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DROIT EN ENTREPRISE - Eric Gardner de Béville : Administrateur du Cercle Montesquieu en France et fondateur de FIDADE en Espagne

EGYBEGYB
Écrit par
Publié le 8 avril 2019

Installé depuis 20 ans à Madrid, avec un parcours en France, Asie, Europe et Amérique, cet expert international juridique, Client Relations Officer et avocat, dispose d'un long parcours au sein et en dehors de l'entreprise, de part et d'autre de l'Atlantique. Un des premiers Administrateurs du Cercle Montesquieu en France (Association de Directeurs Juridiques créée en 1993), il est à l'origine d'initiatives identiques en Suisse (Club ILD crée en 2010) et en Espagne, avec la création en 2017 de FIDADE, le Foro Internacional De Abogados De Empresas. Il aborde avec un regard décomplexé les rapports entre le juridique et l'entrepreneurial, insistant sur la nécessité de créer du "liant" entre ces deux univers, soulignant les différences qui existent entre la France et l'Espagne.

(Photo DR) Il a grandi aux Etats-Unis et un peu partout sur le globe, au gré des expatriations de sa famille, a étudié à Washington et à Paris, initié sa carrière chez les Laboratoires Servier, "une très belle maison", avant d'être Directeur Juridique chez Coca-Cola, responsable de la France puis de l'Espagne et du Portugal, basé à Madrid. "Je suis passé du 100% français au 100% américain", commente-t-il à ce propos. Puis après 15 ans en entreprise, Eric Gardner de Béville a pris son indépendance, exerçant désormais depuis 10 ans comme avocat de cabinet, spécialisé en droit économique, avec des compétences claires sur les relations fournisseurs-distributeurs, expériences préalables oblige. Ses compétences l'ont amené à développer une activité de conseil spécialisé, axée sur la mise en relation des juristes internes et avocats externes. "Ces deux fonctions ne sont pas identiques ; trop souvent leurs représentants ne parlent pas le même langage", déplore-t-il? "Et pourtant ils travaillent ensemble".

Son métier ? "Trader en Droit", dit-il, mais aussi : "gestion de clientèle, chasse de tête, cost-management et lobbying, tout dans le juridique en entreprise et cabinet". Un savoir-faire auquel The Client Relations Company, son entreprise, se dédie. Co-Managing Director de HR Consulting Group, entreprise basée en Suisse, et Client Partner chez Ayming Espagne et Atrevia Espagne-Portugal, il est donc bien placé pour se poser quelques questions pertinentes sur le monde des avocats en entreprise et en cabinet.

La culture d'entreprise, avec sa cohorte d'impératifs commerciaux et économiques, versus la culture juridique, avec ses rigidités, son académisme, son jargon : la rencontre de ces deux univers n'est pas toujours des plus sereines, c'est du moins le constat de l'intéressé. La figure de l'avocat d'entreprise, courante en Espagne, utilisée comme un véritable outil au service des compagnies commerciales aux Etats-Unis, est inexistante en France. A cet égard Eric Gardner de Béville cite volontiers Pascal, évoquant les Pyrénées : "Vérités en deça, mensonges au-delà". "En France, le juriste d'entreprise n'a pas le statut d'avocat, tandis qu'en Espagne il est possible d'être avocat en entreprise le matin et avocat en cabinet l'après-midi. Ça ne pose aucun problème", explique-t-il. Pas possible dans l'Hexagone d'être à la fois avocat et faire état d'une "dépendance" salariale avec la société commerciale dont on défend les droits. Cette différence statutaire constitue, aux yeux d'Eric Gardner de Béville un véritable archaïsme. "Sur le plan juridique, il y a peu ou prou de différences entre l'avocat d'entreprise et l'avocat de cabinet et ceci est vrai en France comme en Espagne", estime-t-il. "L'approche anglo-saxonne, à l'image de l'espagnole, est beaucoup plus réaliste et concrète, focalisée sur l'importance de l'exercice du droit en interne ou en externe, et non pas sur une soi-disant ?dépendance' salariale".

Il est urgent, pour Eric Gardner de Béville, de s'inspirer du modèle ibère pour améliorer la fonction juridique en France. Il a ainsi participé à la création en France du Cercle Montesquieu : un "lieu de réflexion et d'influence sur la fonction de directeur juridique dans l'entreprise et sur ses aspects managériaux", selon les termes de son Président actuel, Nicolas Guérin. Et il réitère au sud des Pyrénées, avec la création cette année de FIDADE, Foro Internacional De Abogados De Empresas. "L'idée est simple : favoriser un partage des bonnes pratiques entre Directeurs Juridiques pour se mettre autour d'une table et apporter des solutions communes d'une part aux relations avocat interne-avocat externe et d'autre part, aux nombreuses questions commerciales des clients". FIDADE a aussi pour mission de favoriser le passage entre entreprises et cabinets d'avocats : "plus les deux univers seront perméables, meilleure sera leur façon de travailler ensemble". La question de la confidentialité des avis juridiques émis en entreprise constitue un des dossiers chauds sur lequel FIDADE est amenée à se pencher.

Pour l'intéressé, deux choses sont claires : "d'une part, il faut que l'exemple espagnol de l'avocat en entreprise inspire la règlementation française, et d'autre part que le modèle français du Directeur Juridique-Manager se développe en Espagne". "Le fait d'avoir énormément voyagé m'a appris à apprécier la différence et avoir une ouverture d'esprit. Faire les choses différemment, ce n'est pas forcément se tromper. Il faut oser changer, oser évoluer", avance Eric Gardner de Beville. "Chaque matin quand je me rase, je le fais de façon différente pour me forcer à voir les choses autrement", illustre-t-il. Pour lui, il est nécessaire que les cabinets d'avocats acquièrent des réflexes plus commerciaux, qu'ils apprennent à vendre leurs services en les adaptant aux besoins des services juridiques des entreprises : "Ils doivent être plus concrets, savoir s'adapter aux besoins de leurs clients et faire valoir un bon rapport qualité-prix", défend-il. Et encore : "Il faut que les avocats vendent leurs services presque comme s'ils vendaient du Coca-Cola?Je dis bien ?presque'". "En Espagne la profession est en train d'évoluer, soutenue et poussée par l'absence de différence entre avocat et juriste d'entreprise. Sur ce point l'Espagne a une longueur d'avance sur la France. Mais en France la montée en puissance du directeur juridique au sein de l'entreprise est indéniable : le juriste est passé d'un statut d'agent de recouvrement de créances à un manager et spécialiste du droit de son entreprise. Il doit continuer sur cette voie et s'investir dans la partie commerciale et suivre le cheminement naturel, qui le fait entrer comme membre du Comité Exécutif", insiste Eric Gardner de Béville . FIDADE, d'évidente inspiration hexagonale, compte bien, au sud des Pyrénées, y contribuer.

VG (www.lepetitjournal.com ? Espagne) Mardi 9 mai 2017

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