

Stephan Caron, ancien nageur de l'équipe de France, a participé à trois olympiades consécutives. De Los Angeles à Barcelone en passant par Séoul, le double médaillé de bronze sur 100 mètres nage libre revient pour Lepetitjournal.com sur ses souvenirs olympiques
Lepetitjournal.com - Que représentent les Jeux Olympiques dans la carrière d'un sportif de haut niveau ?
Stephan Caron - C'est un moment extrêmement important. C'est un peu le sommet d'une carrière sportive. On s'entraine toute sa vie dans l'idée de participer à une épreuve emblématique et les Jeux Olympiques est celle-ci. C'est la plus prestigieuse. Depuis mon plus jeune âge, je rêvais de participer aux JO. J'ai eu cette occasion trois fois. C'est une consécration.
Qu'est ce qui rend cette compétition si importante ?
C'est une épreuve universelle qui existe depuis très longtemps. Il y a donc une histoire qui est liée aux Jeux Olympiques. Toutes les valeurs véhiculées autour de l'olympisme sont également extrêmement fortes. C'est aussi le fait que toutes les disciplines y soient regroupées ainsi que tous les meilleures athlètes du monde. Enfin, c'est l'épreuve la plus regardée avec des milliards de téléspectateurs.
Quand on est à l'intérieur, on vit beaucoup dans le village olympique. Cet endroit rassemble tous les athlètes et c'est très impressionnant la première fois. Je me souviens de mes premiers Jeux en 1984 à Los Angeles. Je suis allé diner un soir au restaurant du village olympique et j'avais en face de moi Carl Lewis?À l'époque j'avais 17 ans et lui venait pour gagner 4 médailles d'or, ce qu'il a d'ailleurs fait. On se rend compte dans des moments comme celui-là de toute la dimension des Jeux. Tous les athlètes sont regroupés au même endroit, il n'y a pas de considérations de classe sociale, d'échelle, de classement. C'est ce qui fait la richesse et la beauté des Jeux Olympiques.
Justement, dans quel état d'esprit, si jeune, avez-vous vécu vos premiers Jeux à Los Angeles ?
C'était mes premiers Jeux, j'étais très impressionné, les yeux grands ouverts. Je n'y allais pas pour gagner même si j'ai eu la chance de terminer sixième. J'ai surtout essayé d'accumuler un maximum d'expérience.
J'en ai pris plein la vue. En 84, c'était la première année où on expérimentait les débuts d'Internet avec un système de messagerie interne au village olympique. Nous avons passé des heures là-dessus. Les Américains avaient également créé des salles de jeux vidéos, la cantine restait ouverte 24h sur 24?C'était un peu comme une grande colonie de vacances?
Le danger est de se disperser. Certains sont passés complètement à côté de leurs Jeux. Maintenant, les sélectionneurs font d'ailleurs souvent appel aux anciens pour prévenir et mettre en garde les jeunes athlètes contre ce genre de distractions. C'est difficile à 16 ou 17 ans de garder la tête sur les épaules. On est très impressionnable à cet âge là. Je me souviens, quand j'ai fait les séries du 4x200m, je touche le mur d'arrivée et quand je lève les yeux vers les tribunes, je vois Jacques Chirac qui était venu nous encourager tout à fait simplement avec Guy Drut. Il me dit : "Super Stéphane, vous avez battu les Américains, c'est génial"?J'avais 17 ans, je bat les Américains et Chirac me félicite?Tout ça me tombe un peu dessus. Je me rends alors compte de l'impact de cette compétition auprès du public, des politiques, des médias?
Progresse-t-on à chaque nouvelle olympiade à laquelle on participe ?
On apprend beaucoup. Les premiers Jeux, on engrange surtout de l'expérience. Pour les seconds, en général, on arrive avec un objectif. Il y a beaucoup plus de pression. Pour ma part, j'étais vraiment attendu, je le ressentais sur mes épaules et j'ai vraiment fait le contrat minimum. Pour les troisièmes, je me suis vraiment dit que c'était les derniers et que je voulais en profiter un maximum. On est plus serein, on a plus d'expérience, c'est du bonus, du plaisir.
(Crédit : Simon Gleize)

Quand vous disputez vos premiers Jeux, vous dites vous que ce sont peut-être vos derniers ou est-ce que vous savez déjà que vous y retournerez ?
