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Le Chili, au pays des chiens et des animaux de compagnie

un homme souriant prend dans ses bras un petit chiot un homme souriant prend dans ses bras un petit chiot
Yogendra Singh - Source : unsplash.com
Écrit par Édouard Maury
Publié le 4 août 2021, mis à jour le 4 août 2021

Trois personnes sur quatre déclarent avoir un animal de compagnie au Chili. Le chien étant l’animal domestique préféré des Chiliens. Mais il est aussi un problème, notamment à Santiago où face à la surpopulation de chiens errants les pouvoirs publics ont dû réagir.

Êtes-vous plutôt chien, ou plutôt chat ? Les Chiliens vous répondraient sans doute qu’ils préfèrent "los perritos" (les petits chiens NDLR). D’après une enquête de l’institut de sondage Cadem, 73 % d’entre eux déclarent posséder un animal de compagnie, et 4 fois sur 5 il s’agit d’un chien. En comparaison, les Français ne sont que 27 % à avoir un canidé et 26 % à posséder un chat. Pour la quasi totalité des Chiliens interrogés, la "mascota" (l’animal de compagnie NDLR) est un être totalement intégré à la famille. Toujours selon l’enquête de l’institut de sondage, 63 % des personnes déclarent dormir avec leur animal domestique, et 26 % adaptent même leur lieu de vacances en fonction de leur "mascota".

 

un petit garçon joue avec un gros chien
Eunice Vera - Source : Pixabay


"Mes chiens font partie de ma famille au même titre que mes parents ou mon frère", confesse Rocio, 21 ans, étudiante en école d’infirmière à Santiago. Elle considère son husky et son bichon maltais comme ses meilleurs amis : "Nous prenons soin les uns des autres : ils me protègent, et je les protège. J’ai une affection incommensurable pour eux et ils m’offrent généralement un soutien émotionnel impressionnant. À chaque fois qu’on me demande ce qu’ils représentent à mes yeux, je réponds qu’ils sont la chose la plus belle que j’ai dans la vie."

Environ 500 000 chiens errants - quiltros - dans la Région Métropolitaine

Claudia Schencke est psychologue chercheuse à l’Université Catholique du Chili. Elle a travaillé sur les effets socio émotionnels que procurent les animaux de compagnie sur les enfants. Dans ses travaux, elle explique que pour une personne ayant grandi avec un animal de compagnie, il est difficile par la suite de se détacher de sa présence. Selon elle, "les chiens offrent un soutien moral inconditionnel et ils contribuent à renforcer le sentiment de confiance et de sécurité." Par exemple, les enfants qui sont en contact avec ces compagnons de jeu, acquièrent davantage d’autonomie ce qui développe leur capacité à entreprendre des projets. De même, selon l’étude de Claudia Schencke, un animal de compagnie est relativement peu coûteux à entretenir et a des demandes simples et peu conflictuelles. Elle ajoute également que : "Le sentiment d’anxiété que l’on peut retrouver dans les rapports entre les humains, disparaît dans la relation homme/chien."

 

un chien errant marche dans la rue au chili
Richard Lehoux - Source : Flickr.com


Mais si les Chiliens entretiennent des relations privilégiées avec leurs animaux de compagnie, les chiens ne sont pas tous logés à la même enseigne. En témoignent les rues de la capital de Santiago qui abritent de nombreux chiens errants. L’Association américaine des médecins vétérinaires, a analysé qu'environ 41 % des animaux de compagnies proviennent de dons. Quand une chienne met bas, la portée est distribuée à droite et à gauche, et les petits qui restent sont abandonnés, faute de pouvoir les garder. D’après le service vétérinaire de l’université du Chili, la plus grande raison d’abandon des chiens (15 %), c’est l’arrivée d’une portée non désirée. Vient ensuite l’abandon par rapport au comportement dangereux de l’animal (13 %).

