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Anaïs Nour, compositrice et guitariste française à Berlin

Portrait de la guitariste et compositrice Anaïs NourPortrait de la guitariste et compositrice Anaïs Nour
Écrit par Emma Granier
Publié le 11 juin 2021, mis à jour le 14 juin 2021

Pratiquer un instrument jusqu’à la blessure physique, Anaïs Nour l’a connu. Elle nous dévoile aujourd’hui son approche pour un apprentissage de la musique rimant avec bien-être et qu’elle partage avec ses élèves à Berlin.

 

Quel est votre parcours et comment êtes-vous arrivée à Berlin ?

Après avoir un parcours conservatoire en France, j’ai tenté ma chance dans l’une des meilleures écoles d’Europe, la Hanns Eisler Hochschule ici à Berlin pour finir mes études de composition. Sans beaucoup d’espoir au début, mon niveau d’allemand était plus que débutant, je ne connaissais personne à Berlin et seulement une poignée de places sont ouvertes chaque année pour le master auquel je candidatais. J’y suis donc allée au culot, et, à ma plus grande surprise - et aussi bonheur - ça a marché !

Je compose de la musique électroacoustique et instrumentale, c’est une musique expérimentale et contemporaine écrite pour des instrumentistes et des performers, ça va des instruments classiques jusqu’aux marionnettistes en passant par des systèmes électroniques comme l’acousmonium, un ensemble de haut-parleurs permettant une mise en espace du son unique.

Par le biais de ces projets, je m’intéresse beaucoup aux musiques extra-européennes et en particulier aux musiques marocaines Gnawa. Je vois la composition comme un domaine de recherche plus que comme un domaine de pure expression. J’essaie à chaque fois d’aborder de nouveaux sujets, de nouvelles influences. Un de mes prochains projets c’est de partir au Maroc pour étudier cette musique sur place et voir si l’on retrouve des corrélations entre les musiques occidentales de tradition écrite et les musiques de tradition orale aux influences et fonctions différentes.

 

Cet instrument qui m’a à la fois beaucoup coûté et apporté.

A côté de la composition, je poursuis mes activités de guitariste. Après un diplôme de fin d’études musicales à Montpellier, j’ai décidé de commencer la composition, mais je n’ai jamais complètement coupé avec cet instrument qui m’a à la fois beaucoup coûté et apporté. Je fais de la guitare depuis que j’ai six ans, c’est une vraie passion. J’ai rapidement acquis un très bon niveau et donc commencé à donner des cours. J’enseigne donc depuis une dizaine d’années déjà. Au cours de cette période, j’ai eu des étudiants avec des profils très différents que j’ai pu voir évoluer et progresser sur le long terme. Au bout d’un moment, j’ai réalisé qu’on apportait beaucoup lors de ces séances et qu’il ne s’agissait pas seulement d’un moment d’apprentissage mais aussi de développement personnel.

 

Anaïs Nour et sa guitare

 

Quel a été l’impact de la pandémie sur votre activité à Berlin ?

Je suis arrivée à Berlin il y a deux ans et demi. Je faisais beaucoup de concerts pour la création de compositions. Ça me prenait beaucoup de temps et d’énergie. La pandémie, comme pour beaucoup d’autres artistes, m’a coupée du monde de la scène et de la performance. J’ai réalisé que tout ça tenait à très peu de choses. Donc ça m’a motivé à aller un peu plus loin dans la passion de l’enseignement.

Je suis passée d’une musique destructive et néfaste à quelque chose qui me fait me sentir mieux tous les jours.

Je suis passée moi-même, en tant que jeune musicienne, par des moments très difficiles. Je jouais parfois 7 à 8h de guitare par jour, et cela toujours avec beaucoup de pression et de stress. Physiquement, c’était très dur et à l’époque je n’avais pas les clés que j’ai aujourd’hui pour pouvoir progresser sans se blesser. A 18 ans, j’ai dû complètement arrêter de pratiquer mon instrument à cause de problèmes de santé liées à la pratique de la guitare. C’est là que je me suis mise à la composition. Et j’ai repris avec une toute autre approche et une autre méthode. Ça m’a pris du temps, j’ai beaucoup lu, j’ai rencontré des gens aux pratiques différentes.

C’est comme ça que j’ai compris beaucoup de choses sur le système traditionnel d’enseignement de la musique en France. Après cette coupure, j’ai essayé de reprendre la pratique musicale mais en l’alliant à la relaxation et au bien-être. Je n’ai pas envie d’enseigner à des professionnels des techniques compliquées. Mais j’ai envie de transmettre à quel point la musique peut être un bien fait, et un vrai plus dans nos vies. Je suis passée d’une musique destructive et néfaste à quelque chose qui me fait me sentir mieux tous les jours. Maintenant, mon objectif c’est d’arriver à transmettre ces méthodes autour de moi.

 

Séance de cours avec Anaïs

 

Quels sont vos conseils pour les personnes qui aimeraient commencer la musique et la guitare en particulier ?

J’ai des élèves de tous les âges, et je suis entièrement convaincue qu’il n’y a pas d’âge pour commencer et pour progresser. C’est une question de motivation et d’approche.

J’entends dire des parents d’enfants de sept ou huit ans avoir des réflexions comme « il n’a pas d’oreille » ou des élèves adultes me dire « je n’ai pas le sens du rythme », je me dis que c’est dommage de penser comme ça. C’est ce qui va faire que vous ou votre enfant pensez qu’il a un problème. Alors qu’il suffit d’avoir une approche positive et une méthode alliant la pratique de l’instrument avec le bien-être général.

Je constate beaucoup de différences entre l’enseignement de la musique en France et dans les autres pays.

J’ai étudié la méthode Alexander, bien connue aujourd’hui dans le milieu des musiciens. Puis je me suis intéressée à la méditation, au yoga. J’ai fait pas mal de corrélation entre la manière de tenir l’instrument et le respect du corps. Après pas mal d’années d’expérience, j’ai réussi à trouver une méthode adaptable à chaque personne.

Ici, j’ai beaucoup d’étudiants étrangers et je constate beaucoup de différences entre l’enseignement de la musique en France et dans les autres pays. Ça me tient à cœur de m’adresser aux Français de Berlin et de leur montrer différentes approches.  

 

Quels sont vos projets à Berlin ?

Berlin est une ville exceptionnelle pour la musique et encore plus pour la création de musique contemporaine. C’est très dynamique et cosmopolite, cela donne une énergie exceptionnelle. Il y a aussi un côté anti-conservateur et anticonformiste qui fait du bien et qui ressource. J’ai l’impression qu’il y a toujours une sorte de rêve berlinois. Je me vois bien rester ici encore quelques années et transmettre un maximum au plus grand nombre sur les méthodes d’apprentissage musical que j’ai pu expérimenter.

Vous pourrez me retrouver pour une création musicale contemporaine enregistrée et diffusée sur la plateforme Klangzeit Ort. Il s’agit d’une pièce pour batterie, contrebasse et chant sur des poèmes français.

 

Retrouvez l’actualité d’Anaïs Nour sur son site et sa page facebook.

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