Née sous le soleil niçois, Julie fait des études d’Art, Communication et Langage à la Faculté de Lettres puis elle poursuit un Master 2 en Marketing & Communication, suivi d'un stage de 6 mois en Chine, à Pékin, en 2007. C’est l’année avant les Jeux Olympiques, la ville est fébrile avec les travaux de rénovations et de préparation. Julie y rencontre plein de jeunes de son âge, nés après la génération de l’enfant unique ; ils ont tous 2 boulots et ils sont tous plein de rêves.
C’est dans ce contexte que Julie s’autorise pour la première fois à rêver. Après le stage et de retour en France elle décide d’être commerciale, car finalement les mots commerce et communication ont la même base sémantique latine « cum ». Ses recherches n’étant pas fructueuses Julie décide de partir au Canada pour effectuer un second master à l’école de commerce HEC Montréal.
Aussitôt rentrée en France, elle repart pour un poste à Dublin chez IBM, ou elle reste plus de 4 ans et grimpe les échelons de ce monde si dynamique et très stimulant. Mais Julie a besoin de nouveaux défis et décroche une mutation à Singapour en 2014.
Chez IBM, Julie est responsable des ventes de services sur le secteur finance en Asie, mais après 3 ans, la culture d’entreprise ne lui correspond plus et elle décroche un nouveau poste chez LinkedIn. C’est un moment particulier pour Julie, car d’un côté elle travaille dans une entreprise dont elle rêvait depuis longtemps et de l’autre côté elle réussit à réaliser son rêve secret de bâtir sa propre maison à Bali.
Bali représente un lieu magique pour vous, car il est à la fois le lieu où vous mettez vos racines avec la construction de votre maison et aussi le lieu qui va vous faire changer de voie professionnelle, comment cela s’est-il passé ?
Pour moi à Bali il y a quelque chose dans de magique, c’est dans l’air, les Balinais sont des gens extraordinaires. Ma maison est devenue pour moi l’espace où je peux exprimer mes envies. J’avais repéré un artiste sur Instagram et j’ai donc décidé d’aller le voir dans la galerie qui le représentait, où je découvre aussi une galeriste française, exceptionnelle, Melvine ; je tombe en amour d’une de ses œuvres qui fait 5 mètres de long.
Dans l’enthousiasme de cette découverte et acquisition, je lance alors l’idée d’ouvrir une galerie pour le représenter à Singapour. On peut dire que ça a chamboulé ma vie car à mon retour à Singapour, je décide de quitter le monde corporate et de me dédier à ce nouveau projet. Je me rappelle avoir appelé mes parents ne sachant pas trop comment ils allaient réagir à ma décision. A ma grande surprise ils m’ont dit qu’ils avaient toujours su que j’allais entreprendre ce chemin ! Il est vrai que pendant toute ma vie j’ai étudié et aimé l’Art. Et j’aime les artistes ; je pense qu’il faut leur épargner la partie de travail administrative et commercial qui est pour autant nécessaire pour développer leur « carrière ». Au départ de ma démarche il y a eu surtout beaucoup d’administratif à régler et depuis février 2020, je suis marchand d’art avec une galerie virtuelle.
Lazuli est une galerie virtuelle. Pourquoi ce choix ?
Tout d’abord parce que la location dans l’immobilier à Singapour est extrêmement chère, mais surtout parce que j’ai envie de bousculer l’ordre établi et je crois que ma valeur ajoutée est ailleurs. J’essaie de proposer tous les services liés à l’art, de la recherche d’œuvres existantes, à la création d’œuvres sur mesure, à la restauration, l’encadrement et la promotion d’artistes. Je vends tout d’abord ce que j’aime et non pas ce que « se vend bien ».
Les galeries ici sont très belles et élégantes mais peut-être un peu intimidantes ; j’ai voulu apporter l’art aux gens qui ne fréquentent pas ces lieux prestigieux. Je souhaite créer un lien entre des gens qui sont sensibles à l’art et les artistes.
La relation interpersonnelle est pour moi essentielle entre ces deux « mondes ». Je pars du souhait de mon client, qui peut vouloir encadrer un carré Hermès, par exemple, ou restaurer une œuvre d’art, ou bien qui recherche quelque chose qui n’a pas encore été créé.
Il y a un véritable processus d’apprentissage pour moi, dans tous les sens du terme. Et puis j’adore travailler avec des gens différents que ce soient des particuliers, des intérieur designers, des entreprises, des artistes et des artisans d’art.
Comment entrez-vous en contact avec les artistes, surtout pendant cette année si complexe ?
