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Cartel du riz : une idée saugrenue selon certains exportateurs

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Reuters

Le pouvoir thaïlandais aurait-il concocté un plan pour s’assurer la hausse du prix du riz sur les marchés mondiaux sans consulter ses exportateurs ? Dans le milieu, l’idée fait grincer quelques dents

Un pacte entre la Thaïlande et le Vietnam en vue de faire monter les prix du riz serait "impossible", a lâché sans concession lundi un haut responsable thaïlandais du secteur, amplifiant l'opposition à un projet proposé par le gouvernement de former un cartel du riz.

Le gouvernement thaïlandais a déclaré vendredi qu'il prévoyait avec le Vietnam de créer un pacte entre les deuxième et troisième exportateurs mondiaux de riz pour renforcer leur pouvoir de négociation et aider à atténuer la hausse des coûts de production.

Le Vietnam n'a pas pour sa part confirmé qu'un tel plan était en cours de discussion.

"Une idée bien mal avisée"

Toujours est-il que le président honoraire de l'Association thaïlandaise des exportateurs de riz, Chookiat Ophaswongse, affirme que son organisme n'a pas été consulté et estime qu’il s’agit d’une idée bien mal avisée.

"La Thaïlande et le Vietnam ne sont pas les plus gros exportateurs -combinés, ils représentent moins que l'Inde-, et les acheteurs se tourneraient vers des concurrents", a déclaré à Reuters Chookiat Ophaswongse, ajoutant que le riz ne peut pas être stocké assez longtemps en attendant une hausse des prix.

"Les politiciens ne comprennent pas le marché du riz et n'en ont pas discuté avec l'association", a-t-il dit.

Ses commentaires font écho à ceux du chef de l'association alimentaire vietnamienne, qui a déclaré la semaine dernière qu'il serait déraisonnable d'augmenter les prix dans une telle période d'incertitude alimentaire mondiale.

Le ministère vietnamien de l'Agriculture ne s’est pas encore exprimé sur le sujet, malgré les demandes de Reuters.

Alongkorn Ponlaboot, conseiller du ministre thaïlandais de l'Agriculture et des Coopératives, a déclaré que le Vietnam "convenait en principe que l'augmentation des prix profiterait aux deux pays".

"Quant à savoir si cela va aboutir, on ne peut y répondre car il doit y avoir davantage de discussions", a-t-il ajouté.

Impossible sans la participation de l’Inde

L'Inde, premier exportateur de riz, représente environ 40% de l'offre mondiale et ses prix ont atteint la semaine dernière leur plus bas niveau depuis cinq ans en raison d'une roupie indienne plus faible et d'une offre abondante parmi les principaux pays exportateurs. Des responsables ont déclaré la semaine dernière que l'Inde n'envisageait pas de limiter les exportations.

Le riz brisé à 5% indien est au moins 50 dollars la tonne moins cher que celui du Vietnam et 100 dollars moins cher que la Thaïlande, ont déclaré lundi les revendeurs. Ces dernières années, le Vietnam a importé du riz indien destiné à la fabrication de bière et d'aliments pour animaux.

"Les mécanismes de prix ne fonctionneront pas sans la participation de l'Inde. Le riz indien est déjà beaucoup moins cher... Si d'autres augmentent les prix, les acheteurs se tourneront naturellement vers l'Inde", a déclaré un revendeur basé à Bombay.

Selon lui, le Vietnam et la Thaïlande ont perdu des parts de marché et devraient au contraire baisser leurs prix pour les récupérer.

Un négociant en riz basé à Ho Chi Minh-Ville estime lui aussi qu'un tel cartel est peu probable car il y a "trop de points de vue différents sur cette question" et tout simplement parce qu'aucun des deux pays n'est le premier exportateur.

"Si l'Inde limite ses exportations, les prix augmenteront sans que la Thaïlande et le Vietnam n’aient à former un cartel", a-t-il déclaré.

Le Vietnam et la Thaïlande représentent à tous les deux environ 10% de la production mondiale de riz brut (paddy) et environ 26% des exportations mondiales, selon le département américain de l'Agriculture.

L'un des plus grands perdants d'un cartel serait le deuxième importateur de riz au monde, les Philippines, un gros acheteur de riz thaïlandais et vietnamien.

Les Philippines ont atteint une production record de paddy l'année dernière avec 20 millions de tonnes, mais cela reste insuffisant pour nourrir ses 110 millions d'habitants.

Le porte-parole du département philippin de l'agriculture, Noel Reyes, s'est dit lundi convaincu que la technologie pourrait aider la production à atteindre de nouveaux sommets et "d'une manière plus rentable" que le Vietnam et la Thaïlande.

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