À cet âge là, avec l'insouciance, on ne pense pas trop à ce genre de choses mais c'est vrai qu'on ne peut pas savoir. Ça demande tellement de travail, tellement d'efforts, de sacrifices. Il y a le risque de blessure, on ne sait jamais ce qui peut arriver. C'est l'incertitude du sport. Mais c'est vrai qu'à 17 ans, on se dit quand même qu'on a le temps d'en faire d'autres. Aux deuxièmes Jeux, on commence à penser qu'il sera difficile de revenir. D'ailleurs, peu d'athlètes ont la chance de participer à trois olympiades.
Des trois auxquelles vous avez participé, quelle est l'olympiade qui vous laisse les meilleurs souvenirs ?
Il n'y en a pas une en particulier. Chacune a apporté son lot de bonheur et de surprises. À Los Angeles, les Américains avaient mis de gros moyens. C'était très impressionnant mais il y avait eu le boycott des pays de l'Est. Sur le plan sportif, c'était donc un peu sous-dimensionné.
À Séoul, ils avaient mis le paquet sur l'organisation. J'y allais avec un objectif élevé donc une pression énorme sur les épaules. C'est aussi l'année où il y avait eu l'affaire Ben Johnson ou encore Henri Leconte à qui on avait reproché d'être venu un peu à reculons.
En 1992, c'est évidemment la dream team américaine de basket qui a fait son entrée en force aux Jeux. Tout le monde ne parlait que de ça.
J'ai ensuite eu la chance de commenter les JO pour Canal+. Sydney, c'était les meilleurs Jeux pour la natation parce que c'est un pays qui adore ce sport. Ce sont aussi les Jeux de Cathy Freeman avec Marie-José Pérec qui se retire. Pour Pékin, on se souviendra de la grandeur de la cérémonie d'ouverture mais aussi des Jeux de Michael Phelps.
Les Jeux amènent tous les quatre ans une dose de passion et d'histoires qui font de cet évènement quelque chose d'extraordinaire.
Qu'attendez vous de ces Jeux de Londres ?
Je pense que ça va être intéressant car c'est la première fois depuis 1948 que les Jeux sont organisés à Londres. C'est donc un peu un retour au berceau. Les installations sont magnifiques et ce sera surement plus festif qu'à Pékin. Les Anglais ont un côté plus "fun" et très patriotique. Ils sont également passionnés de sport.
Nous avons la chance de ne pas être loin de la France donc les supporteurs vont faire le déplacement. Nous avons également une équipe de France très performante, notamment en natation, qui ramènera des médailles d'or. Il y aura aussi le retour de Michael Phelps en natation et un grand champion comme Usain Bolt en athlétisme que tout le monde attend.
Que pensez-vous de l'équipe de France de natation ?
On devrait remporter plusieurs médailles. On a la chance d'avoir plusieurs très bons nageurs. Je pense à Camille Muffat sur 400 mètres qui sera très très dangereuse et qui ira à mon avis chercher la médaille d'or. Il y a également Camille Lacourt qui est champion du monde en titre. D'autres plus jeunes comme Yannick Agnel qui peuvent créer des surprises. Le relais 4x100 a aussi toutes ses chances. On a un bon réservoir de nageurs notamment chez les sprinteurs et c'est de loin la meilleur génération de nageurs français.
Vous êtes aujourd'hui Directeur Executif Europe de General Electric Commercial Finance à Londres. Votre carrière de sportif de haut-niveau vous aide-t-elle dans votre reconversion ?
Oui, le sport aide. Ça forge un caractère, ça permet d'avoir des repères dans la vie. Je m'en sers un peu comme d'une boite à outils pour résoudre des problèmes de management, quand j'ai un problème pour constituer ou motiver une équipe, pour les aider à fixer des objectifs. Je puise à l'intérieur pour être plus efficace dans mon travail.
Quel est l'engagement de General Electric pour ces Jeux Olympiques de Londres ?
Nous sommes sponsor des Jeux olympiques ainsi que diffuseur à travers la chaine NBC qui nous appartient à 42% mais aussi fournisseur d'équipement dans différents stades. Nous avons également organisé avec le LOCOG et le gouvernement anglais, toute une série d'évènements dans les écoles pour promouvoir les valeurs olympiques. C'est bien de faire partie d'un groupe qui porte les valeurs de l'olympisme.
Propos recueillis par Simon Gleize (www.lepetitjournal.com/jeux-olympiques) lundi 23 juillet 2012
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