

Selcuk Güris?k travaille avec son collaborateur Ali Alev sous le nom de "Selçuki & Ali". Ce sont des couturiers qui recherchent la sophistication intemporelle à travers les techniques d'artisanat anatolien. Ils participent notamment au "Printemps des artistes" au lycée Sainte-Pulchérie*. A l'occasion de son ouverture aujourd'hui, lepetitjournal.com a rencontré Selcuk Güris?k et Ali Adev à l'Université technique d'Istanbul, où ils ont ouvert une autre exposition.
Lepetitjournal.com d'Istanbul : Depuis quand vous considérez-vous comme un créateur de mode ?
Selcuk Güris?k (à droite sur la photo, NS) : Je ne me considère pas exactement comme un "créateur de mode" mais plus comme créateur de textile, de costumes et de mode. Nos créations ont un but de chic intemporel qui est en opposition avec la mode traditionnelle. Nous ne suivons pas quatre saisons par an ou les dernières modes. Nous fabriquons notre propre tissu et nos propres vêtements avec des manières traditionnelles et contemporaines ce qui les rend intemporels. Nous utilisons divers matériaux comme la laine, la soie, le coton, le lin ou le cachemire et confectionnons notre tissu à l'aide de techniques de fabrication de feutre venant de l'Anatolie turque, ces techniques sont les racines de notre art.
D'où vient votre intérêt pour cette création ?
La nature et la mort. J'imagine que si vous êtes un créateur ou un artiste vous essayez de devenir infini. Après votre mort vous voulez laisser une trace derrière vous car votre art vous survivra. Il deviendra la preuve de votre passage sur Terre. C'est pourquoi j'apprécie la nature et essaye d'être proche d'elle. Notre production en est également très proche, nous n'usons que des fibres naturelles et ne tuons aucun animal pour sa fourrure.
Sur internet, on peut lire que vous vous inspirez de l'artisanat d'Anatolie, qu'en pensez-vous ?
Je ne m'en inspire pas, j'en utilise les techniques à travers sa tradition. Que vais-je laisser après ma mort ? Mon ?uvre. Et cette ?uvre sera une preuve de la tradition d'aujourd'hui. Chaque tradition s'inspire d'une précédente. Ce ne sont que des couches et des couches qui s'accumulent les unes sur les autres. La tradition d'aujourd'hui sera celle de demain. On ne peut en renier aucune, chacune doit être appréciée à sa juste valeur. C'est ça notre inspiration.
Comme vous avez étudié et vécu en Angleterre, avez-vous remarqué des différences entre le milieu de l'art en Europe de l'ouest et en Turquie ?
Pendant cette période, j'ai appris la culture artistique anglaise, cette culture m'a permis de me construire personnellement. Puis je suis retourné en Turquie avec une vision différente. La Turquie est un pays du Moyen-Orient donc nous sommes plus proches de l'art oriental que de l'art européen. Mais la révolution de 1923 nous a ouvert vers l'Occident. Donc quand je suis retourné à Istanbul, je n'ai pas remarqué tant de différences mais j'ai remarqué les différents points de vue qu'ont les gens sur d'autres cultures que la leur. Ce qui conduit souvent à une interprétation erronée. Tout le monde a un point de vue subjectif, il n'est pas possible d'en avoir un totalement objectif. Je fais personnellement de mon mieux pour me mettre à la place des autres cultures que je découvre pour mieux les comprendre.
Vous travaillez avec Ali Adev comme "Selcuki & Ali". Comment travaillez-vous ensemble ?
Nous travaillons ensemble depuis trois ans mais nous étions amis avant de développer ce partenariat. Au début Ali n'était pas du tout de ce milieu, il étudiait l'économie, mais comme j'ai appris la fabrique du feutre avec un maître anatolien, j'apprends cette technique à un nouvel apprenti. C'est un cycle d'apprentissage qui se répète. "Selcuki & Ali" est notre marque que nous essayons de rendre plus visible. Il s'agit ici de notre cinquième exposition. Nous en avons effectué en Turquie, en Angleterre, en Ukraine et à New-York.
Quel est votre processus pour créer une de vos ?uvres ?
Nous ne travaillons pas ensemble sur la même pièce. Nous avons chacun notre manière de créer mais nous travaillons dans le même atelier donc nous nous influençons. Ma manière de créer est comme un voyage pour moi. Il y a un point de départ, je m'arrête à différentes étapes, il peut y avoir des changements ou je peux juste abandonner ce qui arrive parfois.
Vous avez deux expositions qui ouvrent cette semaine, ici et pour le "Printemps des artistes". Quelles sont les différences entre les deux expositions ?
Nous avons essayé de montrer nos différents côtés, on ne retrouve pas les mêmes types de créations dans les deux expositions. Pour le lycée Sainte-Pulchérie, c'était bien sûr pour la charité. L'Hôpital de la Paix à Istanbul a une valeur sentimentale pour moi. Plusieurs membres de ma famille y ont été internés pour des problèmes psychiatriques et quand j'étais un enfant, j'ai également dû y aller plusieurs fois. Quand j'ai entendu parler de ça, j'ai voulu y participer.
Est-ce que c'est votre première participation au "Printemps des artistes" ?
Oui et j'espère que je resterai en contact avec le groupe car je pense qu'ils font un travail très important et j'ai développé des liens avec eux. Nous avons été introduits par une amie artiste puis nous avons développé cette relation avec les volontaires. Nous voulons faire le mieux pour l'avenir de l'exposition, présenter de nouvelles personnes notamment. Nous verrons mais pour l'instant cela nous fait très plaisir d'y participer.
Propos recueillis par Nathanaël Scalbert (http://www.lepetitjournal.com/istanbul) vendredi 4 avril 2014
Plus d'informations :
*Printemps des artistes à Sainte-Pulchérie ici.
Selcuki & Ali à l'ITÜ ici (lien en turc).
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