Wen Jiabao montre un visage jusqu'alors inconnu, dans les colonnes du Quotidien du Peuple. Et rend hommage à Hu Yaobang, partisan des réformes sociales et économiques de la fin des années 80 qui menèrent en Chine, aux événements de 1989?
Wen Jiabao (Image libre de droit common.wikimedia.org)
Le 3 avril, le premier ministre Wen Jiabao inspectait Xingyi (Guizhou) sous la sécheresse. Le 15, en souvenir d'une visite en cette ville, en 1986 avec Hu Yaobang son maître à penser d'alors, il publie au Quotidien du Peuple une discrète mais émouvante apologie de ce théoricien de la politique d'ouverture dont la mort, 21 ans plus tôt jour pour jour, avait déclenché le Printemps de Pékin et failli faire chuter le régime. Depuis lors, un Parti communiste profondément conservateur maintenait sur lui l'anathème. C'est donc une première réhabilitation et une grande surprise. Pourquoi cette rupture du silence ?
Wen Jiabao est une personnalité complexe, au passé résolument réformiste, ex-aide de camp de Hu Yaobang et de Zhao Ziyang, les deux hommes de Deng Xiaoping. C'est aussi un homme fidèle dans ses allégeances, n'ayant jamais renié ses patrons une fois en disgrâce, même après leur décès. Ce qui ne l'a empêché, vrai survivant et génie politique, d'atteindre la plus haute carrière, dans un régime aux idées opposées à celles de ses débuts.
Cet éloge de Hu Yaobang serait-il téléguidé, signifiant un retour de l'aile réformatrice? Une telle lecture serait hasardeuse, gratuite - une offensive de qui, et contre qui ? - Peut-être comme d'autres avant lui, veut-il s'épancher, libérer sa conscience, n'ayant plus rien à perdre. Mais surtout, Wen Jiabao a le moyen de payer tribut à un maître : il l'utilise, en personnage romantique et solitaire !
Eric MEYER, Extrait du Vent de la Chine N°15 (www.lepetitjournal.com - Shanghai) Mardi 20 avril 2010