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Global Peace Index : la paix menacée par l’après Covid-19 ? 

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Écrit par Déborah Collet
Publié le 10 juin 2020, mis à jour le 11 juin 2020

D’après le Global Peace Index 2020, la paix dans le monde sera compromise dans les années à venir. La crise sanitaire augmenterait l’instabilité politique des pays, affecterait les relations internationales et renforcerait les conflits, les droits civils et la violence.

En 2020, le niveau moyen de paix dans le monde s’est dégradé pour la neuvième fois en douze ans, 81 pays ont vu leur niveau de paix s'améliorer tandis que 80 se sont détériorés. Le Global Peace Index s'inquiète de la dégradation de la situation par la crise de la Covid-19. 

 

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Quels sont les pays et les régions les plus pacifiques ?

Le Global Peace Index démontre que l’Islande, depuis 2008, reste le pays le plus pacifique au monde, s’en suit Singapour, le Japon, la Norvège et la Suisse. A contrario, l’Afghanistan reste le pays le plus violent depuis deux ans, suivi par la Syrie, l'Irak et le Sud-Soudan. Le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord sont les deux régions les moins pacifiques du monde.

L’Europe reste la région la plus pacifique du monde. La Grèce (25e rang) et la Belgique (27e rang) ont connu la plus grande amélioration en matière de paix entre l’année 2019 et 2020. La Grèce grâce à un meilleur score sur l'échelle de la terreur politique, la Belgique grâce à une diminution du nombre de décès dus aux conflits internes. Les deux pays ont amélioré leur taux d’homicide. Quant à la France, elle a chuté de 3 points par rapport à 2019 et se situe actuellement à la 66e place sur 123.

Le niveau de paix des régions de la Russie et de l’Eurasie progresse grâce aux améliorations des conflits en cours, de la sécurité et de la sûreté. Ainsi, l’Arménie enregistre la plus grande amélioration de la paix en comparaison avec les autres pays du monde, gagnant 15 places pour se classer au 99e rang.Le Bénin a connu la plus grande détérioration de tous les pays du monde, perdant 34 places dans le classement d’Indice mondial de la paix. Vingt pays d’Afrique subsaharienne ont néanmoins amélioré leur situation en matière de paix, tandis que 24 l'ont détériorée. L’Amérique du Sud est le continent qui a enregistré le plus grand nombre de détériorations dans les trois domaines de l'IPS qui sont la sûreté et sécurité, la militarisation et les conflits en cours.

 

La crise économique déstabilise la paix 

D’après l’étude, l’"impact économique de la violence en 2019 s'est amélioré en raison de la diminution de l'intensité des conflits internes, mais la violence a coûté à l'économie mondiale 14,5 billions de dollars, soit 10,4 % du PIB mondial." Ce chiffre équivaut à l’injection financière réalisée après la crise de 2008. D’après Serge Stroobants, directeur pour l’ Europe et la Région MENA à l’Institute for Economics and Peace : "Ce chiffre qui tend à évoluer nous montre que nous vivons une situation de crise économique plus importante que celle vécue en 2008." 

Une recherche spéciale de l’IEP démontre aussi que la pandémie mondiale a entraîné une augmentation de la volatilité économique entre les pays. Les économies de certains pays étaient d’ores et déjà en difficulté avant l’apparition du virus, avec notamment des taux d’endettement élevés. Ces pays, comme le Brésil, le Pakistan et l’Argentine auront plus de difficultés à emprunter des moyens financiers afin de les réinjecter dans leur économie locale. L’Italie, la Grèce, la Lettonie et la Pologne seront fragilisés par l’impact de la crise économique car ils étaient déjà affaiblis à cause de leurs économies et de leurs faibles performances en matière de "résilience sociale". Selon l’étude, l’Australie, la Norvège et la Nouvelle-Zélande seraient les trois pays les mieux placés pour envisager l’avenir. Le Royaume-Uni n’a, lui, pas vécu une aussi grande crise économique depuis 400 ans.

