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ESCAPADE GOURMANDE: EXPLOSION FESTIVE sous le signe du feu et de la créativité débridée

ESCAPADE GOURMANDE: EXPLOSION FESTIVE sous le signe du feu et de la créativité débridéeESCAPADE GOURMANDE: EXPLOSION FESTIVE sous le signe du feu et de la créativité débridée
Écrit par Michèle Thorel
Publié le 16 mars 2017, mis à jour le 18 juin 2018

Découverte du Modern Shudo, ou approche nouvelle de dégustation de sake avec des tapas haut de gamme catalanes dans un restaurant qui décoiffe par sa créativité, hymne au barbecue à la singapourienne et honneur au roi du ramen japonais.

BAM!... Explosion, énergie, enthousiasme?Beaucoup d'énergie festive dans le nom de ce restaurant au concept unique: TAPAS ET SAKÉ! Bam!...Ne cherchez pas des initiales: c'est simplement l'expression de la joie de vivre du chef-propriétaire catalan: Pépé Moncayo.

Décor sobre, moderne, bois sombre et murs blancs; sobriété neutre, élégante, intemporelle. Un comptoir long ouvert sur la cuisine tout en longueur où tout se fait devant nous et une belle salle aux tables espacées, parallèle au comptoir; l'extension est toute récente.

Le chef Pépé, de son vrai prénom José, aime évoluer dans sa cuisine: son contentement se lit dans son sourire et sa décontraction nonchalente. Chef de Santi à Barcelone (3* Michelin), puis à Singapour, il a le savoir-faire et la culture des grands étoilés, la bonhomie et la chaleur humaine en plus.

Quelle est la genèse de cette union entre une cuisine catalane du terroir, honnête, franche, sans fioriture, plutôt riche et le subtil vin de riz japonais ? Une rencontre fortuite avec un vendeur de saké haut de gamme à Paris, proposant une alternative au vin traditionnel: introduction au Modern Shudo ou nouvelle approche de dégustation du sake. L'idée séduit Pépé; il voyage longuement au Japon et devient amateur. Il développe le concept dans son restaurant à Singapour: Bam! On révolutionne les traditions; Bam! On décloisonne les habitudes!

La boisson de prédilection est donc ici le sake (plus de 100 à la carte, association avec la distillerie Inaba, haut de gamme exclusif; someliers experts en sake), même si la liste des vins est intéressante et plutôt haut de gamme.

Originale, unique, souvent avant-gardiste dans les associations de textures et de parfums, la cuisine de Bam! est? suprenante. On a du mal à la définir véritablement. Des tapas classiques espagnoles, il ne reste vraiment que le nom. Dans l'assiette, c'est beau, fin, délicat, la mise en place est sophistiquée, privilégiant l'harmonie des couleurs, textures et parfums.  Au palais, on retrouve souvent le goût puissant des sauces asiatiques mais l'ensemble reste rond en bouche et équilibré.

Totalement iconoclaste et d'influence japonaise, la cuisine de Pépé surprend toujours, enchante souvent et ? déstabilise parfois.

Lorsque la créativité est la marque de fabrique, il est bon de se laisser charmer par le menu Omakase du Chef: 8 plats ?surprise? ($128-188, en fonction des ingrédients du moment, de l'inspiration?; association sake -sake pairing- $90). Toutefois, la carte et les menus plus simples (3 plats: $48; 5 plats: $88) sont tout aussi intrigants.

Entrons dans la danse? Plat signature numéro un (le seul que le chef n'est pas autorisé à modifier par ses clients réguliers!), vaut son pesant de? plaisir: Cold capellini avec sakura ebi (minuscules crevettes japonaises dorées à la poêle), oeufs d'oursin, citron confit, le tout aromatisé d'huile de noisette ($42 à la carte). Le citron confit exalte les saveurs iodées et l'huile de noisette adoucit en l'équilibrant, l'acidité du citron. Un régal. Révolte légitime en cas de rationnement?

Les Purple Artichokes, coeurs d'artichauts violets, décorent une assiette qui ressemble à une estampe japonaise. Ils sont agrémentés de kaki (persimon), noix de Pécan, petites fleurs du maquis? corse!, le tout enrichi avec une pointe d'huile de noix (du Dauphiné!), c'est une entrée superbement légère et subtilement parfumée ($24).

