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Bento&co, Ship&co : entreprendre à Kyoto

Thomas Bertrand, fondateur de Bento&co et de Ship&coThomas Bertrand, fondateur de Bento&co et de Ship&co
Écrit par Steen
Publié le 3 juin 2023, mis à jour le 31 mai 2024

La façade de la boutique Bento&co, située dans un quartier fréquenté de Kyoto, attire l’œil. Boites à bento colorées, paires de baguettes, ustensiles de cuisine, difficile de résister à la tentation. Je pousse donc la porte pour faire la connaissance de Thomas Bertrand, le directeur de l’entreprise Bento&co. 

L’entrepreneur français arrivé au Japon en 2003 pour ses études a accepté de revenir avec moi sur les défis liés à son installation à Kyoto et à la création de son business.
 

C’est difficile de monter une entreprise au Japon ?

Après mes études je suis revenu au Japon avec un visa vacances travail et j’ai voulu rapidement monter mon propre business. Un résident étranger peut débuter tout à fait une activité commerciale ici. Etant pour ma part déjà marié (donc avec un visa d'époux) à une Japonaise, je n'avais pas à me préoccuper de ça.

Quand j’ai fondé Bento&co en 2008, ce n’était pas encore une « kabushiki kaisha » (société par actions), on était en « kojin jigyō-sha » (entreprise personnelle). Avec ce modèle, si on n'a pas une activité qui nécessite une licence particulière, on peut débuter la vente rapidement. Cela m’a permis de commencer une activité de vente de produits. C’est très pratique, car, tant que l’on ne gagne pas au-dessus d’un certain montant, on paye assez peu d’impôts. On travaille en général à la maison, en famille, donc pas besoin de payer un bureau et si on a besoin d’acheter un ordinateur ou une imprimante, tout passe en frais, donc c’est assez facile de débuter une activité ici. On a tout de même très rapidement pris un expert-comptable. C’est très important.

Après, il faut le reconnaître, pour traiter avec des fournisseurs, il est préférable d’avoir un statut solide. Cela facilite les relations.

 

Comment vous êtes-vous fait connaître ? 

Au début je me suis demandé « qu’est-ce que je peux faire facilement et quel domaine m’intéresse ? » Quand je suis arrivé, j’aimais partager mon quotidien au Japon, mes découvertes… je tenais régulièrement un blog, il s’appelle « la rivière aux canards » et il existe toujours d’ailleurs, même si je ne l’alimente plus. Il était alors connu des amateurs du Japon et c’était une source de clients potentiels évidente... mais ça, je m'en suis rendu compte après avoir lancé Bento&co !

J’ai toujours aimé la gastronomie et faire la cuisine. J’ai donc ouvert un site en français pour exporter des produits japonais en rapport avec la cuisine vers la France dès 2008. C’était un très bon timing ! Après 2008 il y a eu la crise économique, du coup de plus en plus de gens voulaient cuisiner eux-mêmes, ces envies collaient parfaitement avec la culture du bento japonaise de la boutique et avec cette idée de se préparer à manger soi-même, d’apporter son repas avec soi au travail ou à l’école.

culture du bento


 

Vous vendez plutôt aux particuliers ou au professionnel ?

On vend plutôt aux particuliers, mais effectivement on vend aussi à diverses boutiques, par exemple en Australie. Côté France on a travaillé avec Nature et Découverte, on travaille aussi avec des restaurants des hôtels qui ont acheté des boites à bento pour du room service ou pour du service dans leur restaurant. 

On a fait les boites à bento en collaboration avec de grandes marques de mode, mais également avec Pierre Hermé. On travaille aussi avec un Youtubeur français avec qui on va sortir une boite prochainement. 

 Les opportunités ne manquent pas lorsque l’on relie France et Japon ! 
 

En parlant d’opportunités, comment s’est passé la période COVID pour Bento&co et comment vous êtes vous réinventé ?

La boutique en ligne a donc ouvert en 2008 et la boutique physique a ouvert en 2012 parce que j’ai eu l’opportunité. J’ai trouvé un bâtiment à louer, pas loin de là où j’habitais à l’époque donc c’était vraiment l’occasion. Ça a tout de suite bien marché, ça a été énormément de travail et d’apprentissage aussi. Une boutique physique c’est un autre métier par rapport à une boutique en ligne. 

Mais cette boutique a été fermée pendant 3 ans parce qu’il n’y avait plus de touristes étrangers avec la pandémie. Heureusement on vendait toujours en ligne. On a ramené tout notre stock qui était géré par un logisticien pour le gérer en interne. On s’est remis à faire les envois nous-mêmes, à travailler directement avec nos fournisseurs japonais.

C'est d'ailleurs grâce à ça que nous avions lancé Ship&co en 2017, grâce à notre expérience de la vente en ligne et de ces commandes que l'on envoie dans le monde entier. C’est une solution de logistique qu’on a créée pour nous et qui connecte les boutiques en ligne et les transporteurs (Yamato, DHL,  fedex, Sagawa…). Ça permet de gérer facilement le processus d’impression des étiquettes d’envoi pour les envois internationaux et les envois nationaux avec un seul outil, tout est centralisé pour tous les transporteurs.

C’est une solution qu’on revend maintenant au e-commerçants et aux logisticiens japonais. 90 % de nos clients sont des entreprises japonaises, des petites entreprises comme des très grosses entreprises… on a par exemple Mitsubishi qui utilise notre système dans ses entrepôts pour certains envois. 

Ship&Co, la solution de thomas Bertrand

 

Donc le secret pour vous c’était de vous diversifier ?

Oui, clairement. On vendait en ligne, à des particuliers et à des professionnels, en boutique, désormais on vend aussi du service technologique... même si l'on est une petite société, on s'est bien diversifié.

Là c’était le COVID, mais en 2011 c’était le tsunami qui a eu un impact sur le tourisme. À cette période, il y a eu un rebond des ventes en ligne énorme parce que les Français voulaient aider le Japon. Beaucoup de fans du Japon voulaient acheter des produits japonais pour aider le pays à traverser cette crise.

Quand le volcan en Islande est entré en éruption, les avions étaient bloqués, on ne pouvait plus envoyer de colis pendant quelques jours, ça a eu un gros impact sur l’entreprise. Le taux de change yen/euro/dollar nous impacte énormément également, j'ai appris depuis 2008, qu'à moyen ou long terme, c'est vraiment imprévisible !

Ce que je veux dire avec mes petites histoires c’est qu’il y a toujours des événements qui vont influencer le succès de votre business et c’est pour ça que la diversification est importante à mes yeux.

 

Outre cette idée de diversification, auriez-vous un autre conseil à donner aux entrepreneurs français voulant s’installer au Japon ?

Je dirais qu’il faut se débarrasser de ses a priori sur le Japon, ou sur la France d’ailleurs. Ne surtout pas se dire « au Japon c’est comme ça, donc il faut faire comme ça ». Non ! Ça dépend des entreprises. Ensuite, quelle que soit la chose qu’on fait, il faut aimer ce qu’on fait et il faut le faire bien : faire attention aux produits, au client… voilà après ça peut marcher n’importe quel pays je pense, mais au Japon c’est important d’observer autour de soi comment les gens interagissent, comment il ne faut PAS interagir. Prenez votre temps. Je n’ai jamais commencé un business en ayant une recette toute prête, je n’ai pas fait de business plan non plus. Ça s’est fait naturellement et c’était peut-être la meilleure façon de faire pour moi. 

 

Un grand merci à Thomas Bertrand pour nous avoir accordé son temps de manière totalement improvisée ! 

 

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