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LE ROMAN DE VICTOIRE - "Canal Mussolini", retour vers l’Italie des années 30

Sorti en  2010 et lauréat du prix Strega, "Canal Mussolini" a déjà fait couler beaucoup d'encre. A la fois roman, témoignage historique et saga familiale, la dernière ?uvre d'Antonio Pennacchinous immerge dans l'Italie mussolinienne. Découvrez sans attendre le destin extraordinaire de la famille Peruzzi

Un témoignage poignant

"La faim. C'està cause de la faim que nous sommes partis. Et pour quelle autre raison, je vous le demande? Sans la faim nous serions restés là-haut. C'était notre village. Pourquoi l'aurions-nous quitté? Nous y avions toujours vécu et toute notre famille. Nous connaissions le moindre de ses recoins et la moindre pensée de nos voisins. La moindre plante. Le moindre canal. Jamais nous ne serions venus autrement".

Marais Pontins, 1932. La famille Peruzzi, originaire de Vénétie et passée du rouge au noir, migre au Sud de Rome. Parce qu'elle "crève la faim", et parce que le grand père est l'ami d'un certain Mussolini, la tribu a accepté de s'exiler pour poursuivre l'immense projet de ce dernier : l'assèchement des Marais Pontins. Parents, enfants, oncles et tantes, tous, accompagnés de quelques autres 30.000 paysans, participent au plus grand chantier de la dictature. Huit années de travail et d'épuisement pour rendre viables ces marais, infestés de moustiques, et bâtir de nouvelles villes.

Outre le récit des Marais Pontins, "Canal Mussolini " plonge le lecteur dans la folie des conquêtes coloniales et de la Seconde Guerre mondiale. Des épisodes qui meurtrissent directement la famille Peruzzi mais qui n'altèrent en rien sa fidélité vis-à-vis du Duce.

Un livre haut en couleur

"Canal Mussolini, mené sur le ton du racontar, ou du ?contar', comme on dit chez les Peruzzi, est remarquablement construit" (Libération).

"Canal Mussolini" est un livre qui surprend et étonne. Parfois grave et souvent drôle, il ne vous laissera pas indifférent. Ecrit à la première personne, dans un langage populaire, le livre est censé retranscrire le parler vénitien des champs. Par moments entrecoupé de retours en arrières et autres digressions, l'?uvre d'Antonio Pennacchi offre au lecteur des personnages colorés et attachants : de l'oncle Temistocle à la belle Armida. Plongez-vous dans l'histoire des Peruzzi, l'histoire d'un destin croisé avec le Duce.

Le livre d'une vie

"Qu'il soit bon ou mauvais, ce livre est la raison pour laquelle je suis venu au monde", prévient l'écrivain en avant-propos.

Et pour cause, l'histoire des Peruzzi c'est avant tout celle de sa famille, de ses grands-parents et de leurs 17 enfants. Des pauvres paysans du Nord de l'Italie, contraints de quitter leur village, et devenus fascistes plus par attachement à Mussolini que par réelle conviction politique.

Une adhésion au Fascisme que l'auteur ne tente même pas d'excuser. Sans honte ni remord, il écrit ainsi : "Fin 1938, les Juifs étaient hors la loi en Italie, ce n'étaient plus des citoyens comme les autres (?) je vais être franc, cela n'a eu aucun effet sur ma famille. Comme sur le reste du peuple italien, soyons clairs".

D'ailleurs membre du MSI (parti néofasciste) avant de s'engager dans différents courants d'extrême-gauche, cet ancien ouvrier en usine a fait couler de l'encre en Italie. Parfois même accusé de révisionnisme, il a pourtant été salué maintes fois par les critiques. En témoignent les mots du Corriere della sera : "Pennacchi raconte la bonification des marais Pontins à la manière de la conquête de l'ouest. Magnifique".

Victoire Maurel (www.lepetitjournal.com/rome) Mercredi 30 Mai 2012

Version française : "Canal Mussolini", d'Antonio Pennacchi, traduit de l'italien par Nathalie Bauer. Edition Liana Levi, 2012. 495 pages. Prix : 23?
Version italienne : "Canale Mussolini",d'Antonio Pennacchi. Editions Mondadori. 461 pages. Prix: 20?
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