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Thomas Rouer : "Pour l’instant je ne me vois pas rentrer en France"

Thomas Rouer expatriation ValenceThomas Rouer expatriation Valence
Écrit par Shirley SAVY-PUIG
Publié le 21 juillet 2019, mis à jour le 22 juillet 2019

Comme beaucoup d’expatriés, c’est l’amour qui a mené Thomas à Valencia et c’est en 2016 qu’il s’y est installé. Entrepreneur dans l’âme, il a commencé par développer son business de chasseur immobilier qui s’est rapidement mué en une agence immobilière. Mais au-delà de sa conjointe, qu’aime-t-il le plus à Valencia ? Il nous l’explique dans un nouvel entretien de la série #MaViedExpat !  

 

Lepetitjournal.com/Valence : Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?

Thomas Rouer : Je suis ch’ti, j’ai grandi à Lille et j'ai fait des études de commerce en France et en Italie. Mais en parallèle, j'ai toujours eu d'autres activités. A 13 ans, j’étais clown à domicile et j’animais des anniversaires d’enfants. J’ai également tourné dans des films en tant que figurant ou acteur. Au terme de mes études j'avais commencé à travailler dans le milieu du cinéma mais j’ai mis cette idée de côté parce que j'ai eu la possibilité d’aller vivre en Italie et de faire un VIE (Volontariat International en Entreprise) dans une grande firme japonaise. Après, deux ans passés chez Nissan, j'ai créé ma société avec mon meilleur ami dans le secteur de l’agro-alimentaire et de la grande distribution. Etre entrepreneur, c’était quelque chose que j’avais toujours eu dans un coin de la tête.  

Cette fibre entrepreneuriale, c’est de famille ?

Mon père a également créé une société mais tardivement, vers 45-50 ans. Plus jeune, j'avais développé une affaire de clown à domicile. Je pense que j'aime bien prendre les décisions seul, sans avoir à les valider. Après, c’est un risque mais le jeu en vaut la chandelle. J’ai un tempérament qui aime le risque et la polyvalence. Quand on est entrepreneur, on fait plusieurs métiers dans une même journée : je fais de la comptabilité, du commercial, de l’administratif, je suis standardiste, DRH, je vais en France faire des réunions d’information, je suis ambassadeur, etc. Je crois que c’est cela qui me plaît : ne jamais faire la même chose.

J’entendais dire que l’Espagne était pleine d’opportunités et je savais que si je venais dans ce pays, j’allais pouvoir monter ma société.

Pourquoi avoir choisi Valencia ? 

Les pays latins m’ont toujours plu et c’est en Italie que j'ai rencontré Maria, ma copine espagnole qui est de Valencia. J'ai tout plaqué pour la suivre et je suis venu ici pour vivre avec elle car elle voulait monter son cabinet d’architecte. En Italie, c’était plus compliqué pour elle. De mon côté, j’entendais dire que l’Espagne était pleine d’opportunités et je savais que si je venais dans ce pays, j’allais pouvoir monter ma société. On s’est décidés en un mois et on est arrivés en décembre 2016.

Vous connaissiez Valencia avant de venir y vivre ? 

J'étais venu une fois avec Maria à un mariage au mois de septembre et deux fois auparavant pour des week-ends. Mais ce n’était pas la même chose. A l'époque, je ne connaissais pas encore l'Espagne comme je la connais maintenant. En septembre, pour le mariage, c’était le jour le plus chaud de l’année et Valence ne m’a pas plu ce jour-là. C’était une fournaise : on cherchait l’ombre et il n’y avait personne dans les rues.

L’Espagne, tout comme Valence, plus le temps passe et plus cela va crescendo, au contraire de l’Italie où tout me paraissait merveilleux, mais derrière le vernis … J’étais jeune aussi, tout me paraissait beau. Les Espagnols me paraissent beaucoup plus fiables, beaucoup plus sincères, notamment pour faire du business, pour monter son entreprise. 

