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Guillaume Stengel : "Je pense à cette rentrée depuis le mois de mars!"

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Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 12 septembre 2020, mis à jour le 13 septembre 2020

Le proviseur du LFM a tenu son pari : ouvrir son établissement en temps et en heure, en permettant que tous les élèves puissent assister à leurs cours dans les meilleures conditions. Le Covid-19 est bien sûr dans toutes les pensées mais la vie doit continuer et les projets reprendre.

 

Ne fallait-il pas retarder la rentrée des classes alors que le taux de contagion en Espagne est de loin le plus élevé d’Europe ? Pour Guillaume Stengel, proviseur du Lycée Français de Madrid, le plus grand lycée du réseau AEFE, la réponse est un non catégorique. "L’école est une nécessité pour les enfants mais également pour les parents qui ont besoin de s’organiser et de reprendre ainsi leur activité professionnelle dans de bonnes conditions. Les enfants ont souffert pendant le confinement, et leur équilibre, c’est d’être à l’école. D’ailleurs, ils sont très contents d’être de retour. Et puis l’école est le préalable à toute reprise économique. Notre établissement doit contribuer à cet effort espagnol de maintien du système économique et social".

Conscient de l’enjeu, le Lycée Français de Madrid a donc été parmi les premiers à rouvrir ses portes le jeudi 3 septembre en appliquant les mesures strictes imposées par les autorités espagnoles au niveau national et local. Et rien n’a été laissé au hasard. "Je pense à cette rentrée depuis le mois de mars! -reconnait Guillaume Stengel. Mon pari était de scolariser un maximum d’élèves et que les enfants démarrent dans les meilleures conditions possibles. Cela pouvait paraître une gageure, mais nous avons réussi à avoir un fonctionnement normal avec un présentiel à 100%, de la Maternelle à la Quatrième, ce qui n’est pas courant en Espagne. Peu d’établissements sont en capacité d’accueillir 100% des élèves". 

 
Un modèle hybride

De la Troisième à la Terminale, en revanche, il s’agit d’un système "hybride". Les élèves vont en cours en demi-classe le matin pendant une semaine et l'après-midi la semaine suivante. Le reste du temps, les élèves ont l’opportunité de suivre une partie des cours en direct à la maison. "Nous sommes coincés par les normes restrictives de la communauté de Madrid -raconte le responsable du LFM. Les enfants de la Troisième à la Terminale doivent avoir entre un tiers et la moitié du temps scolaire en semi présentiel. Or, l’important pour les familles, c’était que les enfants soient pris en charge, car le risque de décrochage est important si les élèves restent à la maison trop longtemps. Avec le système adopté, tous les enfants vont à l’école tous les jours. En plus, ce modèle est réversible très vite : ou c’est le confinement total ou on revient immédiatement en présentiel".

Le LFM a travaillé une grande partie de l’été avec les 3 scénarios (présentiel, mixte, à distance) tant au niveau logistique que pédagogique. "Nous sommes revenus le 17 août – explique Stengel- car nous nous étions engagés auprès des familles pour reprendre le travail. Et cette semaine d’anticipation nous a permis de faire la rentrée à temps". Anticiper est bien le maître-mot pour le proviseur et cela fait des mois que l’établissement scolaire se prépare.

 
Challenge au quotidien

C’est ainsi que l’équipe du LFM a dû repenser tout le site pour faire circuler en toute sécurité 5.000 personnes au quotidien. Pas une mince affaire. Le réseau informatique a été renforcé et un important plan d’équipement, réalisé. Le LFM a notamment équipé tous les enseignants du Primaire d’un ordinateur portable avec webcam intégrée. "Nous avons anticipé l’achat de mobilier -explique le proviseur-, de matériel de désinfection, de distributeurs de gel, d’EPI pour tous les personnels, de différents types de cloisonnements dans les classes et à la cantine, véritable pivot, tout cela depuis le mois de mai. Le lycée a déjà dépensé 400.000 € pour s’adapter aux mesures contre le Covid-19. Nous avons aussi normalisé les outils de cours à distance et choisi ‘Zoom’, qui est le plus stable. Enfin, depuis le mois de juin nous avons augmenté les flux Internet pour favoriser la connexion intense. Il s’agit de trouver constamment de nouvelles solutions". Ainsi, le LFM travaille actuellement à la réouverture de la garderie et des activités périscolaires, qui resteront fermées tant que la désinfection totale ne pourra être garantie à 100%.
 
