Le cluster madrilène des instituts culturels nationaux de l'Union européenne regroupe 20 membres et 5 entités associées, avec pour objectif de promouvoir un espace de réflexion transversale autour des valeurs du Vieux Continent, mais aussi de renforcer la collaboration et le partage des bonnes pratiques. A l'occasion de son 40e anniversaire, l'Alliance française de Madrid (AFM), un des membres fondateurs du cluster, assume cette année la présidence tournante d'EUNIC Madrid.
C'est une institution qui veut gagner en visibilité, avec une action de second plan pas toujours évidente à décrypter auprès du grand public. D'autant que si EUNIC (European Union National Institutes for Culture) a pour vocation de faire valoir un rayonnement culturel européen, son action au sein même des pays de l'UE, comme à Madrid en Espagne, paraît moins cruciale qu'en dehors des frontières du Vieux Continent. Pourtant l'institution jouit à domicile aussi d'un certain nombre de vertus, qui justifient largement plus de 15 ans d'existence dans le pays de Cervantès. Créé en 2008 avec pour membres fondateurs l'Alliance française et l'Institut français de Madrid, mais aussi le British Council, le Centre Tchèque de Madrid, le Forum culturel autrichien (Austrian Cultural Forum), le Goethe-Institut, l'Institut Culturel Roumain, l'Institut Ibero-americain de Finlande et l'Institut Italien de Culture, EUNIC a au cours des 3 derniers lustres grandi, agglutinant un nombre croissant d'entités impliquées dans une mission parfois malmenée, la défense et la promotion de la culture. Dans un contexte de globalisation et de crispation mondiale, où le tout économique prime en continu sur l'ensemble des considérations, EUNIC a pour prétention d'agir en faveur d'une culture vivante, tolérante et ouverte, favorisant le rapprochement de ses membres pour mener à bien des projets culturels et artistiques communs, dans les domaines de la littérature, du cinéma, des arts urbains etc. "C'est grâce à la culture que nous serons capables de dépasser les vieux clivages européens", estime ainsi le directeur de l'Alliance française de Madrid.
Pour Julien Ocaña, le choix d'assumer la présidence (tournante) d'EUNIC en cette année 2024 n'est pas innocent, puisqu'il correspond aussi au 40e anniversaire de l'Alliance française de Madrid. "Au-delà du fait qu'EUNIC est pleinement aligné avec nos valeurs humanistes, l'intérêt est aussi qu'on est pendant 1 an au cœur de l'organisation du cluster, des échanges entre les directeurs des différents instituts membres", explique-t-il, "cela nous permet de nous rapprocher de façon beaucoup plus efficace de nos homologues et de créer des liens qui vont au-delà des contacts habituels et sont potentiellement sources de synergies". A l'instar du laboratoire de cultures urbaines Flipas, promu depuis une dizaine d'années par l'Alliance française et qui a connu au cours de ces dernières années des implications croisées avec différents membres d'EUNIC, tant à l'échelle des collectifs et des nationalités participantes, que des pays invités ou même des fonds conjointement collectés pour assurer la viabilité de la manifestation. A l'automne 2024, Flipas devrait réunir des acteurs français, allemands et belges autour de son approche transdisciplinaire et à destination des publics les plus périphériques. Pour Julien Ocaña, "Flipas montre que le concept de culture urbaine peut très largement être élargi au-delà du graffiti et du breakdance, pour aller vers d'autres domaines, dans une approche plus responsable de propositions comme la mode, le textile ou la gastronomie par exemple, comme nous l'avons déjà démontré par le passé à Madrid". Et si, en collaborations avec les structures de terrain, Flipas s'avère un formidable moteur pour faire jaillir les opportunités culturelles les plus créatives, le laboratoire s'appuie aussi sur l'institutionnalisme qu'apporte EUNIC, avec ses réseaux, ses connexions et ses ressources sans la complémentarité desquels il serait illusoire d´espérer pouvoir créer un événement jouissant d'une telle résonnance. "On est au cœur de la diplomatie culturelle", résume Julien Ocaña, "cet important soft power qui constitue aussi le savoir-faire de nos métiers".
Sous la présidence de l'AFM, EUNIC devrait en outre cette année jouer un rôle prépondérant dans le déroulement du Festival de Ségovie. Le Festival de cinéma européen et des valeurs démocratiques devrait pour sa troisième édition bénéficier de la participation d'un grand nombre des instituts membres d'EUNIC, qui apporteront une quarantaine de contributions cinématographiques. Dans la foulée, EUNIC sera partie prenante d'une exposition dédiée aux 35 ans de la chute du mur de Berlin, au Palacio Quintanar, toujours à Ségovie. Le 26 septembre, l'institution regroupera au sein de l'Alliance française de Madrid, au numéro 13 la cuesta de Santo Domingo, les différents acteurs participant à la Journée européenne des langues. Au programme : des lectures dans différentes langues et des "speak datings", à savoir des aperçus express d'apprentissage des langues, dispensés par les professeurs des différents instituts, le tout accompagné de concours de connaissances générales sur les différentes nations représentées et de propositions gastronomiques locales. En même temps à l'Institut français de Madrid, l'exposition d'illustrateurs "Europa ilustra" sera organisée dans le cadre de cette journée internationale, tandis qu'une exposition de livres itinérants sera promue dans les différents organismes. Pour Julien Ocaña, "il faut s'efforcer d'intégrer la diversité du monde à notre action culturelle". Le directeur de l'Alliance française synthétise ainsi la philosophie d'EUNIC, qui encourage à sortir des périmètres strictement nationaux, pour aller au-delà, vers des publics et des cultures métissés dans nos modernes creusets sociaux où la culture opère comme l'agglutinant nécessaire.