Édition internationale

Un tiers des employés en Espagne ne sont pas satisfaits de leur salaire

Selon une étude d’InfoJobs, l'insatisfaction gronde dans les rangs des travailleurs espagnols. Avec des salaires jugés insuffisants et des perspectives de progression qui patinent, ils sont 22% à avoir tenté leur chance pour une augmentation en 2024. Le résultat ? Une demande sur deux acceptée, et encore, souvent à prix réduit. Entre une inflation galopante et un taux de chômage qui refuse de décroître, les ambitions salariales se heurtent à une réalité économique austère.

Une personne compte des billets de cinq euros avec une boîte ouverte contenant une montre-bracelet et un bijou en arrière-planUne personne compte des billets de cinq euros avec une boîte ouverte contenant une montre-bracelet et un bijou en arrière-plan
Photo : Pexels
Écrit par Paul Pierroux-Taranto
Publié le 20 janvier 2025

 

En Espagne, près d’un employé sur trois affiche un sourire crispé à la vue de sa fiche de paie. Selon une récente étude menée par la plateforme d’emploi InfoJobs, l’insatisfaction salariale règne en maître : 40% des salariés jugent leur rémunération inférieure à leurs responsabilités, et 34% la trouvent en décalage avec les standards de leur secteur. En clair, beaucoup ont l’impression de travailler au rabais.

Et si changer de poste pourrait sembler la solution, la réalité est moins simple. Un tiers des travailleurs considère qu’obtenir un emploi similaire avec une meilleure paie relève du parcours du combattant. Ce sentiment est particulièrement marqué chez les femmes, déjà pénalisées par des inégalités de salaire, et chez les seniors, pour qui les perspectives d’évolution s’amenuisent. Et pourtant, les employés sont de plus en plus nombreux à avoir des revendications salariales… sans trop y croire.

 

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Salaires en Espagne : demander plus, recevoir moins

En 2024, 22% des travailleurs espagnols ont osé frapper à la porte de leur patron pour réclamer une augmentation. Un chiffre en légère hausse par rapport aux années précédentes, mais loin d’être synonyme de jackpot : seule une demande sur deux a réellement abouti. Et parmi les chanceux, 57% ont dû revoir leurs rêves de grandeur à la baisse, recevant un montant inférieur à leurs attentes.

L’étude dévoile aussi une montée en puissance des revendications : près d’un salarié sur trois vise désormais une augmentation entre 1.201 et 2.400 euros, un bond significatif. Une audace inversement proportionnelle à la confiance : avec une moyenne de 4,5 sur 10, l’optimisme des travailleurs concernant l’issue de ces demandes s’érode.

Pour 2025, le bal des négociations devrait être encore plus animé : un employé sur cinq prévoit de tenter sa chance. Ce chiffre, en forte progression par rapport à 2023 (16%) et 2022 (15%), reflète une réalité implacable : l’écart entre les salaires et l’inflation se creuse, grignotant chaque mois un peu plus le pouvoir d’achat. Et le mécontentement monte.

Cette tendance s’inscrit dans un contexte politique marqué par les négociations autour du salaire minimum interprofessionnel (SMI), actuellement fixé à 1.134 euros bruts mensuels (en 14 versements). Sous l’impulsion de la ministre Yolanda Díaz, le gouvernement propose une augmentation de 4,4% pour le porter à 1.184 euros. L’objectif est clair : protéger le pouvoir d’achat des travailleurs face à une inflation qui a atteint 2,8% en 2024. À titre de comparaison, le salaire annuel moyen en Espagne s’élève à 26.948,87 euros, selon les dernières données de l’INE.


 

Chômage, incertitude et concessions pour les travailleurs espagnols

Si les augmentations salariales alimentent les conversations à la machine à café, elles sont loin d’être le seul sujet brûlant. En 2024, les travailleurs espagnols mettent en lumière des défis tout aussi profonds. En tête des priorités, l’éternelle quête d’équilibre entre vie pro et perso, un Graal convoité par 40% des sondés. Juste derrière, les conditions salariales (34%) et les opportunités de progression de carrière (32%) complètent le podium des aspirations. Quant à l’égalité salariale entre les hommes et les femmes, elle demeure un combat pour 29% des répondants. 

Mais à trop vouloir améliorer leurs conditions, les travailleurs se heurtent à un mur : l’incertitude. Avec un taux de chômage fermement accroché à 11,21% selon la dernière enquête de population active (EPA), changer d’emploi n’est pas une décision à prendre à la légère. Et pour beaucoup, cela ressemble plus à un saut dans l’inconnu qu’à une évolution de carrière. Résultat : 6 salariés sur 10 préfèrent rester bien arrimés à leur poste, même si cela implique de faire quelques concessions. Entre frustrations et résignation, peu à peu, les Espagnols apprennent à négocier... avec eux-mêmes.