

La Birmanie et le Bangladesh ont accepté de s'attaquer aux "causes profondes" de l'exode des milliers de migrants de leurs côtes, lors des discussions entre les pays de la région qui ont eu lieu à Bangkok vendredi. Mais un certain nombre d'observateurs ont critiqué le fait que les Rohingyas, minorité au c?ur de la crise, n'ont même pas été mentionnés.
Les organisateurs thaïlandais ont décrit cette journée de discussion comme "très constructive", soulignant que les 17 pays réunis autour de la table ont accepté dans une déclaration de fournir une aide humanitaire à 2.500 migrants qui seraient toujours à la dérive en mer, ainsi que 3.500 autres qui ont déjà atteint les côtes thaïlandaises, malaisiennes et indonésiennes depuis le 1er mai.
La déclaration fait également état d'un engagement à agir sur les "causes profondes" et les "facteurs aux points d'origines (des migrants)", parmi lesquels l'amélioration de l'économie, des droits de l'homme, et de la sécurité dans les pays d'origine.
Néanmoins, le document ne mentionne pas les Rohingyas ? à qui la Birmanie refuse de reconnaitre comme minorité du pays et encore moins d'accorder la citoyenneté.
La Birmanie compte environ 1,3 millions de Rohingyas qu'elle appelle "Bengalis", terme générique pour désigner les étrangers en provenance du Bangladesh voisin.
La publication vendredi en Birmanie du premier recensement depuis trente ans n'inclut pas non plus les Rohingyas dans son décompte, les autorités ayant refusé de les répertorier s'ils se présentaient comme appartenant à ce groupe ethnique.
Le Bangladesh reconnait quelque 30.000 Rohingyas comme réfugiés, mais plusieurs milliers d'autres sont traités comme immigrés illégaux de Birmanie.
Le chef de la délégation Bangladaise, Shahidul Haque, s'est félicité du bilan de cette journée. "Nous avons eu une discussion très productive aujourd'hui," a-t-il dit.
Un pansement sur une plaie béante
Mais d'autres ne partageaient pas la même impression.
Charles Santiago, président du groupe des Parlementaires de l'ASEAN pour les droits de l'homme et député malaisien, a décrit la réunion comme "beaucoup de parlotte avec peu de réelle substance ni grande détermination à prendre quelque mesure du tout".
Son groupe a diffusé peu après la réunion un communiqué critiquant sévèrement le fait que les discussions n'ont jamais mentionné publiquement les persécutions des Rohingyas.
Pour Phil Robertson, de Human Right Watch, ce n'était rien de moins qu'un "simple pansement sur une plaie béante".
"Les Rohingyas ne sont même pas nommés dans la déclaration? comment pouvez-vous parler de personnes si vous ne les nommez pas ?"
Parmi les pays participant aux discussions, les trois pays directement affectés par la crise actuelle ? Thaïlande, Malaisie, Indonésie ? ont tous hésité pendant plusieurs jours avant de céder à la pression internationale pour offrir une assistance humanitaire aux migrants coincés en mer.
Les trois pays disent être à la recherche de tout nouveau bateau à la dérive dans leurs eaux territoriales.
Le Haut représentant du Bangladesh à New Delhi, Syed Muazzem Ali, a rappelé aux journalistes vendredi depuis la capitale indienne que les Rohingyas relevaient de la responsabilité du gouvernement birman et qu'il n'y avait pas de place pour eux au Bangladesh.
"C'est le gouvernement de Birmanie qui doit récupérer ces citoyens," a-t-il dit.
Le scandale des migrants d'Asie du Sud-est a reçu un gros coup de projecteur au début du mois de mai, après que la nouvelle politique de répression subitement menée par Bangkok sur le trafic humain a déstabilisé cette sombre mais très prolifique industrie.
Les passeurs rendus nerveux par cette réaction soudaine des autorités ont abandonné en mer des milliers de migrants, des Rohingyas, minorité musulmane vivant essentiellement en Birmanie qui fuient les persécutions et des Bangladais voulant échapper à la pauvreté.
Certains bateaux ont été refoulés dans un premier temps vers le large dans une sorte de jeu de "ping pong humain" dénoncé par les ONG. Puis, soumises aux pressions de la communauté internationale, l'Indonésie et la Malaisie, qui est bien souvent la destination finale des migrants, ont annoncé qu'elles chercheraient à localiser et secourir les bateaux de migrants auxquels elles fourniront un accueil temporaire.
L'ONU estime que plus de 2.000 personnes sont toujours en perdition en mer alors que la mousson approche. Plus de 3.500 boat people ont réussi à accoster en Indonésie, en Thaïlande et en Malaisie ces trois dernières semaines.
AFP (http://www.lepetitjournal.com/bangkok) lundi 1er juin 2015
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