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"Dans une transition professionnelle, les émotions empêchent de voir clair"

Un virage professionnel, qu'il soit choisi ou imposé, est une étape décisive qu'il faut bien préparer. Demander de l'aide à un spécialiste peut faire toute la différence sur un marché du travail hyper compétitif. Rencontre avec Jean-François Forgeot d'Arc, l'un des grands experts en la matière.

Jean-Francois Forgeot d’ArcJean-Francois Forgeot d’Arc
Écrit par Armelle Pape Van Dyck
Publié le 30 août 2024, mis à jour le 2 septembre 2024

Et Jean-François Forgeot d'Arc, coach certifié ICF (International Coaching Federation), sait de quoi il parle. Il a vécu lui-même avec succès plusieurs transitions professionnelles. Auditeur et consultant chez Arthur Andersen, il décide il y a plus de 20 ans de changer de voie: "Je cherchais d’autres challenges différents de ceux de la finance", explique-t-il. Il se reconvertit dans les ressources humaines, et travaille comme DRH pour de grandes multinationales comme Mondelez ou L’Oréal. Mais les transitions ne s'arrêtent pas là, puisque ce professionnel des RH a également changé de pays plusieurs fois et connaît donc bien la problématique des expatriés.

Jean-François Forgeot d'Arc connaît bien la problématique des expatriés

Enfin, autre transition -et pas des moindres-, Jean-François Forgeot d'Arc a également changé de statut professionnel, puisqu’il est passé de salarié dans une multinationale à autoentrepreneur. La pandémie - et avec elle, la hausse des prix-sévissait et il était en charge de plusieurs plans sociaux. "Il a fallu licencier beaucoup de monde"  se souvient Jean-François. Il commence alors une formation de coaching chez Coactive Training Institute, CTI, dans lequel plus de la moitié des coachs dans le monde ont été formés. "Mon entreprise a été flexible et a accepté que je fasse du coaching à l’extérieur et à côté de mon travail, et en janvier 2024 j’ai quitté ma boîte. Je continue à faire du coaching pour certain dirigeant  de cette entreprise".

Ma philosophie est de trouver le bon poste pour chaque personne pour qu’elle puisse s´épanouir pleinement

Mais pourquoi se lancer dans le coaching ? "Mes collègues disaient toujours que j’avais une très bonne intuition – raconte Jean-François-, un bon recul pour les aider à se développer. Il faut comprendre les gens, ce qui les motive, il y a un côté intuitif. La plupart du temps, les entreprises chechent la bonne personne pour chacun des postes, alors que ma philosophie est de trouver le bon poste pour chaque personne pour qu’elle puisse s´épanouir pleinement".

La principale erreur que commettent les gens est de ne pas demander de l’aide dans une période de transition ou de transformation liée à l’entreprise

Le Socrate des ressources humaines

Et il ne s'agit pas de mentoring. "Il faut aider la personne à réfléchir - affirme Jean-François. Dans le coaching, on analyse et on aide la personne à se poser les bonnes questions, ce qui lui permet de progresser en la guidant, à trouver les réponses elle-même. Il faut avoir le bon discours". Ce Socrate des ressources humaines utilise donc l’art de la maïeutique, tel le philosophe grec qui parvenait à faire découvrir à ses disciples les vérités qu’ils avaient en eux-mêmes par le biais de questionnements.

Il y a une multitude de situations qui impliquent une transformation au sein des entreprises

Le bouche-à-oreille et Linkedln

Ses clients sont aussi bien des particuliers que des entreprises. L'avantage d'avoir la casquette d'expatrié, c'est que Jean-François travaille dans trois langues et dans plusieurs pays. "Tout se fait en ligne, il n'y a aucun problème -explique-t-il. J’ai des clients en Afrique du Nord, aux États-Unis, en France et en Espagne. En fait, ce qui marche c’est le bouche-à-oreille et aussi Linkedln, avec beaucoup d’anciens collègues qui me connaissent. En ce moment, j’accompagne un comité de direction du secteur de la grande consommation dans le cadre d’un changement culturel impulsé par le rachat il y a deux ans de cette entreprise par un 'Private Equity'. Pour les particuliers, le coaching peut intervenir dans le cas d’une perte d’emploi, d’une promotion ou d’une reorientation professionnelle, ou encore d’un changement de pays."

