

L'un des seuls médecins américains à pratiquer des avortements tardifs a été assassiné alors qu'il était dans une église. Si ce meurtre a été condamné par tous, même certains mouvements anti-IVG, il relance le débat sur cette pratique qui déchaîne encore la haine aux Etats-Unis
(Rédaction Internationale) - Georges Tiller, médecin américain qui pratiquait des avortements tardifs a été tué par balle alors qu'il assistait à un office religieux, dimanche 31 mai, dans une église luthérienne de Wichita au Kansas. La police a réussi à interpeller le tireur à 300 kilomètres de là, à Kansas City.
Photo : AFP / Des militants anti-avortement attendent Barack Obama à l'Université Notre Dame de South Bend le 17 mai 2009
La cible à abattre
Ce n'était pas la première fois que le docteur, âgé de 67 ans, faisait l'objet d'une attaque attentant à sa vie. Georges Tiller était en effet l'un des rares médecins à pratiquer l'avortement au delà de la 20e semaine de grossesse alors que le f?tus pourrait être fiable en dehors du ventre de la mère. De nombreuses associations anti-IVG manifestaient régulièrement devant sa clinique de Wichita. En 1986, celle-ci avait été la cible d'un attentat à la bombe et en 1993 Georges Tiller avait déjà été blessé par balle. Les autorités américaines qui enquêtent sur ce meurtre tentent d'ailleurs de découvrir un lien entre le suspect et un de ces mouvements ?pro-vie?. "Nous pensons qu'il s'agit d'un acte isolé, mais nous poursuivons notre enquête", a déclaré à la presse le directeur adjoint de la police de Wichita, Tom Stolz.
Un assassinat qui relance le débat
Alors que la problématique de l'avortement est réapparue à la Une des journaux américains après les récentes déclarations de Barack Obama et la nomination de Sonia Sotomayor à la Cour suprême, la mort de Georges Tiller enfonce le couteau dans la plaie. Le président américain, qui appelait les deux camps à trouver un ?terrain d'entente?, s'est dit "choqué et indigné" par ce meurtre. "Aussi profondes que soient nos divergences, en tant qu'Américains, sur des questions aussi difficiles que l'avortement, elles ne peuvent se résoudre par des actes de violence haineux", a-t-il ajouté. La plupart des mouvements anti-avortements, craignant d'être diabolisés, se sont tout de suite défendus de toute implication dans l'assassinat du médecin. "Pour notre mouvement, cela ne pouvait plus mal tomber", a réagi le révérend Patrick Mahoney, le leader de la Christian Defense Coalition. "Si nos adversaires l'utilisent pour faire passer le mouvement 'pro-life' pour un groupe extrémiste et violent, nous pourrions perdre une partie de notre passion et de notre énergie à contester Sotomayor", a-t-il déclaré. Mais d'autres personnalités du mouvement anti-avortement, comme Randall Terry, sont beaucoup moins politiquement corrects. "George Tiller était un tueur en série et nous ne pouvons pas arrêter de le dire", a déclaré le fondateur du groupe Operation Rescue.
Les associations pro-IVG s'inquiètent, quant à elles, pour la sécurité des praticiens et demandent à l'administration Obama de renforcer les dispositifs de protection de ces médecins ?courageux?. Malgré cette tragédie, les associations pro-IVG n'abandonnent pas leur lutte. "La violence et le meurtre n'élimineront jamais le besoin d'avortement", a insisté le Dr Suzanne Poppema, présidente du conseil des Médecins pour le choix et la santé en matière de reproduction (Physicians for Reproductive Choice and Health)
Damien Bouhours (www.lepetitjournal.com) mercredi 3 juin 2009
En savoir plus
Article du Monde, Un médecin emblématique du droit à l'avortement abattu à Kansas City
Article de Libération, Un médecin américain pro-avortement tué dans une église
Article du Nouvel Obs, Meurtre du Dr Tiller : les anti-avortements craignent d'être diabolisés




































