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Arnaud Pierre - Fondateur de « Stage Heroes » à Singapour

Arnaud Pierre improvisation theatre singapourArnaud Pierre improvisation theatre singapour
Écrit par Sabrina Zuber
Publié le 23 mars 2020, mis à jour le 12 novembre 2021

Après des études de commerce à l’ESSEC, un poste en entreprise, Arnaud Pierre ne se sent pas dans son élément. Déçu par ses études, peu épanoui dans sa profession, il décide de prendre un virage à 180 degrés. Lepetitjournal.com l’a rencontré pour comprendre le chemin de sa reconversion.

 

Racontez-nous votre parcours.

Arnaud Pierre : J’ai démarré le théâtre à 12 ans, dans un club à Avignon où j’ai grandi, avec un professeur - acteur professionnel. Comme je me débrouillais bien à l’école, mes parents avaient imaginé un parcours plus classique, qui m’a amené en école de commerce sans avoir assez de caractère pour leur dire que je ne me retrouvais pas trop dans ce parcours. A mes yeux, les gens qui faisaient du théâtre professionnellement venaient d’une autre planète !

En réalité j’ai été assez déçu par l’école de commerce et son environnement. J’ai recommencé à faire du théâtre et de l’improvisation théâtrale à l’ESSEC. L’année suivante je suis devenu le président de la troupe, je répétais deux fois par semaine. Je lisais beaucoup et jouais chaque mois sur scène. C’était ma seconde famille.

Après les études je suis rentré dans le monde corporate, qui fut hélas, une deuxième vague de déception. Le marché était difficile en France (entre 2011 et 2012) et j’ai dû agrandir mon horizon géographique, ce que j’ai pu faire grâce à un VIE à Singapour. Ici j’ai développé une succursale de support IT, l’aspect entrepreneur me correspondait bien et cela me laissait aussi du temps à dédier à mes passions. J’avais clairement en tête l’idée qu’avant 30 ans, j’allais créer mon entreprise.

A Singapour j’ai rencontré Sophie Bendel (la fondatrice de The Theatre Factory) qui m’a permis d’enseigner l’impro à des adultes et de monter régulièrement sur scène.

Lors d’une soirée stand-up et impro, il y a 5 ans, j’ai été repéré par Kamil Haque, directeur d’une école de théâtre locale, qui m’a proposé de donner des cours d’impro dans son école.

Depuis, j’ai créé ma propre structure « Stage Heroes » dont je suis vraiment très content.

 

Arnaud Pierre improvisation theatre singapour

 

Votre projet de devenir entrepreneur avant l’âge de 30 ans s’est donc réalisé !

C’est terrifiant au début ! On est français dans un milieu anglophone qui est plutôt complexe, on perd du poids à cause du stress, on ne sait pas trop comment faire…

J’ai ouvert une chaine YouTube car je voulais apprendre le montage, écrire mes textes, m’entrainer à jouer, faire une sorte de thèse sur l’improvisation théâtrale. Puis en 2017 mon camarade d’impro Graham Ford a décidé de partir en Australie à la recherche des nouvelles inspirations. De mon côté, je ressentais aussi le besoin d’aller plus en profondeur. J’ai donc décidé de partir à Chicago, le berceau du théâtre d’improvisation.

L’expérience de 3 mois à Chicago a complètement retourné ma vision de l’impro et a provoqué une forte remise en question. Quand je suis retourné en France, je suis reparti dans le secteur corporate et j’ai fait du théâtre dans mon temps libre. J’ai enseigné un peu mais je suis resté hésitant, jusqu’à ce que je décide de revenir à Singapour début 2019, pour des raisons familiales.

Le retour ici m’a motivé à restructurer mon activité théâtrale, à coudre ensemble tous les morceaux des expériences vécues. 2019 devient une année folle pour moi. Grâce à l’aide de Nathalie Ribette (fondatrice de Sing’Theatre) j’ai obtenu un rôle dans la programmation du Bicentennial Experience à Fort Canning où j’ai joué quasiment 4000 représentations d’un spectacle d’escrime de théâtre.

