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En Thaïlande, la balance du pouvoir au parti pro-cannabis Bhumjaithai

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Romeo GACAD / AFP

Un richissime héritier du secteur de la construction engagé dans les législatives en Thaïlande avec un programme politique pro-cannabis est très courtisé par les deux principaux partis qui ont besoin de son allégeance et de ses sièges à l’issue d’une élection compliquée

Deux forces politiques s’affrontent à l’issue des législatives du 24 mars, les premières organisées dans le royaume depuis la prise de pouvoir de la junte militaire en  2014.  

Numériquement, la faction proarmée, le Palang Pracharat, a engrangé le plus de voix, mais le Puea Thai, principal parti d’opposition lié à l’ex-premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, bête noire de la junte, a raflé davantage de sièges à la Chambre basse, d’après des résultats préliminaires - les résultats définitifs seront annoncés d’ici le 9 mai.   

Le chef de la junte, le général Prayuth Chan-O-Cha, devrait conserver son poste de Premier ministre, car il s’est assuré le soutien des 250 Sénateurs nommés par les militaires.  

Mais s’il veut disposer de la majorité à la Chambre des représentants, il doit se trouver des alliés.  

Le parti Bhumjaithai (Fierté Thaïlandaise), parti de taille moyenne qui a fait campagne pour la légalisation du cannabis, peut faire à lui seul basculer la tendance et se retrouve ainsi en position d’arbitre, courtisé par les deux principales factions pour espérer remporter une majorité à la Chambre des représentants.  

Cannabis pour tous, semaine de quatre jours, etc.

Fondé en 2008 par Anutin Charnvirakul, fils d’un magnat de la construction âgé de 52 ans, le Bhumjaithai a remporté d’ores et déjà 39 sièges de députés.   

Sa campagne, avec des feuilles de cannabis imprimées sur les affiches, a fait beaucoup parler d’elle. Mais le parti préconise également la déréglementation pour les entreprises ou encore la  semaine de travail de quatre jours.

La Thaïlande est devenue en décembre le premier pays d’Asie du Sud-Est à approuver l’utilisation du cannabis à des fins médicales, mais le Bhumjaithai souhaite permettre aux ménages de cultiver six plants par foyer selon une approche de décriminalisation inspirée de ce qui se fait aux Etats-Unis dans l’État de Californie.

"Le cannabis a davantage de propriétés positives que négatives", a déclaré Anutin Charnvirakul, dans une entretien à l’AFP, mercredi, dans son bureau de Bangkok, près de deux semaines après le scrutin du 24 mars.

Le bureau de ce pilote amateur présente de petits modèles d'avion, des sculptures et des peintures du roi de Thaïlande et de son père, aujourd'hui décédé.

Éduqué à l'université Hofstra de New York, Anutin conserve dans le couloir une collection de signatures originales de présidents américains remontant à George Washington.

Unité nationale et respect de la monarchie

Vêtu d'un costume et buvant du thé, l'opulent quinquagénaire explique que sa politique devra être soutenue par ceux qui attendent son soutien pour une coalition.

«Nous nous devons d'aller avec le parti qui acceptera nos politiques», a-t-il déclaré, ajoutant qu’il tenait à ce que les gens aient accès cette industrie naissante afin que les grands groupes ne puissent pas tout rafler.  

Le choix se situe donc entre le parti Phalang Pracharat, soutenu par la junte et qui a remporté le vote populaire, et le Puea Thai, qui a formé une alliance avec six autres partis opposés à la junte et revendique une majorité à la chambre basse.

Mercredi, les deux partis n’ont pas souhaité répondre à la question de savoir s'ils avaient approché Anutin pour une alliance éventuelle.

Les analystes évoquent également la possibilité qu’Anutin se voie proposer le poste de Premier ministre à l'issue de négociations contre la loyauté de son parti.

Même s’il refuse de préciser pour quel camp son cœur penche avant l'annonce des résultats complets le 9 mai, M. Anutin a indiqué que le Bhumjaithai recherchait des partis privilégiant l'unité, une approche de "la Thaïlande d'abord" et le respect de la monarchie.

«Je veux que tout le monde se rassemble et cherche la meilleure solution pour le pays», a-t-il ajouté, insistant sur le fait qu’il ferait alliance avec le camp qui défendra le plus la cohésion de la nation et la monarchie.   

Depuis sa prise de pouvoir en 2014, Prayuth Chan-O-Cha se présente en protecteur de la famille royale et de l’unité du pays, qui a connu deux coups d’État depuis 2006.

A l’opposée, Thaksin est perçu par ses ennemis comme une menace pour la monarchie et un élément de division du pays. La semaine dernière, le roi Vajiralongkorn l’a déchu de ses décorations royales, quelques semaines après avoir désavoué la tentative d’un de ses partis politiques de présenter la princesse Ubolratana comme candidate au poste de Premier ministre.

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