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LEY MORDAZA – Elle rentre en vigueur aujourd'hui, mais qu'est ce qu'elle dit ?

Écrit par lepetitjournal.com Madrid
Publié le 30 juin 2015, mis à jour le 1 juillet 2015

La loi de "sécurité citoyenne" rebaptisée loi "mordaza " (bâillon) par ses opposants, entre en vigueur ce mercredi 1er juillet en Espagne. Le 11 décembre dernier, c'est un Parti Populaire bien seul qui a fait adopter la loi au Parlement, se confrontant au désaccord des autres groupes parlementaires qui l'accusent de porter atteinte aux libertés fondamentales. Retour sur le contenu du texte, et les raisons pour lesquelles il est tant contesté par les politiques et citoyens espagnols.


(Photo CC Carlos Delgado)

Votée au Parlement en décembre, puis approuvée par le Congrès en mars, la loi de sécurité citoyenne est, depuis ses origines, seulement appuyée par le Parti Populaire de Mariano Rajoy, et se voit critiquée par tous les autres bords politiques.
Le texte propose de nombreuses sanctions dirigées vers toutes les formes de protestations citoyennes, limite les droits des migrants, et transforme des délits autrefois punis par le code pénal en actes administratifs. En conséquence, les sanctions seront traduites par des paiements administratifs pouvant atteindre les 600.000 euros. Plus que tout autre chose, la ley mordaza s'attaque avec virulence au citoyen manifestant. Le journal 20 minutos retrace les points les plus marquants de celle-ci, en rappelant le montant astronomique que pourra désormais coûter la simple participation à un rassemblement citoyen.

Les infractions se divisent en trois catégories : "légères " (sanctionnées par des amendes allant de 100 à 600 euros), "graves" (600 à 30.000 euros) et "très graves" (30.000 à 600.000 euros).
Les infractions dites "légères" concernent par exemple le refus de montrer ses papiers à un agent de police, occuper un immeuble sans le consentement du propriétaire, boire sur la voie publique ou encore insulter à un agent de police durant une manifestation. Actes considérés comme "graves" : filmer des violences policières et diffuser les images sans autorisation, s'opposer à un délogement et soutenir les victimes expulsées, ou encore manifester face au Sénat et au Congrès des députés. La catégorie "très graves" englobe quant à elle les réunions et manifestions organisées au sein d'une structure publique, mais aussi l'organisation d'un spectacle ou d'une activité ne prenant pas en compte l'interdiction mise en place par les autorités, "pour raisons de sécurité".
Concernant les migrants qui pénètrent régulièrement les enclaves de Ceuta et Melilla, la police aura désormais l'autorisation de les arrêter sitôt foulé le sol espagnol, et de les remettre aux autorités marocaines. Par cette pratique, l'Etat espagnol les prive du droit de prononcer une demande d'asile.

Les raisons de cette réforme
Beaucoup considèrent que la mise en place d'une telle loi, en dépit du nom de "sécurité citoyenne", n'est en fait qu'une manière de limiter les manifestations récurrentes qui ont lieu en Espagne depuis que le pays est fortement touché par la crise économique. El Diario de León relate en effet qu'en 2013, ce sont 43.170 regroupements qui ont été recensés. Contre 4.527 en 2007. Le gouvernement de Mariano Rajoy espèrerait donc pouvoir limiter ces mouvements, qui, s'ils n'affichent pas de violences particulières, persistent du moins depuis plusieurs années. Rapportées par le journal de gauche El Publico, les paroles de Joaquim Bosch, porte-parole de "Jueces para la democracia" (association professionnelle de juges et de magistrats), résument le point de vue de nombre de citoyens : "ce n'est pas une loi de sécurité citoyenne, c'est une loi de sécurité du gouvernement contre les protestations citoyennes."

Pour beaucoup, une loi à l'encontre de la démocratie
Le Partido Popular, qui détient la majorité absolue au Parlement, n'a eu aucun mal à faire passer en force sa loi dite de "sécurité citoyenne" et à prévoir son entrée en vigueur ce mercredi 1er juillet en réformant le code pénal. Pourtant, ce sont tous les autres groupes politiques qui se sont unis afin de dénoncer son caractère "inconstitutionnel", comme le rapporte El Pais. Ainsi, les principaux partis politiques voient en cette nouvelle loi un moyen de limiter considérablement les droits fondamentaux que sont celui d'expression, de manifester, et de se réunir. Le PSOE, Izquierda Plural, ou encore UPyD ne mâchent pas leurs mots en accusant l'Etat de devenir "policier" et de sanctionner des libertés pourtant fondamentales au fonctionnement d'une démocratie... Pour les Français, qui ont la réputation de descendre dans la rue pour un oui ou pour un non, une telle loi est d'autant plus difficile à comprendre.

Des manifs pour pouvoir manifester
De son côté, Pablo Iglesias, leader de Podemos cité par Europapress, dénonce fermement le caractère "antidémocratique" de cette loi.
Mais les politiques n'ont pas été les seuls à faire entendre leur voix. Directement concernés par cette réforme, les citoyens espagnols organisent régulièrement des manifestations pacifiques pour protester contre la restriction de leurs libertés. La plus significative a été organisée par la plate-forme "No somos delito", qui a mis en scène le 10 avril dernier des milliers d'hologrammes manifestant en face du Congrès des députés. Une manière judicieuse et créative de montrer que même sans violer cette nouvelle loi, le peuple espagnol saura faire entendre son désaccord et défendre ses libertés.

Et après ?
Les plus optimistes assurent que la loi de sécurité citoyenne ne sera en vigueur que quelques mois. En effet, les élections générales étant prévues pour la fin de l'année, les candidats en liste assurent qu'ils annuleront la loi une fois leur supposée arrivée au pouvoir. C'est le cas de Pedro Sánchez (PSOE) qui a déjà promis son annulation s'il arrivait à la tête du Gouvernement. Mais le chef du parti socialiste n'est pas seul, et c'est toute l'opposition qui s'est désormais engagée à traduire l'une de ses premières réformes par la suppression de la ley mordaza. Pour le moment, la "loi bâillon" entrera bel et bien en vigueur mercredi, et ce malgré les critiques virulentes des opposants politiques mais aussi des citoyens espagnols.

Alexia RICARD (www.lepetitjournal.com ? Espagne) Mercredi 1er juillet 2015
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Publié le 30 juin 2015, mis à jour le 1 juillet 2015

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