L’Association Démocratique des Français de l’Étranger vient de souffler quarante-cinq bougies. Devenue avec le temps Français du Monde - ADFE, elle crie toujours aussi fort. Mais non sans raison.
Les représentants de Français du Monde -ADFE ne s’expriment pas juste pour le plaisir du débat mais pour défendre, depuis la naissance de l’association, les droits, sociaux notamment, des Français établis hors de France. La dernière lettre mensuelle que vous pouvez retrouver sur le site fdm-thailande.org ou sur la page Facebook de l’association ne déroge pas à la règle. Un anniversaire et des revendications qui nous ont donné envie de poser quelques question à l’un de ses membres éminents, Claude Bauchet, Conseiller des Français de l’Étranger.
Le Petit Journal : Considérez-vous que les Français du monde sont parfois considérés comme des citoyens à part, pour ne pas dire de seconde zone ?
Claude Bauchet : Je vais vous faire une réponse de normand. Le cadre général ou les lois françaises ne s’appliquent pas de la même façon pour les Français de l’étranger. Les aide sont décidées au niveau des conseils consulaires à l’étranger. Elles n’ont pas, dans notre cas, de caractère obligatoire. Les Français du monde n’ont donc pas les mêmes droits que les Français de France. Je dis que c’est un problème politique de toujours qui pose question. En termes d’impôts, d’aides sociales aux personnes âgées et handicapées, en matière de santé, nous n’avons pas les mêmes droits et ça pose question. Nous essuyons des reproches parfois violents de la part de nos interlocuteurs parce qu’on ne peut pas accorder les mêmes aides qu’en France.
LPJ : Les profonds problèmes budgétaires rencontrés par la France accentuent-ils les disparités ?
C.B. : Vu le glissement progressif auquel on assiste depuis quelques années, les problèmes deviennent évidemment de plus en plus aigus. Cela se traduit par des coups de gueule de notre part mais aussi de la part de tout le monde. Les aides sociales baissent alors que le coût de la vie grimpe. Comment l’accepter ?
Je crois pouvoir clairement dire que les Français du monde comptent parmi les lésés de la crise budgétaire actuelle.
LPJ : Il y a de nombreuses explications et revendications dans la dernière livraison de votre lettre mensuelle et je renvoie nos lecteurs à sa lecture. Faites-nous juste partager vos deux urgences.
C.B. : Nous avons en effet deux priorités.
La première concerne la baisse des aides sociales qui sont déjà très faibles. Elles s’établissent au maximum à 390€ par mois pour les personnes âgées ou handicapées, sans aucun revenu. La somme est déjà dérisoire et une baisse de 5,5% a été actée pour 2025 !
Comme les choses sont décidées localement, en Thaïlande, les aides sont inférieures à celles accordées par exemple au Vietnam, alors que le coût de la vie est ici supérieur. Nous demandons juste une correction et nous ne sommes pas entendus.
En ce qui concerne les bourses scolaires, sur la base d’un savant calcul, les montants sont corrigés en fonction du niveau de vie théorique du pays. Mais c’est une société privée qui a la charge du dossier et nous ne parvenons pas à obtenir les critères.
LPJ : Votre second dossier urgent ?
C.B. : Il concerne la Caisse des Français de l’Étranger, qui est une société de droit privé remplissant une mission de service public.
La CFE a l’obligation de prendre toute inscription de Français, quels que soient l’âge et la pathologie. Nous y tenons absolument. Rien n’est officiellement remis en cause mais le débat est important et nous restons vigilants. La CFE est en déficit depuis trois ans et en vertu de cette mission de service public, l’État doit mettre la main à la poche, ce qu’il rechigne à faire.
LPJ : L’association est née en 1980, dans le sillage de François Mitterrand. Est-elle toujours aussi politisée que par le passé ?
C.B. : Notre rôle a évolué avec le temps. Nous conservons, bien qu’installés à l’étranger un lien étroit avec la France. Ceux que nous représentons votent aux élections. Le but de l’association consiste, au niveau local, à amener les Français à s’engager pour demander davantage de solidarité pour eux. Le côté revendicatif n’a pas été édulcoré par rapport au passé. Il s’inscrit juste dans une perspective politique différente. Les enjeux sont toujours sociaux, solidaires, écologiques, antiracistes, mais ils ne sont plus liés du tout à un parti politique quel qu’il soit. Les Conseillers des Français de l’Étranger sont des élus locaux de proximité, élus pour six ans par les personnes inscrites sur les listes électorales en Thaïlande et en Birmanie. Lors des dernières élections, notre liste citoyenne était la seule à ne pas être soutenue par un parti politique…
LPJ : Vous portez de grandes revendications collectives mais peut-on faire individuellement appel à votre aide, votre soutien, votre conseil ?
C.B. : Bien entendu. Nous agissons avant tout auprès de l’ambassade, des consulats, des parlementaires. Mais nous pouvons parfois aider individuellement en cas de souci particulier. Nous intervenons principalement sur les affaires sociales mais nous nous intéressons à tous les autres sujets qui concernent les Français établis dans les pays dont nous avons la charge.