En quittant Haïti pour le Canada, Claude Jr Émile a traversé des épreuves qui l’ont profondément marqué. De l’incertitude d’un exil à l’espoir d’une intégration réussie, son histoire est celle d’un parcours migrant complexe et inspirant.
Étudier à l’Université Laval, au Québec, m’a permis de découvrir une autre vision de l’enseignement
En 2022, après des années de crises politiques et de violence en Haïti, Claude Jr Émile se résout à quitter son pays natal. « Rester était devenu impossible, pour moi comme pour ma famille », explique-t-il, évoquant les pressions insoutenables auxquelles il était soumis. L’assassinat du président haïtien en 2021 a intensifié la situation chaotique, plongeant l’île dans une insécurité totale.
Un parcours académique entre Haïti et Québec
Claude Jr Émile a entamé ses études universitaires en Haïti, avant de les poursuivre au Canada dans le cadre d'un partenariat entre l’Université d’État d’Haïti et l’Université Laval à Québec. En 2015, il part pour le Canada afin de compléter une maîtrise en histoire, spécialisée dans le domaine de la mémoire et du patrimoine. « Étudier à l’Université Laval m’a permis de découvrir une autre vision de l’enseignement et d’approfondir mes connaissances dans un environnement académique stimulant », explique-t-il.
En plus de sa maîtrise en histoire, Claude est également titulaire d’un diplôme en sciences politiques et en relations internationales, obtenu en Haïti. Son parcours académique lui a donné des outils solides pour sa carrière et l’a préparé à contribuer activement, à la fois en tant qu’éducateur et membre de la communauté francophone. Ses études à Québec ont aussi nourri son attachement pour la culture et la langue françaises, qu'il promeut aujourd’hui dans son travail au Canada.
Quand l'exil devient la seule option
Après ses études, il retourne en Haïti pour enseigner et travailler au ministère du Commerce. Mais le rêve d’une carrière stable en Haïti s’éloigne alors que la situation politique se détériore. « J’avais un pied dans l'enseignement, un autre dans la fonction publique, mais le pays ne permettait plus de projeter un avenir serein », confie-t-il.
Racines haïtiennes et résilience d’un homme engagé
Le choix de l’Ontario pour une nouvelle vie
Contraint de partir, Claude opte pour le Canada, attiré par son caractère francophone et ses opportunités d'intégration. « Cette fois, je ne voulais pas seulement venir pour étudier ; je voulais offrir une continuité éducative à mes enfants, leur permettre de grandir dans un environnement stable », dit-il, en décrivant son installation en Ontario.
L'ancrage francophone à Ottawa
L’intégration au Canada n’a pas été qu’une affaire de formalités pour Claude et sa famille. À Ottawa, il découvre la Maison de la Francophonie, un espace où il se sent enfin chez lui. Ce lieu devient le point de ralliement de son engagement francophone. Rapidement, il y crée un projet littéraire, "La Parole aux livres”, destiné à promouvoir la culture francophone et le dialogue entre nouveaux arrivants. « La langue française est un lien précieux ; elle nous unit au-delà des frontières », souligne-t-il avec conviction.
La famille : un pilier dans l’exil et l’intégration
Si Claude Jr Émile a pu surmonter les difficultés de l'exil, c'est en grande partie grâce au soutien de sa famille. Marié depuis près de vingt ans, il est père de quatre enfants, auxquels il tient à offrir une éducation stable et une qualité de vie préservée, malgré les bouleversements liés à leur départ d’Haïti. « Cette fois, je ne voulais pas seulement venir pour étudier ; je voulais offrir une continuité éducative à mes enfants, leur permettre de grandir dans un environnement stable », explique-t'il.
L’adaptation de ses enfants au Canada est une priorité pour lui, et leur intégration réussie dans le milieu scolaire local est une source de fierté. Quant à son épouse, bien que confrontée à des défis de santé, elle incarne le courage et la résilience, valeurs qui soudent la famille face aux épreuves de la migration. Pour Claude, sa famille est un pilier essentiel qui l’accompagne dans son engagement francophone au sein de la communauté d’Ottawa et dans la construction d’un avenir serein dans leur terre d’accueil.
Les défis de l’intégration et la nostalgie du pays
Bien qu’il ait trouvé une forme de stabilité au Canada, Claude reste profondément attaché à Haïti. Il évoque avec nostalgie la ville natale de sa mère qui l’a accueilli à l'âge de 7 ans, Arcahaie, ville où est né le drapeau haitien bleu et rouge, aujourd’hui sous la coupe de gangs armés. Malgré la distance, il suit l’évolution de la crise haïtienne et rêve, un jour, de retourner contribuer au développement de son pays natal.
Regard vers l’avenir : une intégration complète est-elle possible ?
Aujourd’hui, Claude Jr Émile s’interroge : l’intégration en Ontario peut-elle être complète pour un immigrant aux racines aussi profondes ? La situation en Haïti lui permettra-t-elle un jour de retrouver sa terre natale ? En attendant, il continue son engagement à Ottawa, portant fièrement son identité haïtienne et francophone.
Peut-on vraiment quitter définitivement un pays qui nous a tant donné, malgré ses épreuves ? La francophonie, à la fois un pont et une ancre, saura-t-elle maintenir l’attachement à sa terre natale...