En début de journée, je regarde l’actualité de l’art, ce qui se fait actuellement dans le monde artistique, lectures, réseaux, sites web. Je déniche quelque chose qui me plait ou qui attire ma curiosité et je prends contact avec l’artiste. J’entame ma conversation avec un simple « J’aime ce que tu fais ». (Un sort de déclaration d’amour, je me dis)
Parfois ça arrive que ce soit un artiste qui vienne vers moi ; dans ce cas je me demande tout de suite si ce que il/elle me propose me fait vibrer. Puis je vais le/la rencontrer dans son studio, on fait connaissance, on parle pendant des heures. C’est une partie de mon métier que j’adore. Il y a toujours dans mon approche la question de comment je peux les soutenir et les aider à se développer et à créer.
En résumant, vous rentrez en syntonie avec un artiste et son processus créatif et vous opérez afin que son œuvre trouve son espace expressif et son lieu de « naissance », soit un client qui découvre cette œuvre et l’« adopte », dans un certain sens.
Tout à fait. Il y a la notion d’émotion dans tout ça, ce qui me semble diffèrent par rapport aux relations B2B du monde corporate.
Et c’est la même chose avec mes clients. J’ai la chance de rencontrer des gens de tout milieu, tout horizon, qui ont envie de décorer leur intérieur, leur bureau, qui souvent ne savent pas vraiment ce qu’ils veulent, si ce n'est du « beau », mais savent toujours ce qu’ils ne veulent pas. Je les interroge, visite leur intérieur, nous discutons de leurs gouts et envies et j’essaie de trouver l’œuvre qui les fera vibrer, qui leur donnera ce « waouh », moment que l’IT ne permettait pas. J’aime ces émotions.
D’où vient le nom de la galerie ?
Du bleu du lapis-lazuli, qui depuis toujours est ma couleur préférée. Lorsque j’avais une dizaine d’années, j’ai repeint tous les meubles de ma chambre en bleu, c’était ma « période bleue » comme Picasso. Je viens aussi de Nice qui a vu émerger Yves Klein et son fameux bleu. Dès le début de ce projet, cette couleur s’est imposée d’une manière immédiate et naturelle. J’ai simplifié le mot et choisi aussi parce que ça « sonne » bien en français autant qu’en anglais. Mon logo reflète bien ma nature, un œil qui regarde vers le futur.
Sur votre site, on trouve des tableaux, des sculptures, des objets d’art issus de ventes aux enchères, pourquoi ?
Pourquoi pas ne proposer tout ce qui touche à l’art ? de l’encadrement ou de la restauration, par exemple. J’ai choisi de ne pas m’empêcher des choses qui sont de toute façon en relation à l’art.
Pareil, pour mes secteurs d’actions ; je m’adresse aux particuliers mais aussi aux sociétés, qui ont autant besoin d’art que les particuliers. Je ne propose pas exclusivement des objets mais aussi des ateliers d’appréciation et découverte de l’art pour les entreprises, ravies de créer des œuvres collaboratives qui restent dans leurs bureaux, et qu’ils peuvent transformer en cadeau d’entreprise, ou label sur les bouteilles de hand sanitizer.
Comment arrivez-vous à vous approcher des particuliers ?
Aux vues de la situation actuelle, il faut que les gens puissent me trouver. Il est donc nécessaire que j’arrive à communiquer différemment. Je touche à tout, Instagram, Facebook, LinkedIn, je distribue mes cartes de visite un peu partout et j’essaie de contacter en direct un maximum de monde. Il y a comme une incertitude en ce moment face au covid, mais c’est aussi l’opportunité pour beaucoup de repenser leur vie, leurs priorités et de peut-être acheter de l’Art pour leur maison qui est aussi devenue leur bureau.
On retrouve chez vous comme un fil rouge qui lie toutes les expériences, les études et les pays ou vous avez vécu.
C’est vrai ! Ce sont les rencontres évidemment. Ces deux frères rentrés de chine et qui m’ont donné l’envie d’y faire mon stage de master, ce jeune homme rencontre en chine qui m’avait parlé d’HEC Montréal, cette jeune stagiaire chez IBM Ireland qui a adore mon CV, cette jeune Française en Irlande qui décide de tout laisser tomber pour se lancer dans le coaching, cette jeune collègue qui quitte tout pour faire un tour du monde, cet artiste et cette galeriste à Bali, ces deux amies françaises à Singapour qui me poussent à parler de moi dans un article plutôt que de parler d’art ou de mes artistes…. Et mes parents, surtout, qui ont eu mille vies, dans plusieurs pays et plusieurs boulots, mais toujours avec passion. Toutes ces personnes qui, à un moment donné de ma vie, ont eu un rôle particulier. Et puis moi qui ai eu peur toute ma vie, je me suis lancée dans cette aventure sans craintes, l’art et l’entreprenariat se sont imposés à moi comme une évidence.
Un rêve dans votre tiroir secret… ?
J’ai la chance d’avoir réalisé un rêve d’enfant, un voyage à cheval, en Mongolie en 2017. J’ai aussi accompli un rêve d’adulte, ma maison à Bali. Maintenant, je rêve de vivre de ma passion, vivre dans l’art, de l’art et avec l’art.