Morosité, incertitude, solitude, peur confuse… Les villes pleurent leur splendeur, où l’on s’embrassait sous les réverbères, où la nuit regorgeait de couleurs criardes éclairant les danseurs et les ivrognes, jusqu’à ce que le soleil reprenne ses droits, laissant abasourdis les noctambules…Valencia, ville jusqu’au bout des ongles, a baissé la garde. Sales journées de pandémie. Sales instants de désespoir.
Des jours et des jours, jusqu’au moment où à Valencia la belle, on se rappelle ce que c’est d’être valencien. Valencia qui a donné son sang pour la république, Valencia qui a montré son visage lorsque la dictature se mourait, et fait exploser le premier vent de liberté, en faisant de la ville un espace extravagant, celui de tous les possibles, Valencia, malgré les emmerdes se réveille.
Antonio Campos, alias la Margot
Comme toujours. Qui se rappelle d’un jeune homme descendant de Betera, pour devenir l’incarnation de la liberté retrouvée ? Antonio Campos, alias la Margot, transformiste et transgressif, faisant ressurgir la sensualité de la ville.
Temps passés…À Valencia fleurissaient les cabarets, La Belle Époque, au 8 de la calle Cuba, le café Claca… La Margot et son double, Sara Montiel, inondaient les petites scènes de lumière. La Cetra, calle del Triador, devinrent l’épicentre culturel de la ville. Politiques, amoureux de la culture, ou simples passants, assis sur des coussins, écoutaient de la poésie, frémissaient au son de la guitare, ou regardaient des films d’avant-garde. Et La Margot surgissait, outrageusement maquillée, dans une robe de star américaine, pour dire, oui, Valencia c’est ça ! la liberté et le rire, la démesure et l’outrecuidance. La fête et la survie. Fards, paillettes, robes fendues, rire et folie, tout ce qui fait que les larmes de tristesse deviennent des larmes de rire.
Et aujourd’hui, où la vie n’a rien de drôle, où la mort rôde, où la liberté vacille, nous en avons besoin. Parce que Valencia ne désarme jamais. Et recommence à briller.
L’esprit de la Margot
Alors… Salud à toi la Margot ! Tu serais fière de ta ville ! Les cabarets ont disparu, seule reste La sala Russafa, calle Denia. Mais partout dans la ville surgissent des projets drôles, foutraques, déjantés, des films, des dessins sur les murs… À Russafa, on croise des tireurs de tarots, et des jeunes gens qui se battent pour le barrio, faisant mentir les bonnes gens qui disent que le quartier est mort. Dans le Carmen, l’art contemporain devient du caramel. À chaque coin de rue on se bat pour que la ville soit verte et on œuvre pour la planète, le monde entier bosse et se retrouve aux terrasses. Le design débarque pour l’année entière. Et les théâtres sont pleins.
C’est ça l’esprit de la Margot. Partout, on peut sentir l’énergie débordante qu’ont toujours eu les valenciens. Valencia, la petite sœur pauvre de Barcelone, la plage de Madrid, a remis sa robe de gala. On sait pourquoi on habite à Valencia. C’est une ville qui bouge et qui invente, qui brille et qui grandit, grandit, comme lorsqu’on met des talons hauts et qu’on devient la reine du monde. Qui se cache parfois comme une débutante, et qui, une fois découverte, ferait rougir un légionnaire.
Parce que c’est bien joli les oranges.
Cette année, regardez, respirez, souriez, dansez, observez, profitez, inventez. Valencia est une ville passionnante. Il suffit de chercher…