Aujourd'hui je reprends les cours chez Kamil Haque, j’en ouvre encore deux, j’en offre aussi à la communauté française, j’ai des gigs et des tournages. La décision d’ouvrir un espace physique pour cette activité est arrivée d’une façon naturelle. C’est ainsi que EFTS (École Française de Théâtre à Singapour, à Race Course Road, détachée donc de Stage Heroes, qui reste une entreprise de production) est née et accueille déjà des élèves depuis janvier. Actuellement on est en répétition pour un spectacle que je prépare pour fin mai/début juin, “Un petit jeu sans conséquence” suivi par “Un ennemi du peuple”. Nous comptons répéter l’expérience du café-théâtre, que nous avons présenté en février dernier.

 

Arnaud Pierre improvisation theatre singapour

 

Quelle est la spécificité du Café-Théâtre et le critère de choix de son répertoire ?

Il s’agit souvent d’un medley de scènes du répertoire théâtral, parfois assez courtes et très proches du public. Le cadre est assez intime, chaleureux, sans artifice.

On choisit un auteur qu’on aime, ou bien on trouve un thème qui nous interpelle. Je souhaite aussi donner la possibilité à tous les élèves de monter sur scène. En général on cherche des morceaux pas trop longs et bien variés dans le style. 

 

Quel est le profil de vos élèves ?

Il s’agit essentiellement d’amateurs, beaucoup de curieux du théâtre, certains sont débutants, d’autres ont plusieurs d’années d’expérience. J’ai aussi de projets de collaboration avec des professionnels. Par exemple, le projet Theatre Kitchen, un voyage à travers le théâtre dans son ensemble situé dans une cuisine où on peut commander du Tchekhov comme du Shakespeare, de la même manière qu’on commande des plats sur un menu. La pièce est donc entièrement pensée autour du public du soir et c’est justement ça la force du théâtre de l’improvisation. Du théâtre à la carte.

 

Quel est votre regard sur la scène artistique singapourienne ?

Il y a plein de très belles choses, il faut aller les chercher car ça manque parfois un peu de communication dans ce sens. Il y a des compagnies très actives et de haute qualité, il y a aussi des troupes créatives qui prennent des risques, qui sortent d’une programmation “main stream” et explorent des spectacles plus conceptuels.

De plus, il y a un mouvement très clair de libération de la parole et d’exploration de sujets qui autrefois étaient interdits ou censurés. La ville bouillonne actuellement.

 

Arnaud Pierre improvisation theatre singapour

 

Votre prochain projet ?

Le plus proche c’est “Un petit jeu sans conséquences”, qui sera joue à la fin mai/début juin au théâtre de l’Alliance Française, l’histoire d’un couple et de sa “séparation apparente”. Évidement il s’agit d’une comédie, j’aime bien présenter des pièces légères et les alterner avec des pièces plus dramatiques.

 

Dernière question : est-ce que vous avez un rêve dans votre tiroir secret ?

J’en ai plein ! En particulier :  j’aimerais faire une tournée en Asie en van, avec un groupe d’amis afin de présenter du théâtre itinérant.

J’aimerais aussi jouer un jour au Festival d’Avignon ; tourner un long métrage ; écrire et jouer une nouvelle pièce.

Celui que j’ai le plus à cœur c’est de réussir à créer une scène qui puisse vivre sans moi : je resterais dans le background à encadrer et permettrais aux jeunes créateurs de développer leur projet.

 

Si vous n’étiez pas un acteur, vous seriez… ?

Je serais soit pianiste soit vidéaste, ou bien je travaillerais dans les effets spéciaux. Je peux passer 30 heures à m’acharner sur 2 secondes de montage que personne ne va remarquer. Je suis une petite fourmi, un artisan. D’ailleurs, j’aurais bien aimé être forgeron aussi !

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