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Yoann FOUCHER : « Pour s’expatrier, il faut un esprit aventureux »

Yoann Foucher, un nantais habitant Valence depuis plus 15 ansYoann Foucher, un nantais habitant Valence depuis plus 15 ans
©LPJV
Écrit par Shirley SAVY-PUIG
Publié le 30 novembre 2017, mis à jour le 30 novembre 2017

Yoann a 36 ans et vient de la région Nantaise. C’est à la suite d’un stage professionnel en hôtellerie qu’il est tombé amoureux de Valence … et de sa compagne ! Aujourd’hui, il est le gérant de l’établissement hôtelier Sohotel situé non loin de Ruzafa. Il nous raconte sa découverte de la ville et sa vie d’expatrié mais aussi sa vision sur l’évolution de la ville depuis 15 ans.

Lepetitjournal Valence : Comment êtes-vous arrivé à Valencia ?

Yoann Foucher : J’ai fait une école hôtelière. Sur les trois ans de cursus, il y avait deux stages à faire. J’ai fait un premier stage en France dans un château qui était très intéressant. Pour le second, je voulais le faire dans une chaine hôtelière à l’étranger. Toute ma promotion était partie à Londres. En Espagne, il y avait le choix entre Madrid et Valence.

Le stage à Madrid étant déjà pris je suis parti à Valence et comme je suis très attaché à la nature et à la mer, je me suis dit que c’était un bon choix.

Connaissiez-vous la ville avant d’arriver ?

Pendant mes études au lycée hôtelier, j’avais eu un professeur d’espagnol qui nous avait fait découvrir Valence, les Fallas, les oranges. Quand j’ai dû choisir mon stage, je voulais simplement aller en Espagne. Je suis venu quatre mois en stage à Valence et ce fut magnifique. Après mes quatre mois de stage à Valence, je suis rentré faire ma dernière année de BTS hôtellerie. 

J’avais un ami dont les parents avaient une maison dans le sud de l’Espagne et nous y sommes allés avec plusieurs copains pendant les vacances de février. En revenant, nous avons décidé de passer par Valence avant de remonter sur Nantes car je voulais leur montrer la ville et revoir les amis que je m’étais faits là-bas. Ce fût le déclic. C’est vrai qu’ici les gens sont reçus d’une manière différente. J’ai été accueilli si chaleureusement que cela a fait tilt dans ma tête. Sans savoir si j’allais avoir mon BTS ou pas, nous sommes partis en vacances avec des copains en Espagne et j’ai imposé Valence comme destination. J’y ai vécu trois mois en collocation et ensuite je me suis installée avec ma copine valencienne de l’époque. C’était en Juin 2003. Pour le travail, je suis ensuite parti vivre à Barcelone deux ans et deux ans encore à Alicante. Et c’est en 2012 que je suis revenu à Valence où je me suis installé définitivement.

Entre Barcelone, Alicante et Valence, c’est donc cette dernière qui l’a remporté ?

Ma femme venait de Valence donc c’était plus facile et puis tous mes bons amis étaient ici. Mais nous étions très bien à Alicante. Barcelone c’était une bonne expérience également. J’étais au cœur de la ville vers la Sagrada Familia mais pour moi il y avait trop de monde. C’est plus une ville pour les jeunes. Il y tellement de choses à voir et à faire … Barcelone, il y a de tout pour tous les goûts et c’est magnifique pour cela. Alicante c’était plus tranquille. Nous y avons passé deux ans à être tranquilles et à faire ce que nous voulions faire sans stress.

Yoann et son fils sur les Torres de Serranos

Question travail, avez-vous eu du mal à trouver un emploi ?

Non pas du tout. J’avais gardé mes contacts de stage et je suis arrivé pendant la période estivale. Avec mes amis, nous voulions juste passer l’été à Valence et même si la moitié de mes copains ne parlaient pas un espagnol très courant, nous avons tous trouvé du boulot. Mais il est vrai qu’à cette époque-là, c’était plus facile puisque c’était juste avant la crise.

