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13 mai 1981, 17h19 : Mehmet Ali Ağca tire sur le pape Jean-Paul II !

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Le pape Jean-Paul II, transporté dans sa voiture quelques instants après avoir été touché par le tireur turc Mehmet Ali Ağca, sur la place Saint-Pierre, le 13 mai 1981
Écrit par Lepetitjournal.com Varsovie
Publié le 16 mai 2022, mis à jour le 23 septembre 2024

13 mai 1981, place Saint-Pierre de Rome, le pape Jean-Paul II, entouré de 20.000 fidèles, est gravement blessé par trois balles tirées à bout portant. Le tireur, un ancien militant de l'extrême droite turque : les « Loups gris », s’appelle Mehmet Ali Ağca. A l’occasion du 41e anniversaire de ce premier attentat contre Jean-Paul II, lepetitjournal.com revient sur le drame et ses mystères...

 

Le pape Jean-Paul II salue la foule et soudain, à 17h19...

Ce jour-là Jean-Paul II se tient devant 20.000 fidèles place Saint-Pierre à Rome pour l'audience hebdomadaire. Soudain, alors que le Pape salue la foule, des coups de feu retentissent. Il est 17h19. Le souverain pontife est touché à quatre reprises : au bras gauche, à la main droite et deux fois à l'abdomen. Il s'effondre dans les bras de son secrétaire particulier, Stanislas Dziwisz. C'est la panique, deux fidèles présents sont également touchés : l'américaine Ann Odre et la jamaïcaine Rose Hill. Certains spectateurs et le chef de la sécurité du Vatican, Camillo Cibin parviennent cependant à désarmer le tireur, le Turc Mehmet Ali Ağca. Le jeune homme de 23 ans est arrêté et placé en lieu sûr.

 

Entre la vie et la mort

Pendant ce temps, le Pape grièvement blessé est transporté d'urgence par une ambulance.

Coup du sort, la sirène ne fonctionne pas : le véhicule va mettre 8 interminables minutes à rejoindre l'hôpital Gemelli en se frayant un chemin à travers la masse compact des fidèles restés prier pour Jean-Paul II.

Les médecins tentent alors l'impossible pour le sauver. L'opération dure plus de cinq heures. Le chef de l'Eglise catholique est touché à l'intestin et perd de grandes quantités de sang. Grâce aux transfusions sanguines, les médecins le sauvent in extremis. Cependant, durant ces transfusions, le Pape contracte un cytomégalovirus, qui lui coûte presque la vie quelques semaines plus tard.

 

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Le souverain pontife est touché à quatre reprises : au bras gauche, à la main droite et deux fois à l'abdomen.

 

Itinéraire d'un assassin

Orphelin de père, jeune voyou, contrebandier, Mehmet Ali Ağca se forme au maniement des armes en Syrie et rejoint finalement l'organisation d'extrême-droite, les Loups Gris. Il assassine en 1979 le rédacteur en chef de Milliyet, un grand quotidien de centre-gauche en Turquie. Arrêté, il s'échappe de la prison militaire la mieux gardée de Turquie et s'enfuit en Bulgarie.

La même année, Mehmet Ali Ağca menace le souverain pontife lors de sa visite en Turquie en 1979 :

« Le Commandant des Croisades, Jean-Paul déguisé en chef religieux. Si cette visite n'est pas annulée, je ne manquerai pas de tuer le pape-Commandant ».

Sous le pseudonyme de Vilperi, le jeune nationaliste va rejoindre l'Europe dès août 1980. Il voyage à travers toute la région méditerranéenne pour brouiller les pistes et arrive à Rome le 10 mai. Là, trois jours plus tard, lui et son complice Oral Celik attendent le passage du Pape en écrivant des cartes postales. A moins de six mètres de sa cible, Ağca fait feu mais Celik panique et ne déclenche pas sa bombe.

 

Crime et châtiment

En 1983, à Noël, Jean-Paul II rencontre Ağca en prison et lui accorde son pardon. Mais, selon les confidences de Mieczyslaw Mokrzycki, assistant du secrétaire particulier de Jean-Paul II, le Pape fut déçu par cette rencontre avec son assassin :

« Ni repentir, ni regret, il n'a pas prononcé le mot pardon ».

 

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Jean-Paul II rencontre Ağca en prison et lui accorde son pardon alors que le  prisonnier turc n'exprime aucun regret.


