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Simond de Galbert : "L’action culturelle, un levier pour la construction européenne"

Nommé conseiller culturel et directeur de l’Institut français d’Espagne à la rentrée 2025, Simond de Galbert revient sur son parcours diplomatique et les priorités qu’il souhaite porter à Madrid.

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Simond de Galbert, conseiller culturel et directeur de l’Institut français d’Espagne / DR
Écrit par Vincent GARNIER
Publié le 22 octobre 2025, mis à jour le 23 octobre 2025

Pouvez-vous vous présenter brièvement : votre parcours professionnel, vos expériences antérieures, et ce qui vous a conduit à prendre cette fonction de conseiller culturel à Madrid ?

J’ai pris mes fonctions à Madrid le 1er septembre 2025, après trois années passées à Pékin comme numéro trois de l’ambassade de France en Chine, où je dirigeais le service politique. Ce service a deux grandes missions : coordonner l’activité bilatérale de l’ambassade et le dialogue avec les autorités chinoises, et analyser la situation politique intérieure et internationale de la Chine pour éclairer nos autorités à Paris.

Avant cela, j’ai ̶exercé des fonctions liées aux questions stratégiques et de sécurité. Entré au ministère des Affaires étrangères en 2011, après l’École nationale d’administration, j’ai travaillé trois ans à la sous-direction du désarmement et de la non-prolifération nucléaire, où j’étais chargé du suivi des négociations internationales avec l’Iran sur son programme nucléaire jusqu’aux accords de 2014-2015.

De 2014 à 2018, j’ai ensuite passé quatre années aux États-Unis : d’abord comme chercheur invité au Center for Strategic and International Studies (CSIS) à Washington, puis comme conseiller politique au sein de notre ambassade, chargé des questions stratégiques.

 

J’étais aux côtés de Jean-Yves Le Drian lors du déclenchement de la guerre en Ukraine, le 24 février 2022 et dans les premiers mois de ce conflit

En 2018, j’ai été en poste à l’ambassade de France en Tunisie, avant d’être appelé par M. Jean-Yves Le Drian, alors ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, pour travailler ̶au sein de son cabinet. De 2019 à 2022, j’ai été son conseiller pour les affaires stratégiques, la relation transatlantique, et l’Europe continentale, notamment la Russie, l’Ukraine et le Caucase. J’étais à ses côtés lors du déclenchement de la guerre en Ukraine, le 24 février 2022 et dans les premiers mois de ce conflit.

A l’issue de ma mission au départ du ministre, j’ai été affecté à Pékin jusqu’à ma nomination à Madrid. Après Washington et Pékin et instruit de cette double expérience, il m’a paru nécessaire et important de revenir en Europe, dans un grand pays partenaire de la France comme l’Espagne, pour participer activement aux missions que nous y conduisons sur la culture, l’éducation ou encore la coopération scientifique. 

 

L'Institut français : un outil concret pour renforcer les liens franco-espagnols


Votre parcours politique et stratégique influence-t-il votre manière d’aborder votre fonction de conseiller culturel ?

Oui, absolument. Mon expérience dans des postes à forte dimension politique et stratégique m’a appris à avoir une vision globale et structurée des enjeux internationaux, à analyser les situations complexes et à coordonner des équipes.

Aujourd’hui, je transpose ces compétences à l’exercice de notre diplomatie culturelle, éducative, universitaire et scientifique. Je considère qu’elle n’est pas moins "politique" que mes expériences précédentes, mais elle s’exprime de manière différente: elle est un instrument de dialogue, de coopération et de rayonnement, qui s’inscrit pleinement dans la stratégie globale de la France en Europe.

Elle me permet également de placer la coopération culturelle dans une logique de construction européenne, en veillant à ce que chaque initiative locale, projet éducatif ou culturel s’intègre dans un réseau cohérent de partenariats et de valeurs communes qui consolide une solidarité de fait entre la France et l’Espagne, sur la base du lien qui nous lie dans le cadre de l’Union européenne. Mon parcours politique et stratégique influence donc directement ma vision : à mon sens, l’action menée par l’Institut français en Espagne est un outil concret pour renforcer les liens franco-espagnols et soutenir la construction européenne au quotidien. C’est une priorité dans le monde compétitif dans lequel nous évoluons.


