

Au début du mois de novembre s'est tenue à Siem Reap une Conférence régionale préparée par le gouvernement royal du Cambodge et l'Organisation mondiale du tourisme (OMT) sur le développement du tourisme dans les sites des patrimoines culturel et naturel. Encore une usine à gaz ou l'amorce de projets durables ?
Ce qui est épatant dans ce type de raout d'experts, ce sont les autostrades pavées de bonnes intentions que ces personnes goudronnent joyeusement à leur grande satisfaction devant un parterre?.d'experts en expertise. Il ne saurait être question de persiflage gratuit ou de torpillage imbécile mais enfin qu'il soit permis de s'interroger sur ces grand-messes soigneusement préparées par des petites mains anonymes qui généralement n'ont pas voix au chapitre. A moins d'être muet, les mains il est vrai, servent à autre chose.
Le sommaire* de ce weekend studieux avait tout lieu de pouvoir intéresser également les opérateurs privés dans le secteur du tourisme, le tourisme étant, rappelons-le, une des premières industries du pays, source conséquente et croissante de devises. Qu'un pays comme le Cambodge puisse accueillir, plus encore, co-organiser ce séminaire de trois jours est plutôt de bon augure. Le Liechtenstein par exemple, sauf le respect dû à Son Altesse Sérénissime le prince Hans-Adam, n'a pas encore reçu cet insigne honneur, mais enfin Vaduz sa capitale n'a pas le charme envoûtant des temples d'Angkor et la fragrance de l'edelweiss ne vaut pas tripette devant celle du frangipanier, le soir au couchant tout en sirotant un cocktail portant le nom d'une des plus célèbres Premières dames des Etats-Unis. Circulez !
Où il aura été question d'élaborer un « Code de [bonne ?] conduite » du visiteur du site d'Angkor. Quelle bonne idée ! Mieux encore, on y cite la règle, dit-on, imposée par le roi légendaire Jayavarman 1er selon laquelle, « Personne ne se déplacera dans cette demeure sacrée selon sa fantaisie ou son caprice?/? » Qui s'en plaindrait ? Pas plus l'Autorité Apsara, grande Vestale des lieux, que la France et le Japon, tout deux « coprinces » du CIC-Angkor (Comité international de coordination pour la sauvegarde et le développement du site historique d'Angkor). Les Cambodgiens qui vénèrent et chérissent ce lieu hors du temps mais plein d'histoire, savent de plus en plus suivre l'adage de ce roi des temps anciens. Ne soyons pas vachards, les touristes également, commencent à mesurer combien leur comportement n'est pas sans conséquence directe sur ce site rare et majestueux. La pédagogie est en marche, elle prendra son temps. Comme les hommes.
« Préservation des cultures traditionnelles locales » et « respect de la biodiversité », les deux aspects seraient, selon ces importants spécialistes, des atouts majeurs pour favoriser le développement d'un tourisme respectueux de l'environnement, des hommes et de leur patrimoine. Bravo ! Continuons.
« Tourisme vert » donc, « développement responsable » pourquoi pas?Assez ! Ce sont des vieilles lunes ressassées depuis beau temps et qui, à terme, risquent de passer pour des mots creux. Le monde, jusqu'à plus ample informé n'est pas dirigé par des Bisounours ou les Barbapapas. Et les déclarations de (trop ?) bonnes intentions cachent de plus en plus difficilement et amèrement la fragilisation des écosystèmes ?mangroves arrachées, forêts détruites sans discernement-, l'essor anarchique ou peu visible d'une côte cambodgienne pourtant considérée comme l'un des joyaux naturels du pays. Ce n'est pas un hasard si Son Excellence Sok An, vice-Premier ministre a obtenu l'inscription des 475 km des bords maritimes du pays au Club des plus belles baies du monde (**)
Les présentations sous format Powerpoint, aussi pimpantes soient-elles, n'empêcheront pas sur le terrain d'hypothéquer l'existence des minorités Jaraï, d'aggraver l'acculturation des terres arables dues à une déforestation sauvage qui impacte sérieusement un équilibre fragile et pourtant économiquement profitable. Piqûre de rappel : on vient à nouveau d'annoncer que le Cambodge serait un des pays les plus gravement touchés par les changements climatiques (***). Fin de l'histoire ?
Serge Rémy








































