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Evo Morales pendant sa grève de la faim, le 10 avril 2009 à La Paz
Photo AFP
(Rédaction internationale) Jeudi 9 avril, le président bolivien Evo Morales et 14 dirigeants syndicaux annonçaient : "Nous nous déclarons en grève de la faim", pour protester contre un blocage législatif et faire pression sur l'opposition. Le président bolivien a donc passé cinq nuits sur un matelas installé à même le sol du palais présidentiel, entouré de banderoles de protestations et de partisans, mâchant des feuilles de coca en guise de coupe-faim. Selon la presse bolivienne, il a perdu quatre kilos. Une action que plusieurs dirigeants d'opposition ont qualifié de "chantage politique", mais la méthode est éprouvée : déjà, en 2004, Evo Morales avait mené une grève de la faim durant 18 jours. A nouveau, en 2007 le président avait menacé de recourir à cette méthode si le Congrès n'approuvait pas des amendements à des contrats pétroliers. Cette fois, après 6 jours de jeûne, le président a accepté de faire certaines concessions, et l'opposition de reprendre les discussions.
Chantage contre blocage
La grève de la faim du président bolivien n'est que le dernier rebondissement d'un bras de fer politique entre le parti au pouvoir (Mouvement vers le socialisme - MAS) et l'opposition de droite, qui dure depuis les élections législatives de 2005. Le MAS, dirigé par Evo Morales, domine la Chambre des députés, alors que l'opposition contrôle le Sénat. Régulièrement, le gouvernement se heurte à des situations de blocage : l'opposition refusant de siéger, le quorum n'est pas atteint et les débats ne peuvent avoir lieu. Ce dernier "coup d'éclat"du président bolivien est intervenu en signe de protestation contre un blocage législatif au Parlement, qui paralysait depuis la semaine dernière l'avancement des débats sur l'approbation de la loi électorale qui doit régir les élections présidentielle et législative prévues en décembre prochain. Le cadre général de la loi avait été approuvé mercredi 8 avril, mais, faute d'un nombre suffisant de députés, la séance avait dû être ajournée alors que le détail des 84 articles restait à examiner.
Joute verbale
L'opposition a qualifié la grève de la faim du président de "cirque", et de nombreux députés ont ironisé sur le "régime présidentiel". Tandis que Lourdes Millares, députée du principal parti d'opposition déclarait : "C'est une bonne chose que le président fasse un régime", d'autres, comme Savina Cuellar (gouverneure de Chuquisaca) avançaient que le président observait "un jeûne pour la Semaine sainte en pénitence pour tout ce qu'il fait". Du côté du MAS, le discours est resté militant. Avec une référence au Christ, le président affirmait être là "pour donner notre vie aux pauvres", s'appuyant sur une rhétorique révolutionnaire renforcée par les déclarations de soutien de Fidel Castro et Hugo Chavez.
Au c?ur des débats : les élections de décembre
Le mécontentement de l'opposition s'était cristallisé autour de la loi électorale, censée encadrer les prochaines élections prévues en décembre. Le premier point de discorde entre majorité et opposition concernait le fichier électoral : selon l'opposition, le fichier présenterait des irrégularités sur 30% des 4 millions d'électeurs recensés, alors que le président de la Cour électorale considère qu'elles ne dépassent pas 5-6%. L'opposition avait demandé, avant d'avancer sur l'examen de la loi, la révision du registre et la présence d'observateurs internationaux "pour garantir une élection transparente".
Un autre point de conflit concernait la composition du corps électoral. La nouvelle constitution, établie par le gouvernement d'Evo Morales et approuvée en janvier par la population à plus de 61%, prévoit pour la première fois le vote des Boliviens expatriés, et réserve un certain nombre de sièges à des groupes indigènes minoritaires. L'opposition redoutait que cette loi n'avantage le MAS, le parti d'Evo Morales, premier président indigène de Bolivie, et accusait le président de tenter, par ces méthodes, d'assurer sa victoire en décembre.
Après la reprise des débats, la loi électorale a été promulguée mardi 14 avril. L'opposition a obtenu que soit mis en place un nouveau registre électoral actualisé et biométrique. La nouvelle loi réserve à la population indigène 7 des 130 sièges de la chambre basse. Les élections générales ont été fixées au 6 décembre prochain et les élections régionales au 4 avril 2010.
Audrey Vassalli (www.lepetitjournal.com) jeudi 16 avril 2009
Evo Morales, favori des prochaines élections
Evo Morales est donné favori des prochaines élections. Il jouit d'une grande popularité en Bolivie, et bénéficie du soutien de nombreux dirigeants de gauche du continent sud américain, au premier rang desquels Fidel Castro et Hugo Chavez. L'adoption de la loi électorale est incontestablement une victoire pour lui : d'une part, parce qu'elle permettra la tenue des élections à la date prévue; d'autre part parce que sa grève de la faim lui a permis d'occuper durant six jours l'espace médiatique, et de développer son message devant la presse du monde entier. Il est apparu comme un leader charismatique et déterminé, précisément ce qui fait défaut à l'opposition. Mais celle-ci ne sort pas pour autant perdante du combat : ses revendications concernant le registre électoral ont été satisfaites, et elle est parvenue à limiter le nombre de sièges réservés aux minorités indigènes. A.V. (www.lepetitjournal.com) jeudi 16 avril 2009








































