Édition internationale

La Haute Cour de Roumanie conteste la loi limitant les retraits des retraites privées

Après avoir contesté la loi du gouvernement Bolojan modifiant le système de retraite des magistrats, la Cour suprême de Roumanie a décidé jeudi de déposer un recours constitutionnel contre la loi sur les versements des retraites privées, adoptée par le Parlement la veille. Cette loi stipule qu’après la retraite, les Roumains ne peuvent retirer qu’un maximum de 30 % de leurs fonds de pension privés, le reste étant versé mensuellement sur une période allant jusqu’à huit ans.

pexels-matheus-freitas-2154686647-34290535pexels-matheus-freitas-2154686647-34290535
Écrit par Lepetitjournal Bucarest
Publié le 16 octobre 2025, mis à jour le 17 octobre 2025
 

 

La décision a été prise jeudi par la Haute Cour de cassation et de justice (ICCJ), qui, dans sa saisine adressée à la Cour constitutionnelle, invoque :

  • une violation du droit à la propriété privée et du principe d’égalité devant la loi, tels qu’ils sont inscrits dans la Constitution ;

  • une violation des principes de légalité, de sécurité juridique et de confiance légitime.

« Les fonds accumulés dans le deuxième pilier de retraite constituent une propriété privée »

L’ICCJ, présidée par la juge Lia Savonea, a précisé dans sa saisine que les montants accumulés dans les comptes individuels du deuxième pilier de pension représentent la propriété privée des participants, ce que reconnaît expressément la loi sur les fonds de pension gérés de manière privée.

« Les administrateurs des fonds disposent uniquement d’un droit de gestion, tandis que l’État exerce une supervision publique sans détenir ces actifs.

Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (affaires Beleyer c. Italie, 2000 ; Kopecky c. Slovaquie, 2004), toute ingérence de l’État dans la propriété doit être prévue par la loi, poursuivre un intérêt public légitime et maintenir une proportion raisonnable entre les moyens employés et l’objectif poursuivi.

Sans but clairement défini ni compensation adéquate, l’ingérence constitue une privation injustifiée de propriété, équivalente à une expropriation indirecte. En outre, la Cour constitutionnelle roumaine a établi, dans sa décision n° 871/2010, que “le droit de propriété privée, une fois acquis, ne peut être restreint par des interventions arbitraires du législateur, quelle que soit la forme du bien en question”, souligne la Cour suprême.

« L’ingérence devient une privation injustifiée de propriété, équivalente à une expropriation indirecte »

Les juges de la Haute Cour de cassation et de justice soutiennent également que les dispositions de la loi sur les retraites privées imposent des limitations disproportionnées au droit de propriété des participants sur leurs comptes personnels et à la liberté contractuelle, car :

  • l’obtention d’une pension privée est conditionnée par la signature d’un contrat de paiement ;

  • les participants ne peuvent pas se retirer du contrat de paiement pour percevoir la totalité de leur compte en un seul versement ;

  • le montant de la pension mensuelle est plafonné.

« Les justifications citées dans l’exposé des motifs – à savoir l’augmentation des sommes accumulées et les vagues de départs à la retraite prévues après 2030 – ne démontrent pas l’existence d’un dysfonctionnement et ne légitiment pas la restriction du droit de propriété ni de la liberté contractuelle. »

Ainsi, selon cet exposé, la rédaction et l’adoption de la loi sur les paiements des pensions privées sont justifiées, d’une part, par l’accumulation de montants de plus en plus élevés sur les comptes individuels des participants, qu’ils souhaitent percevoir sous forme de capital ou de versements échelonnés, et d’autre part, par la situation démographique, les plus gros montants devant être versés à partir de 2030, en raison du grand nombre de participants atteignant l’âge de la retraite.
« En l’absence d’un objectif clairement défini et d’une compensation adéquate, cette ingérence constitue une privation injustifiée de propriété, équivalente à une expropriation indirecte », ajoute l’ICCJ.

Ce que prévoit la loi

La loi a été adoptée mercredi par la Chambre des députés, en tant qu’instance décisionnelle, avec 178 voix pour, 64 contre et 22 abstentions.

La principale modification, qui a suscité la colère du public, est que les plus de 8,3 millions de Roumains disposant d’une retraite privée obligatoire (pilier II) et près d’un million ayant une retraite privée volontaire (pilier III) ne pourront plus retirer l’intégralité de leur épargne au moment de la retraite, comme c’est actuellement le cas. Désormais, ils pourront retirer au maximum 30 % de la somme, le reste étant versé mensuellement sur une période de huit ans.

Les patients atteints de cancer pourront toutefois percevoir la totalité de leur épargne en un seul versement. De plus, les personnes dont le fonds est inférieur à l’équivalent de douze allocations sociales mensuelles pourront également recevoir la somme totale en un seul paiement.

 

Source : Romania Journal.ro

 

lepetitjournal.com bucarest
Publié le 17 octobre 2025, mis à jour le 17 octobre 2025
Commentaires

Votre email ne sera jamais publié sur le site.

Flash infos