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La Grèce met fin à la prolifération d’hébergements Airbnb

« Cela devient impossible de vivre ici », se plaint Maria, une résidente du quartier de Koukaki à Athènes. Depuis cinq ans, cette retraitée voit ses voisins d’étage partir un à un, remplacés par des touristes logés dans des appartements Airbnb. Comme de nombreux habitants, elle salue la récente annonce du gouvernement grec : interdire des milliers d’hébergements de courte durée pour réguler un marché en pleine explosion.

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Écrit par Lepetitjournal Athènes
Publié le 15 janvier 2025

Le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis a présenté cette mesure comme une nécessité sociale et urbaine. « L’essor incontrôlé des plateformes comme Airbnb a contribué à l’inflation des loyers et à l’éviction des résidents locaux », a-t-il expliqué lors d’une conférence à Thessalonique. En imposant des restrictions strictes, le gouvernement espère redonner leur ville aux habitants tout en préservant l’équilibre urbain.

Une crise du logement exacerbée par le tourisme de masse

Athènes, Thessalonique et certaines des îles les plus populaires comme Santorin et Mykonos sont devenues des foyers de spéculation immobilière. Depuis l’arrivée d’Airbnb en Grèce il y a une décennie, les propriétaires ont délaissé les locations longue durée pour se tourner vers des touristes disposés à payer trois ou quatre fois le prix habituel. En conséquence, les loyers pour les habitants ont grimpé en flèche : jusqu’à 30 % d’augmentation dans certains quartiers populaires, selon une étude récente de l’Université d’Économie d’Athènes.

Pour les jeunes travailleurs et les étudiants, trouver un logement abordable est devenu un véritable casse-tête. Sophia, une étudiante en architecture de 24 ans, explique : « J’ai dû quitter Exarchia, où je vivais depuis des années, parce que les loyers ont doublé. Maintenant, je suis obligée de partager un appartement en périphérie. »

Les régulations : un espoir pour l’avenir ?

La nouvelle législation, qui devrait entrer en vigueur au printemps 2025, vise à interdire les locations de courte durée dans les immeubles résidentiels lorsque plus de deux appartements sont consacrés à Airbnb. Les propriétaires devront également s’inscrire dans un registre national et s’acquitter de taxes spécifiques, une mesure destinée à freiner les abus.

Pourtant, certains critiquent cette approche. « C’est une attaque contre les petits investisseurs qui ont mis leurs économies dans un ou deux appartements », affirme Kostas, propriétaire de trois logements à Thessalonique. Airbnb, de son côté, met en garde contre les conséquences économiques pour les villes et les petits entrepreneurs.

Une bataille pour l’âme des villes

Au-delà de l’aspect économique, cette régulation reflète une lutte plus large pour l’âme des villes grecques. Athènes, avec ses ruelles historiques et ses balcons fleuris, risque de devenir un simple décor pour touristes, privé de la vie locale qui fait son authenticité.

Le sociologue Nikos Souliotis résume l’enjeu : « La question n’est pas seulement de loger les habitants, mais de maintenir des quartiers où les commerces locaux, les écoles et les équipements publics peuvent prospérer. Sans cela, les villes deviennent des musées à ciel ouvert. »

Pour Maria, l’espoir renaît. « Si cette loi est bien appliquée, peut-être que mes voisins reviendront. Et avec eux, la vie qu’on a perdue. »

Le défi de l’application

Reste à voir si cette réforme ambitieuse pourra être correctement appliquée dans un pays où la bureaucratie et le manque de moyens des administrations ont souvent freiné l’efficacité des politiques publiques. Mais pour l’instant, elle représente une lueur d’espoir pour ceux qui rêvent de réapproprier leur ville.

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