fondée par des personnalités importantes de l’époque, dont le but est l’émancipation culturelle du grand public bucarestois. L’élite intellectuelle roumaine cherche à satisfaire les besoins culturels de la capitale, misant sur la fusion entre les arts et les sciences. Trouver un siège pour cette institution devenait une nécessité et le diplomate Constantin Esarcu est le premier qui plaide en sa faveur, deux décennies plus tard.
Les autorités finissent par leur offrir la propriété de la Société Equestre Roumaine, ancien domaine des boyards Vacaresco. Désormais, le défi est double : utiliser les fondations existantes du manège qui y était construit, d’où la forme arrondie du bâtiment, et trouver les moyens financiers nécessaires à la finalisation du projet. Pour la première fois, une souscription nationale est organisée sous le slogan : « Donnez un leu pour l’Athénée », qui durera presque une trentaine d’années et permettra de récolter une partie des fonds nécessaires à sa construction.
La réalisation de l’édifice se fait en deux étapes, selon les plans d’Albert Galleron, le premier des architectes français ayant travaillé en Roumanie. Le 26 octobre 1886, assisté par une équipe d’architectes et d’ingénieurs roumains, il pose la pierre angulaire d’un édifice circulaire, de facture néoclassique avec des caractéristiques du style éclectique, très représentatifs de la fin du XIXe siècle français. On se trouve devant un monument-catalyseur dont le style architectural devient emblématique pour la plupart des bâtiments bucarestois. En même temps, le développement socio-économique de la Roumanie et son émancipation culturelle tournée vers l’Occident vaut à la capitale le surnom de « petit Paris ».
La façade de l’édifice de facture néoclassique, ressemble à celle d’un temple ionique : 8 colonnes soutiennent le péristyle, sous lequel sont gravés 5 médaillons en mosaïque à l’effigie des plus grands souverains roumains : Neagoe Basarab, Alexandre le Bon, Vasile Lupu, Matei Basarab et le roi Carol Ier. Mesurant 41 mètres de hauteur, l’édifice est coiffé d’une impressionnante coupole baroque richement décorée. Sous les recommandations de l’architecte Galleron, celle-ci a une structure circulaire en métal, particulièrement indiquée pour les pays soumis aux tremblements de terre ; ainsi, l’architecte français reste parmi les premiers bâtisseurs ayant compris la gravité de l’activité sismique en Roumanie.
L’intérieur est formé par un hall, une salle de concert et un vestibule somptueux en marbre, dont 12 colonnes soutiennent la voûte centrale. Dans la vision d’Alexandru Odobescu et de Constantin Esarcu, l’Athénée devait impérativement garder son âme roumaine, malgré la forte empreinte de l’architecture française. Ainsi, au-dessus des loges, autour du cercle de la coupole, se trouve une immense fresque du peintre Costin Petrescu, recouverte pendant l’époque communiste pour cacher le rôle qu’avait joué la monarchie dans l’histoire du pays. Elle représente 25 scènes-clés de l’histoire de la Roumanie depuis l’entrée de l’empereur Trajan en Dacie jusqu’à la création de la Grande Roumanie.
Réputé pour son acoustique quasi-parfaite, l’Athénée accueille aujourd’hui de nombreux événements culturels de la capitale, il est aussi le siège de l’Orchestre philharmonique « George Enescu ». Après plus d’un siècle, le monument d’Albert Galleron garde sa primauté dans l’univers des élites intellectuelles franco-roumaines et témoigne de la fierté culturelle d’un état aux influences croisées.
Ana-Maria Roșca
Article réalisé dans le cadre du Programme Culturel București - Centenar avec le soutien de Primăriei Municipiului București à travers Administrația Monumentelor și Patrimoniului Turistic