Depuis sa création en 2010, Singapour Nanas est bien plus qu’un groupe Facebook francophone pour expatriées : « c’est un espace où des nanas qui n’ont que Singapour en commun deviennent comme des sœurs ». Olivia Dissescou, une de ses fondatrices, revient sur l’évolution de cette communauté qui a su grandir en gardant son esprit solidaire.


À l’origine, la communauté des expatriées francophones échangeait sur un groupe Yahoo baptisé Singapour Mamans, créé par Sophie Terrier : « On était plusieurs centaines à s'échanger frénétiquement des emails sur pleins de sujets différents », rapportait Olivia Dissescou dans une interview sur Lepetitjournal.com en 2017. Avec le temps, le format a montré ses limites : « J'ai voulu le transférer sur Facebook qui est une plateforme bien plus adaptée à mon sens, et puis je trouvais l'angle « mamans » trop réducteur », confiait-elle à l’époque. Le groupe migre alors progressivement sur Facebook et devient, avec l’accord de ses membres, Singapour Nanas. Depuis, cette initiative a pris une ampleur inattendue.
COMMUNAUTE – Dans les coulisses de Singapour nanas
Vous aviez déjà évoqué Singapour Nanas dans une interview sur Lepetitjournal.com il y a quelques années. Qu’est-ce qui a changé ?
Contrairement à beaucoup d’autres groupes d’entraide entre expats, Singapour Nanas n’a aucune ambition de monétisation et n’en aura jamais. Le groupe est resté fidèle à ses valeurs premières : entraide, partage, bienveillance et humour. Mais le groupe a beaucoup grandi, passant de quelques centaines de membres à plus de 10.000 aujourd’hui. Plusieurs autres groupes sont nés, dédiés à des thématiques précises comme le babysitting, la cuisine, les chats, les petites annonces avec Le Bon Coin de Singapour Nanas et de Singafrog, ou même un groupe niche pour les mères dont les enfants font leur service militaire à Singapour. Ces groupes ont été créés par des membres de Singapour Nanas et permettent à la communauté francophone de se retrouver plus facilement autour de centres d’intérêts communs.

Avec plus de 10.000 membres sur le groupe, est-ce que les liens se créent encore aujourd’hui ?
Aujourd’hui le groupe permet toujours de créer des liens et il est accompagné par d’autres initiatives et communautés qui se créent et organisent des rencontres très régulièrement. Par exemple, Anne-Céline Vincendon a lancé un groupe WhatsApp qui s’appelle Les Fabulous et elle organise chaque semaine des événements gratuits pour les femmes à Singapour.
Une autre dimension s’est développée avec le temps, celle du soutien aux entrepreneures francophones. Nous encourageons les membres à promouvoir leur business deux fois par semaine, avec les Marketing Mondays et Marketing Fridays. Nous avons remarqué à quel point les réseaux sociaux sont devenus des outils puissants de visibilité. D'ailleurs, il y a eu une époque où certaines tentaient de se promouvoir discrètement via de faux comptes ce qui allaient clairement à l’encontre des valeurs du groupe. Nous avons donc clarifié le sujet en proposant que les membres qui le souhaitent fassent fièrement et ouvertement la promotion de leurs activités. Cela fonctionne globalement bien, mais il reste encore quelques publications suspicieuses et aussi, malheureusement, des femmes qui n’utilisent le groupe que pour ça alors que l’objectif principal est avant tout l’entraide.
Sur Singapour Nanas, les membres savent qu’elles peuvent partager leurs galères sans craindre les sarcasmes ou les attaques.
Pourquoi ce groupe rencontre t-il autant de succès à Singapour ?
Singapour Nanas est un groupe d’entraide pour les femmes francophones vivant à Singapour. Les sujets portent principalement sur les aspects pratiques du quotidien, mais il aborde aussi parfois des questions plus profondes liées à l’expatriation et même au-delà.
La force de Singapour Nanas réside dans ses valeurs de bienveillance, de non jugement et aussi dans sa modération. Contrairement à d’autres groupes Facebook d’expats, Singapour Nanas exclut toute forme de provocation gratuite, de polémique stérile, de moqueries ou encore de jugements violents. Gaëlle Berclaz Leresche, qui est là depuis le début, a notamment toujours pris un soin précieux à maintenir cette ligne éditoriale. Ceci dit, Singapour Nanas n’est pas non plus Singapour Neuneus, le débat et la polémique existent bel et bien sur le groupe mais le manque de respect n’a pas sa place. Sur Singapour Nanas, les membres savent qu’elles peuvent poser leurs questions, parler de leurs doutes ou partager leurs galères sans craindre les sarcasmes ou les attaques.
Singapour Nanas est bien plus qu’un groupe d’entraide pratique : c’est un espace où des nanas qui n’ont rien d'autre en commun que Singapour deviennent des sœurs, et je trouve cela magique.
Quel souvenir vous marque particulièrement depuis la création du groupe ?
Il y en a beaucoup, mais un moment gravé dans toutes les mémoires reste le post du « pavé dans la mare », où une membre confiait les infidélités de son mari. En une nuit, plus de 600 commentaires ont afflué, avec des messages de témoignages, de soutien, de partages d’expériences similaires etc. Ce fut une démonstration incroyable de solidarité féminine et d’empathie. Ce genre d’échange montre à quel point Singapour Nanas est bien plus qu’un groupe d’entraide pratique : c’est un espace où des nanas qui n’ont rien d'autre en commun que Singapour deviennent des sœurs, et je trouve cela magique.

Quel est l’avenir de Singapour Nanas selon vous ?
Le défi principal est de continuer à préserver une ambiance bienveillante pour que des femmes de culture, générations et milieux différents continuent de se parler et de s’entraider.
Le groupe permet aux membres de sortir de leur cercle habituel et de ne pas rester enfermés dans une sorte d’entre-soi si confortable et si courant à Singapour. Les étudiantes peuvent poser des questions aux jeunes professionnelles ou aux « vieilles mères », les expats peuvent comprendre la réalités des contrats locaux, les nouvelles arrivantes peuvent bénéficier des conseils de celles qui sont là depuis dix ans, et surtout, chacune peut apprendre à voir le monde avec les yeux d’une autre.
Et l’avenir du groupe repose aussi sur le soutien, le temps et le travail d’administration et de modération de Gaëlle Berclaz Leresche, Sandra Gavard, Sylvie Tang et Alexia Alllonsius-Desmarchelier, sans qui Singapour Nanas ne serait pas ce que le groupe représente aujourd’hui. Une mention spéciale à Émilie Borrel Annarella qui a aussi beaucoup apporté au groupe avant son accident.
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