Après les entrées et avant les plats principaux, Bam! Propose des ?Mid-courses?? Extension sophistiquée (heu? encore plus, si c'est possible) des entrées. Le Foie Gras and Chestnut (marron) Ravioli, accompagné de radis noir, champignon Enoki, dans un bouillon sublime  parfumé au foie gras ($28) est une révélation pour amateurs de ? foie gras. L'Abalone (crustacé précieux et très cher considéré comme une rare délicatesse par les chinois, notamment pour leur Nouvel An) avec noodles de peau de porc!! Mais oui! Pur collagène et zéro graisse: le chef façonne la peau de porc grillé en forme de fines noodles ? Le tout serait finalement presque banal sans sake, quelques éclats de piment, kombu ou petite feuille dite d'algue (végétal au goût surprenant d'algue!). Le chef montre ici une respectueuse allégeance à la culture locale tout en apportant une touche d'originalité unique ($36).

Le choix des plats principaux est vaste. Leur définition donne le tournis?

Japanese white and red strawberries with basil and sake
On citera quelques saillies créatives et succulentes:

Tuna (thon), émincé d'oranges sanguines, effilochade d'endives et de Mojama (thon séché espagnol), goutelettes d'huile d'olive extra vierge et safran ($44); on prend ici exclusivement la nuque du thon (japonais): la viande est infiniment plus douce et moëlleuse. Une alliance de textures et de goûts inimitable.

Le clou de la carte est sans doute le Carabinero Prawns (crevettes) et riz au gigembre en saumure, réduction d'ail noir et blanc, citronnelle et zeste de kalamansi, et champignon rare Oshimeji ($68); impression indescriptible tellement c'est? inhabituel, mais souvenir gustatif d'une explosion (Bam!...) d'odeurs, de saveurs et de textures ($68).

On se doit de mentionner la Quail (caille française) et foie gras, pomme verte et jus de rôti?de veau! ($66), pour la finesse de l'execution ($66), ainsi que Duck Gyoza (rillette de canard) en dumpling poêlé et carottes diverses, mousse de yuzu et éclats de fèves de cacao: moëlleuse richesse du canard, douceur des carottes et amertume du cacao pour équilibrer: un dumpling royal ($25).

La carte des desserts est réduite et moins ?hallucinante?. On citera Le Citrus & Pineapple qui clôt avec finesse et légèreté le carnaval des saveurs: parfait à l'orange, sorbet mandarine, crème de safran en meringue, ananas confit et en sorbet ($16).

Paradis pour palais curieux et intrépides et pour esthètes de la présentation; défi pour gourmets classiques. Un concept unique et une créativité culinaire avant-gardiste, osée, servie par une équipe chaleureuse, dynamique et enthousiaste. C'est? Bam! 

BAM!- 38, Tras St ? T: 6226 0500 - Mrt Tanjong Pagar

 

TSUTA: Star du Ramen Japonais, étoilé à Tokyo, arrive au Royal Plaza sur Scotts Road.

Tsuta
Ramen: nom communément utilisé en Asie pour désigner un plat de noodles dans un bouillon. Au Japon, on appelle cela Soba.

Décor simple, épuré, service rapide, carte réduite à sa portion congrue, Tsuta propose 8 déclinaisons de soba (base bouillon et noodles identique) et un unique thé que l'on commande et paye sur un écran, en entrant: Nets, cartes de débit et crédit. Business modèle génial de simplicité et d'efficacité, mais tout sauf poétique!

Cependant, le succès de Tsuta à Sugamo, banlieue de Tokyo, fut immédiat, dès son ouverture en 2012. Minuscule comptoir entouré de 9 places, couronné par une étoile Michelin en 2015, le premier et unique dans sa catégorie: restaurant de ramen. La queue commence tous les jours à 6h du matin pour avoir une chance d'obtenir son Tsuta ramen à l'ouverture à 10h30. Le secret, nous explique-t-on, se trouve dans la recette unique du bouillon ou dashi en japonais, du jeune chef Yuki Onishi, utilisant trois types de sauces soja ou shoyu, exclusivement développées et produites pour lui, de l'huile de truffe noire qui donne un caractère riche et particulier, et un mélange savant et secret de légumes, volaille et coquillages, sans MSG, évidemment: les parfums de ce dashi sont puissants, diversifiés, harmonieux et subtils.

Les noodles sont faites maison au quotidien (on peut aller admirer la fabrication de 8 à 10h chaque matin), à partir de quatre céréales complètes.

Tsuta Singapour est une réplique fidèle de Tsuta Tokyo, avec 16 places assises au comptoir.

Tsuta ramen
Que trouve-t-on dans son bol?