Bien sûr le risque zéro n’existe pas. "Nous avons des normes de sécurité parmi les plus fortes -rappelle Stengel. Au-dessus de nous, ce sont les hôpitaux ! Nous sommes là pour rassurer les parents car le risque de contamination à l’école est très limité avec les normes mises en place. On désinfecte tout le temps. Mais on attend coopération et responsabilité de la part des familles, notamment lors des moments de grande affluence, aux entrées et sorties". A ce sujet, le LFM vient d’installer, avec la police municipale, une signalétique pour maintenir la distanciation sociale aux abords de l’établissement.


Première classe confinée à Madrid

Mais avec un Lycée aussi grand, qui accueille chaque jour plus de 4.400 élèves, la sonnette d’alarme devait forcément retentir. La semaine dernière, une classe de CP a été mise en retrait, une mesure préventive qui suit à la lettre le protocole sanitaire du LFM. Et pour ne pas perdre un temps précieux, les enfants confinés ont immédiatement été mis en télé-enseignement. 

Le protocole du LFM, envoyé aux parents, est très clair à ce sujet : si un cas positif se déclare ou quand il y a une situation de suspicion -comme c’était le cas pour cette classe de CP- l’agence de santé de la Communauté de Madrid est obligatoirement informée et peut demander la mise en quarantaine immédiate de la classe. Par ailleurs, les conditions d'une éventuelle fermeture d'un des 2 sites, de Conde Orgaz ou Saint Exupéry, sont moins claires. C’est la communauté de Madrid qui aurait alors le dernier mot, si la situation devenait incontrôlable. 


Plus d’élèves que l’an passé

Curieusement, après cette crise due à la pandémie, le Lycée Français de Madrid a connu une augmentation significative des effectifs, avec des listes d’attente, et l’ouverture de nouvelles classes. Il y a eu peu de départs dûs à la conjoncture économique. Certes, de nombreuses entreprises -pas seulement françaises- ont préféré rapatrier leurs employés. Mais cela a été compensé par l’arrivée de nouvelles familles. "On a été heureux de constater –signale Guillaume Stengel- que les parents voulaient venir chez nous parce qu’ils disaient que du point de vue qualitatif nous avions été très performants durant le confinement et ils étaient attiré par le bénéfice scolaire pour les enfants".

Néanmoins, pendant le confinement, des parents se sont également plaints de la chute de la quantité et qualité de l'enseignement dans certains niveaux, et du maintien des frais de scolarité au 3e trimestre. D’autres regrettent que le système des bourses scolaires du réseau AEFE maintienne encore des critères souvent inadaptés à la situation en Espagne, qui exclut, de fait, de nombreuses familles qui n’ont pourtant pas de revenus élevés. Sans parler du fait que les justificatifs demandés sont tellement nombreux qu’ils finissent par décourager certains parents d’élèves.


Solidarité de la communauté française

"C’est une période très compliquée -explique Guillaume Stengel- il y a eu un débat sur les frais de scolarité et nous sommes toujours restés en dialogue avec les parents. Nous avons mis en place un fichier centralisé depuis avril recensant toutes les familles, françaises ou non, en difficulté. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec l’Entraide Française et le Consulat, qui ont été hyper réactifs et ont fait livrer des paniers repas. Le LFM a aidé avec 50.000 € de la caisse de solidarité et l’APA a fait un don de 20.000 €. Enfin l’AEFE a accordé des remises gracieuses, sans compter les bourses exceptionnelles au Consulat. Un engagement a été pris auprès des associations de parents d’élèves pour une remise de 30% en Maternelle et une baisse d’un point du pourcentage d’augmentation des frais de scolarité pour l’année prochaine, ce qui représente 600.000 €".


Se réinventer chaque jour 

Il est clair qu’au LFM comme partout ailleurs, il y aura un avant et un après Covid-19. Mais la vie continue et le proviseur travaille déjà sur l’avenir et le prochain budget, d’autant que de nombreux travaux ont dû être reportés. "Les aménagements climatiques sont un impératif –affirme Stengel- et le prochain dossier est la ventilation dans le Primaire. En attendant, on a retaillé tous les arbres, replanté des haies, fait des barrières d'ombre, végétalisé l’enceinte scolaire". 

Guillaume Stengel fourmille d’idées et, compte tenu de sa vaste expérience, profondément focalisée sur l’international, il y a un projet qui lui tient particulièrement à cœur depuis qu’il est arrivé à Madrid il y a un an. "Ici plus qu’ailleurs, -raconte-t-il- on se projette dans l’excellence, et il manque au Lycée Français de Madrid des formations spécifiques, linguistiques ou sportives par exemple, qui enrichissent notre offre de certifications et de diplômes". Tout un programme.
 
 

Armelle Pape van dyck
Publié le 12 septembre 2020, mis à jour le 13 septembre 2020
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