Les problèmes abyssaux du point de vue des conditions de travail que connait l’industrie thaïlandaise de la pèche connaissent un début d’amélioration, selon une étude onusienne qui met en avant quelques notes d’espoirs dans un secteur très profitable réputé pour ses cas de maltraitance.
La Thailande est le quatrième exportateur mondial de produits de la mer, mais son statut de grand fournisseur planétaire a été durement terni par des témoignages faisant état de travail forcé et de trafic d’êtres humains concernant la main d’œuvre essentiellement immigrée qui travaille sur les bateaux du royaume.
En 2015, l’Union Européenne avait menacé d’interdire les produits de la mer thaïlandais en raison de violations des droits du travail et de pêche illégale galopante, poussant la junte au pouvoir à se démener pour redorer au plus vite l’image de cette industrie lucrative.
Un nouveau rapport de l’Union Européenne et du Bureau International du Travail (BIT) des Nations Unies, publié mercredi, affirme que des progrès ont été réalisés dans certains domaines tout en avertissant que des abus des droits du travail persistent.
"Beaucoup a été fait, mais davantage reste à faire," a déclaré Luisa Ragher, chargée d'affaires a la délégation de l’UE en Thailande, lors de la présentation des résultats à Bangkok.
L’enquête a sondé 434 travailleurs dans 11 provinces en mars et avril 2017, répartis de manière quasi-égale entre équipages de pêche et ouvriers travaillant sur le continent dans les usines de transformation.
Sur les points positifs, l’étude relève une baisse des cas de violences physiques par rapport à une étude réalisée il y a quatre ans.
Le rapport montre également que la moyenne des salaires a augmenté et que 43% des employés déclarent avoir des contrats écrits.
Mais ce qui vient gâcher les progrès sont les témoignages selon lesquels d’autres "pratiques non satisfaisantes" et des abus ont toujours cours.
Dans le secteur de la pêche, près des deux tiers des personnes interviewées ont répondu n’avoir aucun jour de congé hebdomadaire, tandis qu’à peu près un quart voient leur paye retenue par les propriétaires de bateau, devant parfois attendre plus de 12 mois avant de la recevoir.
L’étude fait également apparaitre un écart de salaire entre les genres. 52% des femmes interrogées disent être payées en dessous du minimum légal.
Plus de la moitié des sondés fait état d’au moins une forme de travail forcé, ce qui comprend selon les termes de l’enquête : intimidation et menaces, rétention de documents d’identité, conditions abusives de travail et heures supplémentaires excessives.
Le rapport s’inscrit dans un projet de trois ans destiné à mesurer les progrès réalisés et faire des recommandations au gouvernement thaïlandais.
La junte militaire thaïlandaise au pouvoir avait annoncé toute une série de mesures répressives et de réformes du secteur des produits de la mer depuis sa prise de pouvoir en 2014.
Mais les groupes de défense des droits de l’homme ont averti que la plupart des efforts réalisés étaient superficiels et de courte durée.
En janvier, l’ONG Human Rights Watch estimait que les réformes s’étaient concentrées sur la pêche illégale mais concernaient peu l’exploitation des travailleurs, soulignant notamment que les inspections de bateaux vis-à-vis des conditions de travail étaient "un exercice théâtral destiné à la consommation internationale".