Quels ont été vos premiers constats en Espagne, culturellement ou institutionnellement ?

Ce qui m’a frappé dès mon arrivée, c’est la richesse et la densité de notre présence en Espagne. Le réseau français comprend l’Institut français d’Espagne, et ses six antennes à Madrid, Barcelone, Séville, Valence, Bilbao et Saragosse, mais aussi 23 établissements scolaires d’enseignement français, aux côtés de 19 Alliances françaises. Cette implantation étendue est essentielle, surtout dans un pays aussi décentralisé.

J’ai été très impressionné par la qualité et le dynamisme des équipes, françaises et espagnoles, que j’ai rencontrées. Leur engagement et leur sens du service public facilitent la mise en œuvre de projets ambitieux. L’accueil chaleureux de nos partenaires espagnols, publics et privés, m’a également beaucoup marqué.


Quelles sont les missions principales qui vous ont été confiées, et quelles priorités identifiez-vous ?

Ma mission principale est de coordonner l’ensemble du réseau que je viens de vous décrire autour de quelques objectifs structurants :

- Sur l’enseignement français, approfondir encore l’excellence, le plurilinguisme, le bien-être des élèves qui nous sont confiés dans le réseau des établissements homologués en Espagne ; je veille à m’y rendre à chaque que j’en ai l’occasion, je l’ai déjà fait à Madrid, Barcelone, Saragosse, Bilbao ou encore Malaga. 

- Sur la culture, l’audiovisuel, le livre ou le débat d’idées, produire une programmation d’activités qui couvre l’ensemble du territoire espagnol, qui nous permette de toucher les publics les plus jeunes et d’appuyer les industries culturelles et créatives françaises, en lien avec les institutions espagnoles et les acteurs privés.

- Sur la coopération éducative, travailler quotidiennement avec toutes les autorités espagnoles, au niveau central et local, pour développer l’apprentissage du français au sein du système éducatif espagnol. 

- Sur la coopération universitaire et scientifique, renforcer encore les liens déjà très étroits entre nos universités, nos centres de recherche, nos scientifiques et nos étudiants pour préparer ensemble les innovations et les projets professionnels de demain.

 

Rester attractif dans un environnement concurrentiel


Quels sont les défis pour le réseau des lycées français et comment les relever ?

Notre réseau est un atout majeur, mais il doit rester attractif dans un environnement concurrentiel. Il faut démontrer la valeur ajoutée de l’enseignement français à l’étranger : qualité pédagogique, ouverture internationale et attachement aux valeurs républicaines.

Accompagner les équipes, maintenir un haut niveau d’exigence et garantir la sécurité et le bien-être des élèves sont des enjeux essentiels, partagés avec nos partenaires de l’AEFE, de la Mission laïque française et les collectivités locales qui accueillent ces établissements.


Comment renforcer la coopération universitaire et scientifique ?

Nous souhaitons faciliter la mobilité étudiante et scientifique, multiplier les programmes conjoints et valoriser les parcours bilingues ou doubles diplômes. La coopération universitaire franco-espagnole doit être accessible, inclusive et innovante, afin de renforcer la visibilité du système universitaire français dans un contexte européen compétitif.


Pour vous, qu’est-ce que l’action culturelle extérieure doit incarner aujourd’hui ?

L’action culturelle ne se limite pas à la diffusion de la langue ou des arts. Elle est un outil de dialogue, de coopération et de présence dans un monde fragmenté. Elle doit incarner la solidarité, l’ouverture et la construction européenne au quotidien. Ce que nous faisons dans les Instituts français, et les lycées, ce que font par ailleurs les Alliances françaises, participe à cette mission : faire vivre la relation franco-espagnole et renforcer des liens durables au bénéfice des citoyens des deux pays.

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