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JUSTICE - Les faux visas de la vraie ambassade de France en Bulgarie en procès

Depuis lundi et jusqu'à aujourd'hui, le tribunal correctionnel de Strasbourg juge quatre personnes pour avoir fourni des milliers de faux visas. L'ex-ambassadeur de France en Bulgarie et trois autres personnes sont mis en accusation

L'ancien diplomate Dominique Chassard dans le box des accusés, à Strasbourg (Photo : AFP)

Lundi, s'est ouvert à Strasbourg le procès des faux visas délivrés par l'ambassade de France en Bulgarie. Le motif d'accusation est "fourniture frauduleuse habituelle de documents administratifs indus"durant la période entre 1999 et 2000. Un délit passible de cinq ans d'emprisonnement. Sont appelés à la barre l'ex-ambassadeur de France à Sofia, Dominique Chassard, 65 ans, l'ex-chef de service des visas, Rudy Demage, 54 ans, sa femme bulgare, Petya Boneva, 36 ans, et l'épouse bulgare d'un homme d'affaire français, Rossitza Caix, 44 ans.
L'affaire a éclaté au grand jour en mars 2000, avec l'interpellation de deux prostituées bulgares à Strasbourg. Elles détenaient des visas d'affaires octroyés à la demande d'une entreprise dirigée par le français Bernard Caix. Ce dernier a été blanchi au cours de l'instruction. À l'époque, on soupçonnait une complicité de l'ambassade française dans un réseau de proxénétisme. Mais cette thèse a depuis été abandonnée. Le président du tribunal, François Wendling, se penche désormais avant tout sur le problème des relations diplomatiques entre la France et la Bulgarie.
Sous-effectif et questions politiques
Selon Rudy Demage, le problème majeur était le sous-effectif chronique dont souffrait l'ambassade de France à l'époque des faits. Seulement trois employés bulgares étaient affectés au traitement des demandes de visas. L'enquête a d'ailleurs révélé que le nombre de demandes est passé de 25.000 en 1999 à 65.000 en 2000. 90% de ces dossiers contenaient de faux documents. Bon nombre d'entre eux émanaient d'ailleurs d'agences de tourisme ou de complexes hôteliers plus ou moins liés à des réseaux de prostitution. L'ex-chef de service des visas a expliqué, lundi, qu'il ne pouvait accorder que "32 secondes par dossier".
Dominique Chassard affirme, lui, avoir reçu l'ordre "d'utiliser à plein toutes les possibilités d'alléger la procédure des visas". D'après l'ex-ambassadeur, "il y avait la nécessité de rétablir une relation bilatérale forte. La question des visas figurait expressément en bonne place".
Un régime de faveur
Rudy Demage évoque une politique délibérée de baisse des refus menée par l'ex-ambassadeur. Mais Dominique Chassard nie avoir donné de quelconques instructions allant dans ce sens. Dernier élément de cette affaire, les deux entreprises de la famille Caix sont à l'origine de 205 demandes de visas durant cette période. Selon l'épouse de Bernard Caix, 195 d'entre elles avaient été établies à partir de fausses invitations en France. Rossitza Caix a affirmé à la barre que ses compagnies "bénéficiaient d'un régime de faveur accordé aux entreprises françaises". Des milliers de visas auraient également été accordés à d'autres sociétés.
Une affaire bien floue sur laquelle le tribunal correctionnel de Strasbourg doit trancher aujourd'hui.
Perrine ROUX. (
www.lepetitjournal.com) 6 décembre 2006

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