 

Des relations internationales en danger

Depuis 2009, le financement dans les opérations de maintien de la paix des Nations Unies a augmenté. Ces améliorations de contributions risquent de ne pas durer puisque les gouvernements souhaitent désormais verser des fonds dans le soutien de leur économie locale. En revanche, l’impact économique du virus pourrait avoir un effet plus positif sur les guerres par procuration. Et pour cause, elles deviennent, en tant d’instabilité économique et de baisse des prix du pétrole, plus difficiles à financer. D’après l’IEP, "l’activité de l'Arabie saoudite au Yémen, l'intervention russe et turque en Syrie et le soutien de l'Iran aux milices, seront autant d'exemples notables à suivre dans l'année à venir."

Ce déclin économique ferait naître de nouvelles tensions entre les nations, comme les États-Unis et la Chine. Les frictions au sein d'organisations multilatérales comme l'OMS, l'OMC et le Conseil de sécurité des Nations unies s'accentuent également.

 

Montée en puissance des mouvements sociaux 

Les effets de la crise sanitaire réduiraient à néant tout le tissu socio-économique qui avait été construit dans les décennies précédentes. L’Indice mondial de la paix montre que les émeutes, les grèves générales et les manifestations antigouvernementales n’ont cessé d’augmenter depuis 2011. Serge Stroobants a affirmé que "les émeutes dans le monde entier ont augmenté de 282 % au cours de la dernière décennie et les grèves générales de 821 %." Il poursuit : "Cette tendance va continuer et s’aggraver à cause des frustrations des populations face aux conséquences du confinement telles que la faillite et la fermeture des entreprises causant des pertes d’emplois…"

À la suite de la crise sanitaire, le monde sera polarisé en deux groupes, dictés par les conditions d’après-crise qui reposeront sur trois facteurs : la résilience économique, le contrôle de la souveraineté et la résilience de la société. Ces troubles grandissants apparaissent comme des facteurs de risque majeur pour la stabilité de la paix dans le monde. Par exemple, à Hong Kong et au Chili, les citoyens ont manifesté contre une série de problèmes, allant des inégalités économiques, aux brutalités policières jusqu’à la hausse des prix des ressources essentielles.

 

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Manifestations à Hong Kong.

 

Ce rapport montre que l’épicentre des protestations sociales reste l’Europe. Néanmoins, ces contestations sont considérées comme non-violentes puisque seuls 35 % des quelque 1 600 incidents ont été enregistrés comme violents. Nous pouvons observer que les démocraties libérales d’Europe permettent le droit à la parole et les citoyens l’utilisent pacifiquement. Par exemple, en Allemagne, les citoyens descendent dans les rues pour manifester et les grèves sont toujours présentes. La France a, elle aussi, connu une augmentation des protestations citoyennes comme l’apparition en octobre 2018, du mouvement des Gilets jaunes. Initialement, le mouvement protestait contre l’augmentation du prix des carburants automobiles, puis contre les mesures prises par le gouvernement.

 

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Mouvement des Gilets jaunes, France.

 

Notre avenir : sans paix et sans écologie ? 

L’étude de l’IEP indique que les pressions environnementales continuent à avoir un impact négatif sur la paix dans le monde. Serge Stroobants nous a confié que "la crise économique a démontré qu’à un certain moment nous devrions revoir la manière dont nos économies sont mises en place pouvant avoir un effet positif sur les politiques de changement climatique."

Il est révélé que 2,26 milliards de personnes habitent dans une zone qui est impactée de manière importante, voire très importante par le changement climatique, dont 1,24 milliard dans les pays les moins pacifiques au monde. "Nous voyons que les effets du changement climatique vont exacerber les niveaux de violence et vice-versa." indique Serge Stroobants. Plus d’un tiers de la population n’aurait plus accès ni à l’eau ni à la nourriture d’ici 2050, principalement en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud et en Amérique latine.