Vous l’avez senti cette crise économique ?

Oui, au niveau professionnel et personnel, nous l’avons senti. Au niveau personnel, nous avions également beaucoup d’amis au chômage ou leurs parents, des gens qui avaient travaillé toute leur vie … Cela s’est senti. Et professionnellement, il y avait moins de réservations. Il fallait faire une guerre des prix pour faire venir les gens.

Et Valence que vous connaissez maintenant depuis plus de 15 ans, comment l’avez-vous vu évoluer, changer ?

Je pense que c’est au niveau politique que les changements se sont vraiment faits. Quand je suis arrivé en 2002, il y avait vraiment une grosse vie nocturne, tout était ouvert jusqu’à tard dans la nuit, avec beaucoup de diversités. Et puis avec la venue du Pape en 2006, la Copa America en 2007 et 2010 et l’ouverture du circuit de Formule 1 en 2008, la Mairie de Valence de l’époque a voulu donner un côté plus hype, plus joli et plus clinquant à la ville. Elle a réalisé un ménage et cela n’a pas été bien fait. La preuve, il n’y a plus de Formule1, de Copa America ou de Pape qui revient. On l’a noté au niveau culturel aussi car il y a beaucoup moins de stars qui viennent à Valence. Mais depuis trois ou quatre ans, je constate que cela repart peu à peu.

D’après vous, pourquoi les célébrités internationales boudent-elles Valence ?

Déjà, il y a le problème de l’IVA (NDLR : TVA espagnole) qui est très haut dans la région et qui fait que peu de gens viennent. Mais le problème c’est également les horaires de fermeture des bars ou des centres culturels qui s’arrêtent trop tôt, cela coupe tout. Pas mal de barrios ont aussi été délaissés. Par exemple, Russafa n’était pas forcément un quartier qui craignait à l’époque et pourtant il y a eu un grand ménage. Cela partait certainement d’un bon sentiment de réaliser des grands événements comme la Copa america, mais il fallait penser à tout le monde, surtout pour ne plus les avoir maintenant...

Votre compagne est originaire de Valence. Comment décririez-vous les Valenciens ? 

Oui, elle est de Manises plus exactement et son père est de Cuenca. Pour moi, les valenciens sont des personnes extrêmement respectueuses et très chaleureuses quand on les connait. On peut se balader habillé comme on veut, personne ne vous jugera alors qu’en France, on te met plus facilement dans une case et on est souvent jaloux du succès des autres.

Ici, à Valencia, on fait en sorte que tout aille bien. 

Et puis les gens sont très famille aussi. Je me suis fait opérer de l’appendicite il y a quelques temps. En France, on m’aurait dit « Ouais, bon, c’est l’appendicite, ce n’est pas grave ». Ici, j’avais ma compagne 24 heures sur 24 à mes côtés, ma belle-famille et mes amis sont venus me voir, comme si j’avais eu une opération à cœur ouvert. (rires)

Vous vivez à Manises. Je n’ai pas encore eu l’occasion d’interviewer un habitant de cette ville. Comment la décririez-vous ?

C’est une ville d’aéroport, mais bizarrement, j’ai toujours vécu près des aéroports. A Nantes j’habitais à côté, à Barcelone, après la Sagrada Familia j’étais à villa de Camps ou je travaillais à l’hôtel à côté d’El Prat, et à Alicante près de l’Altet. Et donc à Valence, j’habite à Manises. Mais je dois avouer qu’en ce moment, j’en ai un peu marre ! (Rires.) Manises, c’est surtout le fief de la céramique qui s’est un peu perdu mais qui reste sympa à visiter, même s’il y a moins d’artisans. Maintenant que nous avons un enfant de quatre ans, nous voudrions aller nous installer vers Riba-Roja, loin des avions et de la pollution. 

Vous envisagez de rentrer en France ?