Le jeune Turc est condamné en Italie à la prison à vie mais sera libéré après dix-neuf ans de captivité. Il est ensuite extradé en Turquie où il avait été condamné pour des faits antérieurs. Après avoir été brièvement libéré sur parole huit jours suite à un mauvais calcul de ses réductions de peine, il est finalement relâché le 18 janvier 2010, après trois décennies d'emprisonnement.

Ağca se présente depuis comme « le Christ éternel » et le « serviteur suprême et universel de Dieu », annonce la fin du monde d'ici la fin de ce siècle et finit de rédiger une « Bible parfaite ».

Déjà en 2007, un 13 mai encore, Mehmet Ali Ağca déclarait vouloir abjurer sa foi musulmane pour rejoindre l'Eglise Catholique. Il souhaitait « retourner à Rome prier sur la tombe de Jean-Paul II pour lui exprimer toute (sa) reconnaissance filiale pour son pardon ». Le Pape Benoît XVI ne donnera pas suite à cette demande.

 

Le miracle de la Vierge de Fátima et la date du 13 mai ?

L'attentat survient le jour de l'anniversaire de l'apparition supposée de la Vierge à Fátima au Portugal, devant trois enfants, le 13 mai 1917. Jean-Paul II, qui devait évoquer l'épisode dans son discours, attribua justement sa survie miraculeuse à l'intervention de Notre-Dame de Fátima. Le Saint-Office confirmera officiellement en 2000 que cet acte est le dernier des trois secrets révélés par la Vierge au Portugal (une interprétation très contestée).

En 1982, Jean-Paul II se rend d'ailleurs à Fátima, pour remercier la Vierge d'avoir survécu aux balles d'Ağca.

Cruelle ironie, il y est poignardé par un prêtre intégriste espagnol, opposé à la libéralisation de l'église, Juan Maria Fernandez y Krohn. L'individu est maitrisé par le service de sécurité et l'attaque resta secrète : le Pape termina son voyage sans révéler ses blessures !

 

Les commanditaires

Rapidement, on accuse les agents bulgares d'avoir fomenté l'attentat. En effet, 17 mois après le début de son incarcération, Mehmet Ali Ağca affirme que Serguei Antonov, un responsable à Rome de la compagnie aérienne Balkan Air, lui a fourni le pistolet avec lequel il a grièvement blessé Jean-Paul II. Mais le bulgare est acquitté en 1986 pour « insuffisance de preuves ».
En 2006, une commission parlementaire italienne, chargée d'enquêter sur les activités des services secrets communistes pendant la guerre froide, conclut que l'attentat contre Jean-Paul II a été décidé par le dirigeant soviétique, Léonid Brejnev, puis mis en oeuvre par les autorités militaires d'URSS.

Le GRU, service secret militaire soviétique, aurait « ensuite procédé à une répartition des tâches » : les services bulgares auraient servi de « couverture » tandis que la Stasi, la police secrète est-allemande, aurait été chargée de la « désinformation ».

 

A qui profite le crime ? Un pape encombrant qui voulait " retourner en Pologne pour se joindre à la résistance si les Soviets envahissaient son pays "

D'après Marving Kalb, journaliste américain de la chaîne de télévision NBC, le motif est le suivant - comme le révéla le Times du 27 septembre 1982 : en août 1980, Jean-Paul II aurait envoyé un messager à Léonid Brejnev, avec une lettre manuscrite. Il le menaçait de "déposer la Couronne de Saint Pierre et de retourner en Pologne pour se joindre à la résistance si les Soviets envahissaient son pays" ; (c'était l'époque où une grève générale frappait la Pologne). Après différentes tractations entre Moscou, Varsovie et Rome, l'envoyé papal aurait persuadé les Soviets d'accepter l'accord de Gdansk, qui donna naissance au syndicat Solidarnosc.

Exaspéré par cette intervention du Pape et par sa volonté de soutenir financièrement les syndicalistes, Brejnev aurait décidé de se débarrasser de ce "prêtre touche-à-tout".


Les autres thèses : CIA, Cosa Nostra...

Mais il existe d'autres théories. En effet, la journaliste Roumiana Ougartchinska, dans son livre-enquête La vérité sur l'attentat contre Jean-Paul II, penche pour une autre thèse : la CIA aurait manipulé le groupe nationaliste turc des Loups gris (dont était membre Ağca), pour faire assassiner le Pape et provoquer une révolte violente en Pologne, alors que Jean-Paul II pratiquait une « Öst politique » basée sur la diplomatie.

