Dans la Bay Area, loin des startups technologiques et des géants du numérique qui font la réputation de la région, une communauté francophone dynamique s'épanouit grâce à l'engagement d'un homme passionné. Pierre Hiller, arrivé en Californie en 2013 pour ce qui devait être un court séjour d'études, est aujourd'hui à la tête des "Gaulois", un groupe qui rassemble près de 2500 francophones et francophiles autour d'activités variées et conviviales.
De "Silicon French" aux "Gaulois" : la naissance d'une communauté
L'histoire commence par un sentiment que connaissent bien les expatriés : la solitude. "Je me suis senti un peu isolé à Santa Clara", explique Pierre Hiller. "Ce n'est pas évident de rencontrer du monde avec qui on connecte." En cherchant en ligne, il découvre un groupe appelé "Silicon French Speaking Group" qui organisait un événement mensuel.
Lorsque la fondatrice du groupe prend sa retraite, Pierre et une amie décident de reprendre le flambeau. "Elle utilisait le groupe pour attirer des clients pour son agence de tourisme. Quand elle a arrêté, on s'est regardés et on s'est dit : nous, on veut bien le reprendre."
Rebaptisé "Les Gaulois", le groupe évolue radicalement sous cette nouvelle direction. D'un unique dîner mensuel toujours au même restaurant, le collectif passe à deux ou trois événements hebdomadaires répartis dans toute la baie de San Francisco.
Une communauté diverse et ouverte à tous
La particularité des Gaulois réside dans son principe d'ouverture totale. Pas de "membership" ni de cotisation annuelle : tout le monde peut rejoindre le groupe, à la seule condition de parler français. Et pas besoin d'être bilingue ou de maîtriser parfaitement la langue de Molière. "C'est un groupe pour tous les niveaux," insiste Pierre. "Pas besoin d'être bilingue pour venir. Même si vous ne parlez pas bien français, parlez en français même avec des erreurs. Tout le monde est content."
On compte près de 50 nationalités différentes, avec seulement un tiers de Français
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, les Gaulois ne sont pas réservés aux Français. "C'est un groupe pour les francophones et francophiles," précise Pierre. "On compte près de 50 nationalités différentes, avec seulement un tiers de Français."
Cette diversité surprenante fait la richesse du groupe. "On a des Américains évidemment, des Belges, des pays de la francophonie... Mais après, on a aussi des gens de Thaïlande, du Vietnam, d'Australie. Certains ont appris le français au lycée ou à l'université, d'autres sont simplement tombés amoureux de la culture française."
La seule règle ? Parler français, même si ce n'est pas bien fait, même avec des erreurs
La seule règle ? "Parler français, même si ce n'est pas bien fait, même avec des erreurs. Tout le monde est bienvenu du moment qu'il essaie de parler français et qu'il soit amical et respectueux."
Des événements pour tous les goûts
Les activités proposées sont aussi diverses que les membres du groupe : "On fait des événements simples comme des sorties dans des bars ou des restaurants, mais aussi des événements plus sophistiqués comme des dégustations de vin, des concours de pâtisserie, des randonnées, du yoga dans le parc, des visites culturelles de musées ou des quartiers de San Francisco", détaille Pierre.
L'événement phare reste sans doute le "barbec annuel" qui rassemble entre 150 et 200 personnes
L'événement phare reste sans doute le "barbec annuel" qui rassemble entre 150 et 200 personnes dans un parc de Mountain View. "On passe la journée entière à cuisiner sur le barbecue, faire de la pétanque, des cocktails... Les enfants courent autour, c'est très sympa, on dirait vraiment le banquet des Gaulois !"
Autre fait marquant ou fun fact comme il se dit dans la région : le groupe a déjà vu naître cinq mariages entre membres qui se sont rencontrés lors des événements. Pierre a même officié comme célébrant pour certains d'entre eux.
Un engagement personnel considérable
Ça prend presque une heure par jour
Derrière cette machine bien huilée se cache un investissement personnel colossal. "Ça prend presque une heure par jour", confie Pierre, qui travaille par ailleurs dans l'informatique, la protection des données et la cybersécurité.
Pour les événements plus élaborés comme les visites de quartiers, la préparation est intensive : "Il faut faire la carte avec tous les points d'intérêt, documenter chaque lieu, faire ma recherche sur l'histoire, écrire des résumés..."
Face à cette charge croissante et pour préserver sa vie personnelle, notamment depuis qu'il est fiancé, Pierre a constitué une équipe d'une dizaine de volontaires qui l'aident à organiser les événements: Camille, Denise, Elisabeth, Guillaume, ISabelle, Olivier, Philip, Steven, Valerie, Laetitia. "Chacun fait un événement par mois pour moi. J'en ai une qui fait toujours du yoga, un autre de la pétanque, une autre organise des soirées dans des bars..."
Une association à but non lucratif
Ça ne change rien à la philosophie du groupe, ça ne change rien à la façon dont on organise les choses
En décembre 2024, les Gaulois ont franchi une étape importante en devenant officiellement une association à but non lucratif (501c3). "Ça ne change rien à la philosophie du groupe, ça ne change rien à la façon dont on organise les choses, c'est juste une structure plus organisée pour nous aider à grandir, à passer à l'échelle suivante", explique Pierre.
Cette nouvelle structure permettra au groupe de solliciter des donations volontaires pour couvrir les frais d'assurance et autres dépenses administratives.
Des projets d'avenir
Mon but, c'est vraiment de créer une communauté, un village où les gens se sentent accueillis entre amis, avec cette ambiance conviviale de fête de village à chaque fois qu'on se rencontre
Pierre Hiller voit grand pour l'avenir des Gaulois tout en restant fidèle à l'ADN du groupe. "Mon but, c'est vraiment de créer une communauté, un village où les gens se sentent accueillis entre amis, avec cette ambiance conviviale de fête de village à chaque fois qu'on se rencontre."
Parmi ses projets : organiser un festival du court-métrage francophone en louant une salle de cinéma, mettre en place des soirées dansantes sur le modèle des bals français, et continuer à développer "un tissu gaulois à travers la baie, avec une grosse poche à San Francisco, une poche à Menlo Park, une poche à Palo Alto..."
Pour ce créateur de lien social, la satisfaction vient des retours parfois discrets mais significatifs. "J'ai des gens qui m'ont dit : 'J'ai perdu mon job le mois dernier, tu te rends pas compte à quel point pouvoir venir ici était important.'"
Preuve que cette communauté francophone représente bien plus qu'un simple réseau social : c'est un véritable foyer loin de chez soi pour tous ces "Gaulois" expatriés dans la Silicon Valley.
Pour rejoindre le groupe, il suffit de s'inscrire sur Meetup. Vous y trouverez les évènemenst à venir et les photos des évènements passés.
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