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ARBRE - Le micocoulier de Provence (Celtis australis) ou Lodão bastardo en portugais

Écrit par Lepetitjournal Lisbonne
Publié le 18 juillet 2012, mis à jour le 20 novembre 2012

S'il y a bien un arbre qui est omniprésent dans la ville de Lisbonne, c'est bien celui-ci. On le trouve partout, implanté le long des artères principales, dans les rues tortueuses des nombreuses collines, ainsi que dans quasiment tous les jardins ou espaces verts de la capitale portugaise.

 


(Photos : M.J. Sobral)

Les origines du micocoulier
On situe son lieu d'origine en Provence, mais on peut considérer que c'est aussi un arbre endémique du Portugal et de tout le pourtour méditerranéen. De la famille des Ulmaceae ou des Ormeaux (Ulmus sp.), son genre (Celtis) comprend 80 espèces différentes, comme par exemple celui de Virginie (Celtis occidentalis), au tronc rugueux, cousin de celui qui nous intéresse et dont on trouve seulement quelques exemplaires à Lisbonne ou encore celui de Chine, au tronc trapu, vivant à flanc de montagne, ceux d'Afrique, généralement de grand port ou enfin ceux d'Inde et Malaisie, qui vivent en plaine et en forêt humide.

Un arbre aux multiples avantages


Cultivé depuis l'Antiquité, les jardiniers ne trouvent que des avantages au micocoulier ; il est très facile à reproduire, aussi bien par semis que par bouturage et on le reconnaît aisément, car il possède, une fois adulte, un tronc large, fort et lisse au ton gris clair, qui rappelle la peau de l'éléphant. De son tronc, on pouvait extraire par le passé un colorant jaune assez recherché. Son bois fut aussi très utilisé pour la fabrication de fourche à trois doigts, des tonneaux et des avirons. Son écorce, elle, servait au tannage des peaux, faculté commune à certains chênes. Les feuilles caduques, qui tombent donc à la fin de l'automne, sont semblables aux orties, raison pour laquelle au Québec, on l'appelle «arbre à orties» et elles constituaient un très bon fourrage pour le bétail. Par contre, ces mêmes feuilles ne peuvent servir à substituer celles du murier pour nourrir les vers à soie, comme certains le prétendent.

Dans la longue liste des avantages que l'on trouve à cet arbre exceptionnel, le micocoulier peut être planté en pleine ville sur trottoirs et places, car ses racines droites et profondes ne risquent pas d'endommager chaussées et canalisations. Dans de bonnes conditions, l'arbre atteindra facilement les 30 mètres de hauteur et fournira ainsi une végétation offrant beaucoup d'ombre, sa croissance étant relativement rapide au début, puis ralentissant ensuite afin d'arriver à vivre de cinq à six siècles, ce qui est déjà très respectable.

Les Portugais les appellent "guignes du roi".
Les oiseaux des villes et des campagnes adorent les milliers de petits fruits, qui apparaissent en juin et qui seront mûrs à la fin de l'été, en septembre, des fruits rouges semblables aux guignes, raison pour laquelle les Portugais les appellent "guignes du roi". Plus tard, les fruits non mangés sècheront sur l'arbre et seront un bon élément pour reconnaître l'arbre en plein hiver, quand celui-ci se retrouve tout dénudé, car ils restent accrochés au moins jusqu'à la prochaine saison.

Un arbre utilisé en milieu urbain

En dehors de son port élégant et de sa valeur ornementale, on utilise beaucoup le micocoulier en milieu urbain, car il est aussi très résistant à la pollution atmosphérique. Le botaniste Pierre Belon (1517-1564) en fera la promotion au XIVº siècle et les paysagistes et urbanistes du XIXº siècle s'empresseront de le répandre partout, au même titre que le platane, pour sa faculté d'être insensible aux attaques d'insectes ou parasites qui sévissaient alors sur les ormeaux et peupliers. Cependant, une concurrence sévère mettra ensuite le micocoulier en retrait face au platane (Platanus orientalis), ce dernier devenant omniprésent dans l'hexagone à partir de 1850, sur le bord des routes comme en zone urbaine. Depuis une vingtaine d'années, les platanes du Midi souffrent de la maladie du chancre (voir les 40 000 au bord du Canal du Midi) provenant d'un insecte américain qui provoque l'assèchement du tronc et des ramifications de l'arbre, ce qui permet un retour croissant de l'utilisation des micocouliers pour les remplacer. Juste retour des choses.

On trouvera aisément de beaux alignements de micocouliers déjà bien développés dans la rue Pascoal de Melo (entre «a Portugalia»brasserie et la fontaine de Estefania), dans l'avenue Luis Bivar de l'Institut franco portugais, dans le jardin du Campo de Santa-Clara (celui de la Feira da Ladra), dans celui de São Pedro de Alcântara ou enfin dans celui des Necessidades.

Pour les nombreux avantages qu'il représente encore de nos jours, le micocoulier semble avoir un bel avenir en zone urbaine. Il reste intimement lié à l'histoire et à la culture du sud de l'Europe au même titre que l'olivier, le pin, le caroubier ou le chêne-liège et mérite qu'on s'y attache au moins sentimentalement, sinon pour les raisons évoquées ici.

André Laurins (www.lepetitjournal.com/lisbonne.html) mercredi 18 juillet 2012

Technicien agronome (maria.friesen@sapo.pt)

logofblisbonne
Publié le 18 juillet 2012, mis à jour le 20 novembre 2012

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