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Harcèlement au Mondial: le ras-le-bol d'une journaliste espagnole

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Copie d'écran Twitter
Écrit par Alexandra Pichard
Publié le 5 juillet 2018, mis à jour le 5 juillet 2018

Si la présence de l’Espagne à la Coupe du Monde de Russie a été de courte durée, c’est celle du harcèlement machiste qui s’est fait remarquer lors de la compétition.

 

Des nombreuses journalistes sportives ont dénoncé des attitudes inacceptables, souvent lors des directs, de la part des supporters. La dernière en date est María Gómez, journaliste de Telecinco, qui a décidé de prendre position contre le harcèlement sexiste. 

 

Dès les premiers jours de la Coupe, en marge de la compétition, le comportement des fans a fait polémique, à cause de nombreux cas de harcèlement envers les femmes journalistes. Julia Guimaraes, envoyée brésilienne d’O’Globo, en a fait les frais, lorsqu’un fan a tenté de l’embrasser en plein direct. De même pour Juliet González, correspondante pour la chaîne allemande DW, qui a reçu un baiser non désiré par un supporter qui lui a également touché la poitrine. La reporter suisse de Aftonbladet TV, Malin Wahlberg, a elle aussi subi l’attitude des fans qui l’ont embrassée, prise par les épaules et décoiffée en plein direct. 

 

La journaliste espagnole María Gómez a quant à elle été confrontée à plusieurs situations embarrassantes. Avant le match de l’Espagne contre la Russie, dimanche dernier, un homme l’a embrassée par surprise lors d’une retransmission en direct puis est parti en courant. Après le match, alors qu’elle interrogeait des supporters sur la défaite du pays, elle a dû recadrer un fan qu’il lui a demandé son prénom en l’appelant "guapa" (ma jolie). Elle lui a répondu : "Maria, mais le 'guapa' n’est pas nécessaire. Maria, journaliste". 

 

Nous sommes des travailleuses, pas des pots de fleur ou des poupées dans la rue qui attendent qu’on les embrasse.

 

La journaliste de Telecinco a dénoncé une première fois ces situations inacceptables dans un post sur Twitter où elle affirmait qu’elle avait décidé de réagir "pour ceux qui disent qu’on exagère et que ce sont seulement des blagues". Par la suite, elle a pris la parole en direct sur BeMad et s'est positionnée contre les actes machistes du Mondial : "Ça me paraît surréaliste qu’on doive le demander, mais nous en avons assez de ces attitudes et de ce type d’hommes. Nous sommes des travailleuses, pas des pots de fleur ou des poupées dans la rue qui attendent qu’on les embrasse. Nous sommes des professionnelles et nous demandons le respect". 

 

Pour avoir fait front aux harceleurs, María Gómez a reçu beaucoup de soutiens sur les réseaux sociaux, notamment celui de ses collègues, mais aussi beaucoup de critiques d’une partie de la population. Ceux-ci se sont attaqués à la journaliste en citant une de ses interventions télévisées où elle parle de la beauté des joueurs marocains en les qualifiant de "bombes". La reporter a répondu à la polémique avec une lettre où elle s’explique et réitère son engagement contre le harcèlement. Elle y dénonce ces situations qui font partie intégrante du quotidien des journalistes, où l’attitude des hommes affecte le travail au féminin, et entraîne l’appréhension des directs à l’extérieur. Elle y souligne aussi qu’on juge bien souvent les compétences d’une femme sur son aspect physique, alors que sa préparation pour le Mondial est allée bien au-delà d’un "joli visage". Elle y encore sur la difficulté d’exercer cette profession, une "réalité partagée par toutes les femmes, dans tous les domaines". Dans sa lettre María Gómez présente enfin ses excuses pour son commentaire sur les joueurs marocains, en reconnaissant qu’elle a pris conscience de ses erreurs et invite les hommes faire de même. 

 

Le "Mondial du machisme"

 

Car si dans le contexte de la vague féministe née lors de la manifestation du 8 mars en Espagne, le "Mondial du machisme" fait particulièrement scandale, c’est un problème récurrent dans le monde du sport. Déjà en avril, la journaliste française Maria Lorenzo (Canal Plus) avait été obligée de remettre en place un supporter du FC Barcelone en lui ordonnant de ne pas la toucher. Le mouvement "Laisse la travailler" a notamment vu le jour au Brésil, où les femmes journalistes subissent quotidiennement des situations de harcèlement. Dans ce contexte, beaucoup de femmes et d’hommes prennent la parole pour demander à la FIFA, organisatrice du Mondial, de prendre ses responsabilités et d’adopter des mesures pour éviter ces situations inacceptables et machistes, pour les professionnelles comme pour les supportrices.