Les règles de protection des données de Facebook seraient-elles trop légères ? Ces faiblesses du réseau social ont-elles eu des conséquences sur l’élection de Donal Trump ou le référendum du Brexit, en permettant à une entreprise de stratégie électorale d’avoir accès à des millions de données ? Telles sont les questions que se posent les gouvernements britannique et américain après des révélations inquiétantes sur des fuites de données de Facebook.
Cambridge Analytica : 50 millions de profils Facebook dérobés
Samedi 17 mars, le Guardian a révélé un témoignage inédit de Christopher Wylie, un ancien salarié de la société de stratégie électorale Cambridge Analytica. Cette dernière est accusée d’avoir profité des règles de confidentialité souples de Facebook pour obtenir des informations non seulement sur des « amis Facebook », mais également des « amis d’amis ». 50 millions de profils seraient concernés.
Comment ? Par le biais d’une application présentée par Aleksandr Kogan, un psychologue de l’Université de Cambridge. Cette application permettrait de donner accès non seulement aux informations des utilisateurs de l’application, mais également à celles de leurs amis. Une fois ces informations récupérées, Cambridge Analytica aurait identifié des groupes d’électeurs (profilage d’électeurs), auxquels la société aurait envoyé des messages personnalisés pour influencer leurs opinions politiques – donc orienter leur vote, sans que les utilisateurs ne soient au courant de la fuite de leurs données.
Face au scandale, Kogan affirme être utilisé en « bouc émissaire » à la fois par Cambridge Analytica et Facebook et qu’à l’époque, ces deux sociétés lui avaient confirmé que ce qu’il faisait avec son application était parfaitement légal.
Zuckerberg convoqué devant une commission britannique
Si Facebook a annoncé la suspension des accès de Cambridge Analytica au réseau social, cela n’a pas suffi à rassurer les gouvernements américain et britannique. Mardi 20 mars, une commission parlementaire britannique a demandé à Mark Zuckerberg de venir s’expliquer sur cette fuite de données. Le patron de Facebook a jusqu’au lundi 26 mars pour s’exprimer.
Mais la réputation du réseau social, fort de deux milliards d’utilisateurs, bat de l’aile. Le réseau social avait déjà été fragilisé par des soupçons d’ingérence russe dans le référendum sur le Brexit. Suite à une enquête interne, Facebook avait conclu qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter… sans convaincre la commission parlementaire britannique qui avait réclamé des réponses.
Mark Zuckerberg se fait même abandonner par le co-fondateur de WhatsApp, Brian Acton, dont l’application a pourtant été rachetée par Facebook en 2014.
It is time. #deletefacebook
— Brian Acton (@brianacton) March 20, 2018
Donald Trump élu par Cambridge Analytica ?
Autre rebondissement : lundi 19 au soir, la chaîne de télévision Channel 4 News diffuse une enquête où l’on découvre le PDG de Cambridge Analytica, Alexander Nix, en train de proposer des pots-de-vin et des prostituées ukrainiennes à des hommes politiques. Nix y affirme également avoir « fait élire » Donal Trump. Réaction immédiate de Cambridge Analytica : par communiqué de presse, le conseil d’administration de la société annonce avoir renvoyé son PDG dès le mardi 20 mars, ses propos ne correspondant pas « aux valeurs de l’entreprise ».
Pour rappel, en 2015, le Guardian avait déjà révélé que le candidat Ted Cruz, en course pour l’investiture des Républicains américains, a fait appel à Cambridge Analytica. Une information qui dérange, l’entreprise étant financée par le Républicain Robert Morcer et ayant été dirigée par Stephen Bannon, un proche conseiller de… Donald Trump.