Ainsi, les services secrets américains auraient mené une opération d'intoxication pour incriminer la « filière bulgare » et déstabiliser le bloc de l'Est.

Enfin certains accusent également la Cosa Nostra italienne.

 

Ce qu'en pense Wojciech Jaruzelski ?

Lors d'un voyage en Bulgarie en mai 2002, Jean-Paul II a déclaré qu'il n'a jamais cru en la piste de la « connexion bulgare ». Le Vatican semble en effet plutôt croire dans l'implication des nationalistes turcs. En avril 2011, l'ancien dirigeant polonais Wojciech Jaruzelski avait déclaré que, pour lui, c'était la piste islamiste « la plus probable ». Il s'appuie alors sur les menaces envoyées par Ağca, qualifiant Jean-Paul II de « Commandeur Croisé ».

Il affirmait également avoir eu un entretien en tête-à-tête avec Todor Zhivkov, Secrétaire du Parti Communiste bulgare, lors d'une visite officielle en 1982. Après avoir clairement posé la question à son homologue bulgare, Jaruzelski se serait vu rétorquer :

« Camarade Jaruzelski, est-ce que vous nous prenez pour des imbéciles ? Croyez-vous vraiment que nous aurions laissé sur place Antonov (le responsable de Balkan Air à Rome) s'il avait été impliqué dans l'attentat ? ».

 

L'ancien président polonais Lech Wałęsa, lui aussi dans la ligne de mire ?

Lech Wałęsa, ancien président de Pologne, leader du mouvement Solidarność et adversaire historique de Jaruzelski, a rapidement réagi toujours en 2011, dans le quotidien italien Il Messagero, déclarant : « Ne le croyez pas ! Jaruzelski est quelqu'un de malade et vieux qui tente d'apaiser les fantômes du passé ». Lech Wałęsa a rajouté qu'il rejetait fermement l'hypothèse des extrémistes musulmans et celle d'une manipulation de la CIA.

Pourtant l’ouvrage : L'attaque contre le Pape, accuse clairement le KGB d'être à l'origine de la tentative d'assassinat. Les deux auteurs italiens, le juge à la retraite, Ferdinando Imposimato et la journaliste, Sandro Provvisionato, vont même plus loin: les services secrets soviétiques auraient également planifié le meurtre de Lech Wałęsa, durant sa visite à Rome en janvier 1981. Selon un des deux auteurs :

"Le KGB a pris la décision d'éliminer physiquement ses deux plus grands opposants: Jean-Paul II et Lech Wałęsa ".

Aux lecteurs de se faire leur opinion, mais ce livre n'a pas manqué de relancer la polémique sur l'implication de l'URSS dans l'attaque du 13 mai 1981 place Saint-Pierre.

 

Epilogue... 

Le 2 avril 2005 le Pape Jean-Paul II meurt, victime d'un choc septique, d'un collapsus cardio-vasculaire et d'une infection urinaire. Ses funérailles sont suivies à la télévision par deux milliards de personnes. Place Saint-Pierre 500.000 fidèles assistent à la messe. Un murmure s'élève. Il devient bientôt un slogan scandé par la foule : « Santo subito ! Santo subito ! » Saint tout de suite !
Joseph Ratzinger, le nouveau pape Benoît XVI, a vu et entendu la Vox Populi. Réputé conservateur, il crée la surprise en annonçant rapidement le début du procès en béatification de Jean-Paul II. Une bulle pontificale de 1983 prise par Jean-Paul II lui-même précise pourtant que la procédure ne doit pas intervenir avant un délai de cinq ans suivant le décès. Benoit XVI décide de faire une exception.

 

Un destin polonais

Karol Wojtyła, futur Jean-Paul II, est originaire de la ville de Wadowice dans le sud de la Pologne. Il a d'abord été évêque de Cracovie puis cardinal avant de devenir le 264e pape en 1978. Il sera d'ailleurs le premier pape non italien depuis 1522.

Jean-Paul II est mort à l'âge de 84 ans, après 27 ans d'un pontificat très actif. Il a visité 129 pays et parcouru plus d'1,1 million de kilomètres. C'est lui qui a d'ailleurs redonné une impulsion au culte des saints en célébrant 1.338 béatifications et 482 canonisations : plus que tous les 263 autres papes réunis !

 

 

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