Non pas du tout ! (rires.) Il faudrait vraiment qu’il se passe une guerre ou quelque chose de vraiment important, une maladie grave d’un proche par exemple, pour que je rentre.

Mais vous y retournez de temps en temps ?

Oui, depuis que nous avons notre fils, afin qu’il ait un contact avec les amis et la famille. Nous y retournons deux ou trois fois par an surtout depuis qu’il y a des vols directs pour Nantes. 

Est-ce qu’il y a des choses qui vous manquent de la France ?

Oui, comme tous les expatriés je pense. La famille, les amis, les lieux, la nourriture même si on arrive à trouver des produits français. Ce qui me manque vraiment, c’est la proximité avec les amis et la famille qui est en France.

De Valence, qu’aimez-vous le plus ?

La météo ! Cela se ressent tellement sur les gens. Le temps fait beaucoup ! Ce que j’aime à Valence, c’est que l’on peut faire de tout : aller à la plage, aller à la montagne, découvrir les pueblos des alentours qui sont très sympas à faire. Et depuis deux ou trois ans, il y a un choix sympa de festivals de théâtre.

Qu’aimez-vous comme festivals ? Quel est celui que vous ne rateriez pour rien au monde ?

Celui de Jimmy Glass, le festival international de Jazz. Et puis la programmation au Palau de la Musica est très intéressante. Le festival de les Arts également, el Deleste, le Latinos Fest. Le calendrier des festivals est assez étoffé quand même. L’avantage c’est qu’en travaillant dans le tourisme, je connais toutes les dates. (rires)

Quels lieux recommandez-vous à vos amis, à vos clients à Valence ?

Tout dépend du temps que l’on reste. Il y a des clients qui restent deux jours et quand je leur montre tout ce qu’il y a à faire, ils sont souvent très surpris. Mais c’est le problème de Valence qui ne sait pas trop se vendre. Les gens vont faire une semaine à Madrid ou à Barcelone et deux jours seulement à Valence … Je conseille forcément le centre historique et l’ancien fleuve. La plage aussi mais pas forcément la Malvarossa. Je préfère celles d’El Saler, El Palmar, El Perellonet et même au nord, Port Saplaya, Sagunto, Canet, Alcossebre et Xilxes qui ont des plages vraiment cools. 

Les côtes de la région sont magnifiques et pleines de pueblos très sympas à faire à même pas une heure de Valence.

A Valence, je conseillerais donc le centre, de jour comme de nuit, Ruzafa, le Cabanyal et ensuite s’ils ont le temps de sortir un peu de la ville.

Pour moi il existe deux types de touristes : ceux qui veulent vraiment s’intégrer dans la ville à qui on peut conseiller des choses authentiques et ceux qui cherchent un Starbuck ou un MacDo. 

Est-ce qu’il y a des choses que vous n’aimez pas à Valence ou que vous regrettez ? 

Je regrette le changement qu’il y a eu à Valence à notre retour de Barcelone et d’Alicante. Il y avait des punks, une diversité, des gens différents. Depuis, l’ambiance nocturne s’est refermée. C’est peut-être la seule chose.

Votre expatriation est positive.  Quels seraient vos conseils à ceux qui veulent tenter l’aventure de vivre à Valence ?

Je pense que pour s’expatrier, il faut avant tout un esprit aventureux. Il ne faut pas avoir peur. C’est souvent cela le problème en France : nous avons la peur de l’échec. Alors que si on part d’un point, le retour est toujours possible. Mais surtout, il faut se renseigner sur la ville, savoir ce qu’elle peut apporter. Il faut un minimum de préparation. 

Il y a beaucoup de français ici à Valence et c’est toujours bien de pouvoir contacter ceux qui sont sur place. Et penser aux acteurs francophones de Valence qui peuvent montrer ce qu’il faut et ne surtout pas faire. 

C’est quelque chose que je n’avais pas il y a 15 ans. Certes, sur les réseaux sociaux, il n’y a pas que des choses bien, mais il y a également des gens bienveillants.

 

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