Les médecines traditionnelles sont nombreuses en Inde et ont depuis l'indépendance du pays été intégrées dans les programmes des gouvernements successifs. Mais, c’est après l'élection de Narendra Modi que le secteur devient un ministère à part entière : AYUSH, Ayurveda, Yoga et naturopathie, Unani, Siddha et Homéopathie. Dès le début de la pandémie, le ministère a publié des conseils pour éviter d'être contaminé par le coronavirus qui ont soulevé beaucoup de doutes et questions.
Les cinq branches du ministère AYUSH
Hormis le Yoga, souvent considéré comme une activité physique, les autres branches du ministère AYUSH, Ayurveda, Naturopathie, Unani, Siddha et Homéopathie font partie de ce que l’on appelle les médecines alternatives dont les résultats n’ont jamais été prouvés scientifiquement.
L’Ayurveda est une forme de médecine traditionnelle indienne dont les origines remontent à plus de 5000 ans. Il s’agit d’un système de médecine holistique qui s’intéresse à l’individu dans son ensemble et prône un mode de vie sain dans sa globalité (L’Ayurveda, médecine traditionnelle indienne).
La Naturopathie est une pratique à visée thérapeutique qui prétend équilibrer le fonctionnement de l'organisme par des moyens dits « naturels » : hygiène de vie, changement d'alimentation, phytothérapie, massages, activité physique, jeûnes… La naturopathie ne serait pas originaire d’Inde, mais des Etats-Unis.
Unani est un terme utilisé pour désigner la médecine traditionnelle perse et arabe pratiquée dans les civilisations musulmanes d’Asie du Sud. Unani est un mot arabe qui désigne la Grèce, les principes de la médecine Unani reposant sur l’enseignement des médecins grecs Hippocrate et Gallien.
La médecine Siddha est une médecine traditionnelle originaire du Tamil Nadu et vieille de plusieurs siècles. L’Association des médecins indiens (Indian Medical Association) la considère comme du charlatanisme et la Cour Suprême a jugé, en 2014, que “les médecins siddhars non qualifiés et non formés présentent un grand risque pour l'ensemble de la société et jouent avec la vie des gens sans avoir la formation et l'éducation scientifiques requises par les institutions agréées”.
L’Homéopathie est bien connue en Europe et est d’origine allemande.
Plus d’infos sur le Yoga dans notre article : Chloé, neo yogi : "Le yoga est fait pour tout le monde !"
Les recommandations d’AYUSH pendant la pandémie de coronavirus
Le ministère AYUSH fait la promotion de l'ayurveda, de l'homéopathie et du yoga depuis le début de la pandémie, affirmant que les médecines alternatives peuvent aider à améliorer l'immunité contre le nouveau coronavirus.
Certaines préconisations du ministère ont fait bondir les médecins, en particulier, celle concernant l’absorption du médicament homéopathique Arsenic Albumin 30 pour augmenter son immunité face au coronavirus. Des doses ont d’ailleurs été distribuées dans tous les immeubles de plusieurs quartiers de Mumbai en juin par des députés de ces circonscriptions.
Le 6 octobre 2020, le gouvernement a publié les protocoles officiels d'utilisation de l'ayurveda et du yoga pour la prévention et le traitement de la Covid-19 qui va de la dégustation de lait de curcuma chaud, d’une décoction d’herbes (le kadha) à la pratique du yoga, en passant par la consommation d'ashwagandha et de guduchi (deux espèces de plantes faisant partie de la pharmacopée traditionnelle indienne). Le ministre a cependant rappelé qu'ils doivent être utilisés en plus des protocoles de traitement standard et n’en constituent pas un «remplacement».
Today, I released the 'Ayush Standard Treatment Protocol', via VC, along with MoS(I/C) @moayush @shripadynaik & Vice Chairman @NITIAayog @RajivKumar1.
— Dr Harsh Vardhan (@drharshvardhan) October 6, 2020
It details self care guidelines for preventive health measures to help protect against #COVID19.@MoHFW_INDIA @PMOIndia pic.twitter.com/pisf28amh3
Indignée, l’association des médecins indiens (Indian Medical Association - IMA) a demandé au ministre de la Santé s’il était prêt avec ses collègues du ministère à participer à des tests pour valider les traitements recommandés !
C’est bien ce qu’a programmé l’Organisation Mondiale pour la Santé (OMS) en association avec le Centre africain de prévention et de contrôle des maladies sur le continent africain. En septembre 2020, un protocole de tests pour des médicaments issus de la médecine traditionnelle pour lutter contre la Covid-19 a été validé (Expert panel endorses protocol for COVID-19 herbal medicine clinical trials).
Ce qu’en pensent les Indiens
La rédaction a demandé à plusieurs de ses amis ce qu'ils pensaient des médecines traditionnelles et de l'existence d'un ministère spécifique.
La plupart des Indiens interrogés considère que les médecines traditionnelles, notamment l’ayurveda et le yoga, font partie intégrante de la société indienne et déclare les utiliser en premier recours, mais pas en remplacement de la médecine contemporaine. Par contre, peu sont convaincus de l'utilité d’un ministère spécialisé.
“Oui, en tant qu'individu, je suis persuadée que nos médecines traditionnelles, plus particulièrement le yoga et l'homéopathie peuvent être bénéfiques. Cela m'attriste de voir que de nombreux Indiens ont tendance à les rejeter alors que les sociétés les plus développées dans le monde les adoptent.” affirme F.
Cependant, G. précise : “L’ayurveda et le yoga font partie de la culture indienne, mais il est important que les résultats de l’utilisation de ces médecines soient validés par les chercheurs et scientifiques modernes.”
Enfin, certains se demandent pourquoi le ministère AYUSH, puisqu’il existe, n’a pas plus de projets pour installer des centres de médecine traditionnelle dans les zones rurales là où les services de santé sont souvent absents ou rares.