Pour cette nouvelle recommandation critique, nous vous proposons de découvrir «Glory», une comédie bulgare plutôt noire qui n’a pas peur de pointer du doigt la corruption qui règne encore aujourd’hui dans les démocraties d’Europe de l’Est.
On n’entend pas souvent parler du cinéma bulgare, dont la cinématographie est la plus discrète des pays de l’Est, voire quasiment invisible, mais cet état de fait ne devrait pas tarder à changer grâce aux cinéastes Kristina Grozeva et Petar Valchanov qui en sont ici les dignes représentants. Les deux cinéastes nous livrent une satire décalée et grinçante, qui peut nous faire penser à un autre cinéaste culte passé maître en la matière, Aki Kaurismäki. Comme lui, les cinéastes nous content une fable tragicomique, usant de l’absurde et du grand-guignolesque pour mieux dénoncer la malhonnêteté d’un système, d’une société gangrénée par les sentiments les plus vils : de l’individualisme forcené à l’hypocrisie de ses politiques sans oublier son administration kafkaïenne ayant sa propre logique interne, ignorée du reste des citoyens. Derrière le burlesque et la caricature, il y a également quelque chose des frères Dardenne dans l’approche sociale et réaliste, dont la mise en scène ne fait aucun compromis esthétique pour fouiner dans les turpitudes du pouvoir et en dévoiler toute l’amère et froide condescendance. La caméra accompagne son protagoniste, un homme du peuple bégayant d’honnêteté et d’innocence, pour souffrir à ses côtés, face à l’indifférence de l’appareil étatique qui n’a qu’une seule divinité, l’argent et les magouilles pour l’obtenir. L'homme qu’il a en face, n'est pour lui qu’un pantin sans nom de la machine propagandiste. Le tour de force de ce film c’est donc d’arriver à nous faire rire là où il serait tentant de pleurer de colère.
Cinema Elvire Popesco, București
Samedi, 03 February 2018 / 16:15
2017 (1h 41min)
De Kristina Grozeva, Petar Valchanov
Avec Stefan Denolyubov, Margita Gosheva, Kitodar Todorov
Genre Comédie dramatique
Nationalités bulgare, grec
Le Monde: «(...) une charge amèrement troussée contre l’impudence des gouvernants et le cynisme des communicants, laquelle présente le mérite supplémentaire d’être d’une épouvantable drôlerie.»
Le Nouvel Observateur: «"Glory" dépeint une société bulgare au bord de l’implosion avec, d’un côté, une classe pauvre et une bureaucratie héritées de l’ère communiste, et de l’autre, un individualisme petit-bourgeois et un système politico-médiatique issus du libéralisme sauvage. Grinçante, la fable manque un peu de nerf, mais pas de mordant.»
Synopsis
Tsanko, un cantonnier d’une cinquantaine d’années, trouve des billets de banque sur la voie ferrée qu’il est chargé d’entretenir. Plutôt que de les garder, l’honnête homme préfère les rendre à l’Etat qui en signe de reconnaissance organise une cérémonie en son honneur et lui offre une montre... qui ne fonctionne pas. Tsanko n’a qu’une envie : récupérer la vieille montre de famille qu’on ne lui a pas rendue. Commence alors une lutte absurde avec le Ministère des Transports et son service de relations publiques mené par la redoutable Julia Staikova pour retrouver l’objet.
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