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Pratique de la médiation à Singapour

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Écrit par Anne Coulon
Publié le 18 juin 2020, mis à jour le 19 juin 2020

La médiation, concept très ancien en Asie, a été réintroduite à Singapour dans les années 90 et fait aujourd’hui partie intégrante de son système de résolution des disputes. Le système de médiation judiciaire mis en place a eu un impact énorme. Par exemple, Aux Family Justice Courts (FJC) un total de 6,471 affaires ont fait l’objet d’une médiation en 2017, avec un taux de succès de 86%.[1] Le Singapore Mediation Centre a quant à lui conduit plus de 4,400 médiations pour une valeur totale de plus de 10 milliards de dollars depuis son lancement en août 1997 ; avec un taux de succès de 70% en moyenne et 90% de ces cas résolus en une journée.[2]

 

Dans toute négociation, mieux vaut être la solution que le problème.

- Alain Leblay -

 

La médiation privée demeure un mode de règlement des différends particulièrement rapide, neutre, et peu onéreux. Une procédure de justice peut être longue et coûteuse et l’aléa judiciaire est un facteur d’insécurité indéniable. Dans l’arbitrage un tiers tranche aussi le contentieux et impose sa solution. La médiation garantit au contraire une entière maîtrise du litige par les parties.

La médiation privée à Singapour

La médiation « privée », qu’elle soit commerciale, familiale, en droit du travail, etc. continue de se développer activement à Singapour. Elle est menée notamment par les prestataires de service désignés sous le Mediation Act 2017 : le Singapore Mediation Centre (SMC) créé en 1977, le Singapore International Mediation Centre (SIMC) créé en 2014, la Tripartite Alliance for Dispute Management instaurée en 2017 pour les litiges de droit du travail ; et le World Intellectual Property Organization Arbitration and Mediation Center (WIPO) créé en 2010. Des organismes privés existent en parallèle et proposent des services de médiation complets.

Il est enfin possible de recourir à un médiateur privé : avocat, ancien juge, entrepreneur, etc ; tant est qu’il/elle soit accrédité(e). Nombre de médiateurs privés de différents pays sont basés à Singapour.

En ce qui concerne le déroulement de la médiation, une phase préparatoire permet au médiateur de déterminer le lieu et les modalités de la médiation, et de comprendre et d’évaluer les positions respectives des parties, etc. Lorsque la médiation prend place, le médiateur accueille les parties et leur explique le fonctionnement de la médiation, son propre rôle, ainsi que les règles qui devront être respectées, comme la confidentialité, ou le respect du temps de parole de chacune des parties. Il établit ensuite un agenda, après que chacun ait résumé ses positions respectives. Les discussions entre les parties prennent ensuite place sous l’égide du médiateur lequel se doit de toujours demeurer neutre. Ce sont les séances plénières, durant lesquelles le médiateur aide les parties à recentrer de façon constructive les discussions sur les sujets listés dans l’agenda.. Il peut aussi demander aux parties l’interruption momentanée de la séance plénière afin de s’entretenir successivement avec chacune des parties dans des salles annexes de la salle où se déroule la médiation, ce sont les « caucus privés ».  Les parties se retrouvent ensuite en séance plénière et entament les dernières phases de négociation avant de parvenir à un accord.

Une médiation peut se dérouler en quelques heures, à l’issue desquelles un accord peut être trouvé. Il est parfois nécessaire de répéter les séances et souvent, deux ou trois séances permettent aux parties de trouver une solution, même aux litiges complexes.

Si les parties ont des avocats, ceux-ci assisteront aux séances et verront si les solutions proposées sont conformes à l’intérêt de leurs clients.

L’article 12 de la Loi sur la médiation de 2017 (Mediation Act 2017) prévoit un nouveau mécanisme pour qu’un accord de règlement de la médiation privée puisse être converti en une ordonnance du tribunal. Ce mécanisme vise à inciter les parties à utiliser le processus de médiation avec l’assurance de sa finalité et du caractère exécutoire des accords négociés.

 

La médiation judiciaire à Singapour

La médiation « judiciaire » a débuté à Singapour en 1994. Depuis 2010, il est obligatoire pour les parties de considérer la médiation (ou une autre forme de règlement extrajudiciaire des litiges (ADR)) pour les litiges civils au stade de la citation à comparaître. Par conséquent, une grande partie des affaires devant les tribunaux de Singapour font désormais l’objet d’une médiation judiciaire ou d’une autre forme d’ADR.  

Si vous saisissez la justice civile ou qu’une procédure est engagée contre vous devant un « State Court », une médiation peut être conduite au State Courts Centre for Dispute Resolution (SCCDR) au tout début de la procédure. La médiation peut ensuite être proposée par le juge à n’importe quel stade de l’instance, en première instance comme en appel.

Au niveau familial, pour les cas de divorce « contesté » et lorsqu’il y a des enfants de moins de 21 ans, les parties ont l’obligation de prendre part à des sessions de counselling et à une médiation au Child Focused Resolution Centre (CRFC) des Family Courts. L’objectif de ces séances de médiation est de résoudre les questions relatives aux enfants et à leurs besoins dans le cadre du divorce de leurs parents. Pour les cas dans lesquels les enfants ne sont pas impliqués, les parties participent à la médiation et au counselling des Family Resolution Chambers (FRC). Les séances ont lieu au début de la procédure de divorce, généralement entre le moment du dépôt des documents et la première audience de divorce. La durée des séances varie en fonction de la complexité de l’affaire. En règle générale, les cas sont réglés en 3 sessions ou moins. Les médiateurs sont des juges-médiateurs et des conseillers familiaux. Les avocats des parties peuvent assister à ces séances pour conseiller les parties sur diverses questions, notamment sur celle de savoir si la proposition du conjoint est jugée raisonnable.

 

Conclusion

Médiations judiciaire et privée sont intégrées de façon organisée et complémentaire dans le système judiciaire de Singapour.

La médiation privée est un outil juridique simple à la portée de tous. Elle est en train de faire ses preuves en période de pandémie. Grâce à la flexibilité du processus, les disputes commerciales sont résolues de façon rapide, permettant aux acteurs de préserver leurs intérêts dans un contexte incertain et difficile. En matière familiale, la médiation permet aux parties de mettre en place des modes d’organisation de séparation rapides, sur des bases négociées et réfléchies.

Organismes de médiation comme médiateurs privés se sont adaptés au Covid-19 et ont immédiatement proposé des médiations en ligne. Leur bon fonctionnement encourage désormais les médiateurs à garder les méthodes mises en place lors de vidéo conférences pour continuer de permettre aux parties la médiation quand elles ne peuvent être réunies au même endroit.

En outre, la Singapore Mediation Convention de 2019 va rendre la médiation encore mieux adaptée aux litiges transfrontaliers puisque les accords des parties issus de la médiation seront exécutoires dans les pays signataires.

 

 

 

lepetitjournal.com

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