 

jean-français Forgeot d'arc
Jean-François Forgeot d'Arc a lui-même vécu avec succès plusieurs transitions professionnelles

 

Comprendre les émotions pour mieux les gérer

En définitive, il y a une multitude  de situations qui impliquent une transformation au sein des entreprises . Et en toute logique, il y a de nombreuses équipes qui traversent ce cap difficile. Et dans ce mare magnum de bouleversements, la principale erreur que commettent les gens est de ne pas demander de l’aide dans une période de transition ou de transformation liée à l’entreprise. "Il y a beaucoup d’émotions dans une transition – souligne Jean-François-, et il faut comprendre ce qui les génère, et les dissocier des faits, leur donner un nom pour savoir les gérer. Par exemple, ce qui nous révolte nous rend triste ou anxieux. Il faut se concentrer sur l’essentiel, car les émotions empêchent de voir clair. Cela permet ainsi de mieux se connaître, et en faisant ce travail sur soi, on sait mieux utiliser ses forces et ses faiblesses" et cela s’applique aussi bien individuellement qu’au sein d’une entreprise.

Savoir ce que l'on veut

Dans ce travail d'introspection, Jean-François préconise d'abord d'établir un bilan de compétences. "Il faut savoir ce que l’on veut pour le futur, qui on est, et ce qu’on fait. Il s’agit de clarifier la vision, les valeurs et les compétences (actuelles et celles requises). Cela ce traduit plus simplement par ce que je sais faire, ce que j’aime faire et ce que les entreprises proposent. Pour ma part, par exemple, c'était très clair: J’ai un enfant de 10 ans et je voulais plus de temps pour être avec lui. Le travail de coaching permet de se projeter à moyen terme pour pouvoir anticiper".

 

Et c'est aussi comme ça que l'on peut déceler les incohérences. "S'il y a une dissonance, le projet n’est pas cohérent et c’est très important de comprendre cela -explique Jean-François. Par exemple si l'on affirme: 'pour moi le plus important, c’est la famille, mais on est prêt à accepter une offre d’emploi à Singapour, ce n'est pas cohérent. Or, les responsables des ressources humaines sont formés à détecter ce genre de choses et le candidat ne s’en rend pas toujours compte."

Coacher un profesionnel avec de l’autisme augmente de 30% sa capacité à trouver un emploi

Aider les personnes neurodivergentes

En plus de son expertise en transition professionnelle, Jean-François Forgeot d'Arc est profondément engagé dans le soutien de la communauté neurodivergente et a suivi pour cela une spécialisation pour aider les professionnels avec, par exemple, de l’autisme ou un TDAH. "Malheureusement -regrette Jean-François-, nombreux sont ceux qui, par peur ou par anxiété, ne veulent pas parler de leur condition et ne savent pas comment la gérer sur le lieu de travail". C’est pour cela que sensibiliser et former les entreprises est aussi essentiel.

Travailler avec son TDAH plutôt que contre lui

Avec un coaching efficace, une personne neurodivergente prend par exemple conscience de ses forces. "Il faut savoir que coacher un profesionnel avec de l’autisme augmente de 30% sa capacité à trouver un emploi mais aussi à le conserver". Rappelons qu'entre 10 et 15% de la population mondiale est neurodivergente.

Pas de coaching prêt-à-porter, du sur mesure

"Il n’est pas question de mettre une étiquette sur une personne, chaque personne est unique -affirme Jean-François-, chacun d’entre nous a ses propres caractéristiques". En définitive, pas de coaching "prêt-à-porter", mais du "sur mesure", puisqu’il s’adapte à chaque personne et à chaque situation dans laquelle elle se trouve.

Armelle Pape van dyck
Publié le 2 septembre 2024, mis à jour le 2 septembre 2024
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