Vous aviez la chance d’avoir votre amie qui est originaire d’ici mais comment se sont passés les débuts ? 

J’ai appris tout seul la langue, sans prendre de cours. Etant parfaitement bilingue en italien, j'ai acquis en quelques mois le même niveau d’espagnol que celui que j'avais pu atteindre en plusieurs années pour l’italien. Il y a beaucoup de ressemblances. Pour un mot que l’on confond, il y en a cinquante qui sont pareils. De jour en jour je me suis beaucoup amélioré et cela m'a permis d’être opérationnel dans mon travail rapidement.

Le plus difficile c’était les horaires espagnols … Encore aujourd’hui j’ai du mal avec ces horaires ! Quand nous allons dans le village de ma belle-famille qui est à Castilla-la-Mancha et que nous dînons l’été à minuit, j’ai du mal. Maintenant, cela me paraît plus normal de déjeuner vers 14h ou 14h30, mais avant j’avais l’impression d’être en jeûne.

Qu’est-ce qui vous a marqué au niveau de la ville ou de la région ?

Les champs d’orangers à perte de vue, pourvoir prendre son café en terrasse en décembre, la paëlla le dimanche midi, même quand le repas dure quatre heures. Plus le temps passe et plus j’apprécie de prendre le temps en fait. 
Et puis j’ai été surpris de voir qu’à Valence et dans la région, les gens sont extrêmement sportifs ! Il y a des groupes de 30 personnes qui vont courir dans le Turia. Dans la campagne, il y a des gens qui font du vélo ou du VTT. 

Il y a vraiment une qualité de vie exceptionnelle à Valencia. Quand on regarde les villes du sud de la Méditerranée, c'est une des rares villes qui rassemble autant de critères positifs. On se sent en sécurité, je n’ai peur nulle part, même dans les quartiers que les gens redoutent le plus.  

Thomas Rouer

Ce qui m’a également marqué lorsque je travaillais dans un espace en coworking, c’est que les gens prennent le temps. A l’époque, j’étais tout le temps "speed" et je n’arrivais pas à me mettre dans le rythme alors que les espagnols prenaient le temps. C’est sûr que d’un côté, le travail avance moins vite, mais de l’autre, ils profitent … et ils ont raison ! Cela ne sert à rien de se tuer dans les transports ou dans des tours de cinquante étages si c’est juste pour compter les sous dans un compte en banque derrière. Les gens avec qui je travaille me disent qu’ils préfèrent gagner moins mais « ser feliz » (être heureux), profiter de la vie. Tous les weekends ils vont à la mer, ils déjeunent dehors, ils sont tranquilles et ils ont tous cet état d’esprit. Ça aussi cela m’a aidé à venir en Espagne !

Administrativement, c’était très facile de créer une société mais comme dans tout business, le plus dur n’est pas de créer une structure, mais de trouver des clients. 

Comment avez-vous monté votre société de chasseur immobilier ? Cela a été facile ?

En Espagne, c’est relativement facile. Le statut d’autonomo est simple à faire et l’on n'est pas obligé de passer par les cases immatriculation de société, notaire, capital minimum. Et cela enlève beaucoup de freins au début ! Administrativement, c’était très facile mais comme dans tout business, le plus dur n’est pas de créer une structure, mais de trouver des clients. 

Qu’avez-vous découvert sur la législation immobilière en Espagne ? 

Dans toutes les ventes que nous avons pu faire, il est très rare qu’elles se soient passées sans aucun soucis. Déjà parce que le rôle du notaire en Espagne n’a rien à voir avec celui des notaires français : il ne fait aucune vérification et ne fait qu’authentifier une signature. Que ce soit avec nous ou avec un autre, il faut se faire accompagner lors d’un achat immobilier car on peut se retrouver avec des appartements qui ont des dettes. Il faut également se méfier des agences qui ont un avocat en interne. De même, en Espagne, il y a très peu de diagnostics obligatoires. La législation est différente et l’acheteur est peu protégé. En France, on a 15 jours après signature pour se rétracter s’il y a, par exemple, un vice caché, comme des charges impayées. En Espagne, cela n’existe pas.