Tronc commun: Bouillon, noodles, huile de truffe, effilochade de poireaux crus et tranches de char siu, rôti d'épaule de porc maigre (zéro gras; viande excellente).

Options: 1 ou 4 tranches de rôti, avec ou sans oeuf ajimoti (poché dans du vinaigre), avec purée de truffe noire ou d'olives vertes. De $15 à $21 selon les options.

Boisson unique: thé de céréales, léger malgré sa couleur sombre, aux parfums de foin fraichement coupé.

Point de révélation gastronomique majeure ici, mais c est parfait pour une pause repas express saine et goûteuse.

Tsuta ? Royal Plaza on Scotts- 2 Scotts Rd- T: 6734 4886 - Mrt: Orchard.

 

FAT LULU'S restO/bar: grill asiatique et bar à desserts. Deux chefs que tout sépare mais qui se complètent parfaitement. Devises du grill: ?plus c'est grillé/coloré (foncé!), plus c'est goûteux? (#no burn, no taste#) et ?vive les épices!? (#spice is nice#).

Fat Lulus_Duh Meat Board_credit John Heng
Devise du bar à desserts: beau, frais, intense, #Happy Ending#!

Un café-restaurant sans prétention, jeune et branché, au décor brut et simple style industriel: manifestement les singapouriens, jeunes cadres dynamiques, adorent: c'est plein à craquer presque tous les jours, à partir de 19h! Le menu annonce franco le style de la cuisine: grillé, grillé, et? très grillé. Si ce n'est pas un peu noir, le très jeune chef Sam, au débit aussi enjoué que dynamique, est prêt à se flageller!  On dit que c'est un ?bbq? ou grill asiatique parce qu'on utilise des herbes et épices locales. Sinon, c'est un grill, quoi! Mais quel grill! 

La carte est courte: 6 plats de légumes, 4 poissons et 5 viandes, mais ne manque ni de caractère, ni de saveurs franches et fortes.

Epis de maïs,  asperge verte grillés ou burnt corn($11), juteux, croquant. Rien d'extraordinaire, simplement juste.

L'originalité arrive avec les plats de poissons et de viande.

On recommande particulièrement le Ikan Bakar ($28), poisson perroquet, curcuma, ail, beurre au piment, ulam raja, sorte d'estragon malaisien/indonésien et petite salade de concombre. Chair blanche, ferme, saisie à point au grill. On a un faible pour le Grilled Giant Crab Leg($28), provenant de Norvège, servie avec une salade aux herbes thai, bien relevée.

On sent que la fierté du chef est dans les viandes, reines du barbecue par définition! Prendre le Duh Meat Board ($28): sur une planche, trio de steak de boeuf en lamelles, filet de porc et canard de malaisie, pour la variété; se laisser tenter par la signature maison, où deux continents se joignent: Spicy BBQ Pork Ribs (25), portion très généreuse de 8 côtelettes marinées puis caramélisées dans une sauce ketchup chipotle mexicaine (!!) bien relevée mais sans excès. Pas de gras, beaucoup de viande tendre et fondante comme du velours.

Fat Lulus_Childhood_credit John Heng
Les desserts de chef Song sont à son image: joyeux, doux, recherchés, frais.

Une interprétation amusante et réussie de la Tarte tatin ($14) avec glace à la vanille? ?brulée?, bien sûr! Un duo de cheesecakes multicolores aux parfums pas toujours reconnaissables, mais à la texture ferme et légère ($16), ou l'étonnante assiette Berries and white chocolate ($16), glace au chocolat blanc, granité et mousse de cassis et fraises infusées dans un sirop de sureau. Le dessert du jour est un spécial glaces maison: kachang (plante indonésienne), noix de coco,  granité d'ananas, gelée de pandan (couleur vert pomme? saisissante!) et mousse de coco ($14). Un tantinet sucré en général, mais que de créativité pour faire honneur aux produits locaux. Bravo!

Il existe même un menu dégustation de trois desserts à $35.

Un franc coup de chapeau pour utiliser avec autant d'imagination et d'adresse les végétaux locaux. Si l'on aime le goût inimitable de la cuisson au barbecue et si l'on veut rencontrer les singapouriens dans une ambiance décontractée et conviviale, c'est le restaurant de choix.

Fat Lulu's- 297 River Valley Rd ? S 238338 ? T: 9236 5002- Mrt Dhoby Ghaut

 

Michèle Thorel, www.lepetitjournal.com/singapour, vendredi 17 mars 2017

 

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