Directeur de l’Alliance Française de Singapour depuis plus de trois ans, Fabian Forni a bien voulu répondre aux questions de Lepetitjournal.com, sur son parcours et ses ambitions pour cette institution qui fêtera ses 75 ans.
Fabian, qu’est-ce qui vous a amené à Singapour ?
Avant Singapour, je suis resté quatre années à Bangkok, comme conseiller de coopération et d’action culturelle à L’ambassade de France, après avoir passé mes 19 premières années de carrière à servir la France de l’intérieur, notamment à l’Assemblée nationale puis à la municipalité de Dijon, où j’ai travaillé pendant près de 12 ans. C’était mon premier séjour de longue durée en Asie et j’ai été conquis par ce continent.
Quand l’échéance de mon poste a approché, je rêvais de pouvoir en trouver un autre en Asie. La responsable de l’Alliance Française (AF) de Bangkok m’a alors informé que le poste de directeur de l’AF de Singapour allait se libérer. J’ai alors postulé et, à mon grand bonheur, j’ai été choisi.
Comment avez-vous trouvé Singapour ?
Singapour est un pays qui fait rêver et cela a joué dans mon souhait de venir y travailler. Mais le début a été rude. Je suis arrivé en pleine période de Covid et j’ai passé mes 14 premiers jours cloitré dans une chambre d’hôtel, comme c’était la règle à l’époque.
Mais depuis je n’ai pas été déçu. J’ai retrouvé ici le climat tropical, chaud et humide, que j’adore, au grand dam de mes collègues qui préfèreraient un air conditionné plus intense. J’ai aussi retrouvé la gentillesse asiatique. Singapour offre une qualité de vie remarquable, des transports fiables, et une vie sociale et culturelle dense. Malgré la taille de la cité-état, on y trouve un aspect « village », où les rencontres sont aisées.
Qu’est-ce que l’Alliance Française de Singapour ?
L’AF de Singapour est une vieille dame de près de 75 ans. C’est loin d’être la plus ancienne de la région, car celle de Bangkok affiche 112 ans ! Comme les 830 AF dans 135 pays à travers le monde, l’AF de Singapour est une association locale à but non lucratif.
La première mission de l’AF est bien sûr l’enseignement du français. Nous avons chaque année environ 3600 étudiants, moitié enfants, moitié adultes, de tous niveaux, qui apprennent le français dans nos 25 salles de classe. Il n’y a pas seulement des élèves locaux et étrangers, mais aussi 300 élèves français qui ne parlent pas forcément notre langue à la maison ou qui suivent les cours en anglais dans des établissements locaux ou internationaux. Nous avons aussi lancé des cours de mandarin pour renforcer le lien avec la culture locale.
Mais au-delà de l’enseignement, l’AF fait bien d’autres choses pour promouvoir la culture française : cinéma et spectacles divers dans notre théâtre, expositions dans notre galerie, dégustation de vin et de produits français, … Nous avons la plus grande médiathèque française de la région en nombre de prêts. Les visiteurs peuvent aussi se régaler de produits du terroir au café So France.
Enfin, n’oublions pas que nous fournissons un service de traduction en français de documents officiels par des traducteurs assermentés.
Quelle sont vos ambitions pour l’AF de Singapour ?
Durant la pandémie, nous avons pris la décision de ne jamais arrêter les activités culturelles et de continuer l’enseignement en présentiel dans le respect des règles alors en vigueur. Cela nous a servi, car lorsque les contraintes se sont relâchées, nous avons pu rebondir avec une affluence encore supérieure à celle d’avant Covid.
Dans le domaine de l’enseignement, la concurrence est rude, mais nous avons des avantages que nous cherchons à valoriser : tous nos professeurs (25 aujourd’hui) sont diplômés et certifiés, nous sommes le seul centre d’examen à Singapour pour les tests et diplômes officiels de langue française, et le « French Hub » avec sa médiathèque, son café, ses expositions et ses spectacles, permet de s’immerger dans un milieu français.
Je souhaite aussi faire connaitre l’excellence de la culture française dans tous les domaines, mais en relation avec Singapour, notre pays d’accueil. En matière d’exposition, Singapour regorge maintenant de galeries d’art, et, pour nous démarquer, nous devons non seulement nous focaliser sur la culture française, mais faire en sorte que le visiteur reparte en ayant appris quelque chose. Par exemple, l’exposition actuelle, « La Veste » promeut la mode française et explique l’évolution de ce vêtement à travers les âges. Mais les modèles que nous montrons ont été prêtés par un collectionneur singapourien, David Tan, et le curateur de l’exposition, Leonard Augustine Choo, est aussi singapourien. Il faut savoir que nous montons ces expositions avec des moyens limités, une petite équipe, et que cela demande de six à huit mois de préparation.
Par ailleurs, cette exposition se situe dans le cadre d’un programme consacré à la couture avec des films et des ateliers animés par le curateur de l’exposition, qui a été le responsable des costumes au New-York City Ballet et est désormais au Singapore Fashion Council.
Nous constatons avec plaisir que les expositions que nous montons ont une seconde vie dans d’autres pays. Celle sur Notre-Dame sera bientôt à Hong Kong, et celle sur Le Corbusier en est à sa 25ème édition dans le monde entier !
Nous vous donnons déjà rendez-vous en mai prochain pour notre exposition commémorant le 80ème anniversaire de la disparition de Saint Exupéry, où nous retracerons sa vie extraordinaire et présenterons une collection unique de dessins et écrits originaux ainsi que des objets lui ayant appartenu.