Au-delà de l’aspect pécuniaire, qu’est-ce qui vous motive le plus dans votre travail ? 

Ce qui me plaît énormément, c’est que j’ai réussi à monter une équipe. Ce n’est pas facile de garder une équipe avec un esprit. Ce qui me plaît aussi, c’est la flexibilité : on a une idée, on la met en place. Par exemple pour les Fallas, à la fin des mascletas nous mettions un stand pour nous présenter. Cela n’a pas marché mais ce n’est pas grave. Ce que j’aime bien c’est essayer des trucs dont j’ai envie, développer de nouvelles pistes. 

Revenons sur Valencia et sa région : quels sont vos endroits préférés ? Quelle est votre Valencia ? 

J’aime bien le marché de Mossen-Sorrel dans le Carmen. Il est très local et pas trop touristique. On peut y prendre un verre et il est vraiment sympa. J’aime courir dans le lit de l’ancien fleuve Turia avec Maria. Nous allons courir au moins deux fois par semaine et l’on croise souvent du monde que l’on connaît. Je dirais également la plaça de los Patos, calle la mar où il y a des façades baroques et des balcons magnifiques avec de superbes céramiques. C’est un quartier de haut standing mais pas « prout-prout ».

Et dans les villes alentours ?

Le mirador du Garbi qui est à une demi-heure de voiture de Valencia. On peut se garer juste en bas et y monter grâce à une sorte de via ferrata ou alors en faisant le tour et en se garant en haut. On arrive sur un promontoire qui domine toute la vallée. C’est le dernier point haut avant de tomber à pic. C’est magnifique et c’est une super escapade que je conseille.

La ville d’Altea qui est une ville magnifique. Le vieux Altea est splendide. C’est le joyeux de la Costa Blanca selon moi. Sinon, côté plages, je préfère le Saler sauvage ou la Patacona. 

Quand on a fait le choix d’aller dans un pays, il faut l’accepter tel qu’il est. Les gens qui critiquent l’Espagne se mettent tous seuls une barrière avec les locaux.

Où vous voyez-vous dans quelques années ? Toujours à Valencia ?

Oh oui, Valencia à fond ! J'ai pas mal vécu en Italie quand même mais Valence est vraiment une ville qui offre tout. Ojala comme on dit ici, si un jour j'ai suffisamment d’argent, j’aimerais acheter un bateau pour aller passer les weekends à Formentera. Mais nous avons un temps de dingue, un climat incroyable… Pour l’instant je ne vois pas rentrer en France.

Et pour ceux qui voudraient tenter leur aventure à l’étranger, que leur conseilleriez-vous ?

Apprendre la langue, c’est essentiel ! En brisant la barrière de la langue, cela change beaucoup de choses, encore plus quand on s’intéresse aux gens, à leur culture, leurs films, musiques et expressions. Connaitre les films cultes, les chansons des grands-parents, c’est vraiment mon conseil numéro un pour s’intégrer. 

Quand on a fait le choix d’aller dans un pays, il faut l’accepter tel qu’il est. Les gens qui critiquent l’Espagne se mettent tous seuls une barrière avec les locaux. Mais c’est très français aussi ... Il faut accepter le pays avec ses qualités et ses défauts.

Il faut également faire des activités locales qui permettent de partager une passion commune avec des Valenciens. C’est la meilleure manière de s’intégrer. Les gens se plaignent toujours que les Valenciens ne sont pas ouverts mais il faut partager un lien commun avec eux. Quand on a un lien commun, cela se passe tout de suite mieux. Il faut s’insérer dans leur culture en faisant des choses avec eux. 
 

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