Ainsi, selon l’AFP, on recenserait 500 000 "quiltros" (nom donné au chien errant NDLR) dans la Région Métropolitaine. Pour les Chiliens, le "quiltro" – qui n’a pas de race particulière puisqu’il est le fruit de plusieurs croisements – est un symbole national, en général adoré par la population. Dans toutes les rues, de toutes les villes du pays, il est fréquent de voir une gamelle d’eau laissée sur le trottoir par les habitants du quartier. Aussi, pendant l’hiver, les "quiltros" revêtent des sortes de pulls, offerts par les passants. Toutefois, ces sympathiques bêtes poilues restent perçues comme un problème. Une enquête menée par le Centre de recherche pour le développement de l’Université Andrés Bello, démontre que 74 % des personnes interrogées considèrent ces chiens errants comme dangereux, notamment pour le risque de morsure et de transmission de maladie.

Un plan pour responsabiliser les propriétaites d'animaux domestiques

Afin de remédier à cette croissance incontrôlée de chiens errants, les pouvoirs publics ont mis en place des dispositifs ces dernières années. En 2014, un plan national de stérilisation a été lancé par le gouvernement de Michelle Bachelet. Il visait à stériliser 650 000 animaux à travers le pays. L’objectif étant de proposer aux propriétaires d’animaux une vaccination gratuite et sûre pour éviter l’abandon de chiots non désirés et ainsi stopper l’augmentation du nombre de chiens errants.

Cette politique de contrôle s’est poursuivie sous la présidence de Sebastián Piñera. En 2018, le parlement a approuvé la loi sur la propriété responsable des animaux de compagnie. Les Chiliens sont désormais systématiquement incités à inscrire leurs "mascotas" sur le Registre national des animaux de compagnie, à les pucer, et à les faire stériliser. Mais dans les faits, cette recommandation n’est pas suivie de tous et seulement 58 % des personnes interrogées dans l’enquête de la Cadem déclaraient avoir inscrit leur animal de compagnie sur le registre.

 

la vétérinaire Viviana Valenzuela est assise à son bureau
Docteure Viviana Valenzuela - Source : Collège Médical des Vétérinaires du Chili


Le gouvernement chilien a alors multiplié les actions. En septembre 2020, le projet "Cuidado con el pero 2.0" (Prendre soin du chien 2.0 NDLR) a été lancé dans la Région Métropolitaine de Santiago. Il s’agissait d’une campagne de stérilisation gratuite "d’une importance capitale" a expliqué la docteure Viviana Valenzuela, interrogée par lepetitjournal.com Santiago. Directrice de la commission nationale de possession responsable d’animaux de compagnie, Viviana Valenzuela est également membre du Collège Médical des Vétérinaires du Chili. Elle souligne que : "L'adoption de la loi sur la propriété responsable des animaux a eu un impact significatif au-delà du contrôle de population des animaux errants. Symboliquement, cette mesure a placé les citoyens comme acteurs de premier plan ayant le devoir de prendre soin de leurs animaux." Et de poursuivre : "Il y a maintenant une plus grande prise de conscience de l'importance de la stérilisation afin de réduire les portées non-désirées et les risques d’abandon. Et désormais, les animaleries sont obligées de stériliser les animaux avant de les mettre en vente. Cette loi c’est également un moyen de faire de la pédagogie pour éviter la maltraitance animale. Le Chili voit enfin un début de changement de paradigme sur la possession d’animaux de compagnie, mais ces questions doivent encore être renforcées par l'éducation dès le plus jeune âge."

 

affiche de campagne pour la stérélisation des animaux domestiques au chili


Pour Rocio, "ce fut un déchirement de faire stériliser [ses] chiens". Elle s’était rendue compte d’une chose : "Après la première portée de ma chienne husky, raconte-elle, nous avons compris, avec mes parents, combien il était difficile de faire adopter les chiots. C’est pour cela que nous avons décidé de la faire stériliser." Et de poursuivre : "C’était dur de supporter l’idée de stériliser mon amie, mais c’est un acte bien plus responsable que de devoir abandonner la portée par faute de place. Même si c’était à contre cœur, je pense que la stérilisation était la solution la plus raisonnable". À l’image de la jeune étudiante en soins infirmiers, la génération Z paraît plus consciente de la responsabilité qu’incombe un animal, et selon l’enquête de la Cadem, ils seraient 60 % à avoir inscrit leur animal au registre national, contre 53 % chez les baby-boomers.

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