

Cet été, l’opérateur Orange a lancé une vaste campagne de communication annonçant la distribution de smartphones reconditionnés sur son site roumain, en partenariat avec le groupe Recommerce. Le projet, intitulé ”Premium pentru mine și natură” (“Premium pour moi et pour la nature”) est-il le prélude d’une révolution dans la manière dont les consommateurs roumains achètent leur smartphone?
Un marché européen en plein essor
Selon IDC, plus de 10% des téléphones vendus en Europe de l’Ouest seraient reconditionnés. Alors que les ventes mondiales de smartphones neufs ont diminué de 9.5% entre 2019 et 2020, celles du reconditionné ont bondi de 13.6% au cours de la même période.
Au total, 206.7 millions de téléphones reconditionnés ont été vendus dans le monde en 2019, soit une augmentation de 17.6% par rapport à l’année précédente. Selon IDC, le marché mondial du reconditionné atteindra 332.9 millions d’unités vendues en 2023.
Des startups à la croissance exponentielle
Le développement du reconditionné en Europe est dominé par une dizaine d’entreprises spécialisées, dont Recommerce et Back Market en Europe de l’Ouest, Rebuy et Refurbed en Europe Centrale et Swappie en Scandinavie.
En dépit de leur fragmentation géographique, les acteurs du secteur ont plusieurs points communs. Ce sont des startups fondées par de jeunes entrepreneurs qui ont su convaincre les capital-risqueurs de les accompagner dans leur développement à l’international. A l’image du pionnier français Recommerce, qui a réalisé plusieurs levées de fonds, pour un montant total s’élevant à 60 millions d’euros.
Les arguments économiques du reconditionné vis-à-vis des consommateurs
Les reconditionneurs sont parvenus à gagner la confiance des consommateurs, en positionnant, peu à peu, leurs produits comme une alternative pertinente par rapport au neuf.
Les téléphones reconditionnés sont généralement proposés avec une garantie de 12 à 24 mois, dans un état esthétique et de fonctionnement proche du neuf. Ils sont vendus entre 30 et 70% moins chers que leurs équivalents neufs. Une aubaine pour les consommateurs économes et avertis, qu’ils soient particuliers ou professionnels. Selon HMD Global, 91% des entreprises européennes considèrent que le prix est devenu un facteur important lors de l'acquisition de smartphones pour leurs employés.
Des arguments écologiques affichés en opposition au neuf
Les smartphones entraînent une pollution significative, que les industriels eux-mêmes commencent à admettre. Selon Apple, un iPhone 12 de 256 GB générerait 85 kg de CO2, dont plus de 70 kg sont imputables à sa seule fabrication.
Selon une étude commandée par le Comité Économique et Social Européen, la fabrication d’un nouveau smartphone nécessiterait, en moyenne, 44 kg de matières premières issus de 70 matériaux, pour un produit fini dont le poids dépasse rarement 200 grammes.
Un soutien européen bénéfique
Pour se développer, les acteurs du reconditionné peuvent désormais compter sur un soutien de poids : celui de l’Union européenne. Le 11 décembre 2019, la Commission européenne a présenté le Green Deal, un programme politique promettant de faire de l’Europe un continent neutre pour le climat.
Pour transformer ce programme ambitieux en actions concrètes, des initiatives politiques seront prochainement proposées par la Commission européenne afin de favoriser, notamment, la diffusion et l’utilisation des produits issus de l’économie circulaire. De quoi offrir un cadre réglementaire qui bénéficiera logiquement à l'essor du reconditionné en Europe.
Au-delà du business : l’avènement d’un nouveau paradigme
Les smartphones reconditionnés transcendent le cadre stricto sensu du secteur d’activités auquel ils appartiennent. Ils sont le signe avant-coureur (et le symbole) d’une nouvelle ère.
Le modèle de production et de consommation en vigueur depuis la révolution industrielle, qui s’appuyait sur un schéma linéaire - et le postulat selon lequel les ressources naturelles sont intarissables; semble avoir atteint ses limites.
Un nouveau modèle systémique est appelé à lui succéder : celui de l’économie circulaire. Ce nouveau paradigme, raisonné et raisonnable, qui sacre de nouvelles formes de production et de consommation fondées sur la récupération, la réparation et le réemploi des produits, est appelé à s’imposer en Roumanie comme dans le reste de l’Europe.
Lentement mais sûrement, l’Europe engage une véritable renaissance industrielle, dont les acteurs du reconditionné entendent bien bénéficier afin de poursuivre leur développement exponentiel.
Article rédigé par Grégoire Vigroux