Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 0
  • 0

LA REDACTION A AIME - Soufi, mon amour d'Elif Shafak

Écrit par Lepetitjournal Istanbul
Publié le 2 décembre 2011, mis à jour le 5 janvier 2018

 

L'édition du Petitjournal.com d'Istanbul s'associe avec la librairie EFY, pour vous proposer chaque mois une chronique littéraire sur un roman, un essai, une biographie ayant un rapport direct ou indirect avec la Turquie, les Turcs ou la langue turque. Les ouvrages que la rédaction choisit sont disponibles à la librairie EFY. Ces livres que nous allons vous présenter au fil de l'année peuvent être des nouveautés, mais peuvent aussi être des classiques que nous souhaitons faire (re)découvrir à nos lecteurs. Ce mois-ci à l'honneur, le roman d'Elif Shafak intitulé "Soufi mon amour" un roman poétique d'amour et de spiritualité

Traversant le temps et l'espace, le dernier roman d'Elif Shafak se déroule pour une part à Northampton, Massachussetts aux Etats-Unis en 2008, où l'on suit le destin et la lecture d'Ella, mère de trois enfants qui devient lectrice pour une agence littéraire, et pour l'autre part, à Konya en Turquie en 1242, par l'intermédiaire de Doux Blasphème, le premier ouvrage que l'agence littéraire met entre les mains d'Ella. Débute alors une correspondance entre elle et le mystérieux auteur de cet ouvrage, A. Z. Zahara. Doux Blasphème relate la rencontre de Rûmi, célèbre poète turc, avec le soufi Shams de Trabiz et l'amitié si profonde et si pure qui les lia. Ella n'est ainsi qu'un des nombreux personnages de Soufi, mon amour, et outre Shams, Rûmi, sa femme et ses enfants, les autres personnages sont plus étonnants les uns que les autres : Suleiman l'ivrogne, Rose du désert la Catin ou encore Hassan le mendiant, donnant chacun leur nom aux chapitres du livre. Tous mêlent leurs voix, leurs valeurs, leurs croyances et leurs visions du monde dans ce roman polyphonique qui n'est pas sans rappeler l'épisode de la Tour de Babel. Le titre d'origine The forty rules of love traduit plus aisément le projet de Shafak : saisir de façon totale le concept de l'Amour en l'abordant de différents points de vue, grâce à ces voix, ces histoires mais aussi  ces époques et ces espaces qui s'entremêlent pour se muer en un formidable discours sur l'Amour.

Couverture du livre sorti aux éditions 10/18 (photo AS)


Le roman se construit comme une initiation au soufisme, celle d'Ella ? et peut-être celle du lecteur ? à travers ses cinq parties représentant les quatre éléments et on y découvre le cinquième : le vide. Il rappelle à tous ceux qui l'auraient oublié qu'Islam signifie " paix intérieure" et " soumission" et que " les religions sont comme des fleuves qui tous coulent vers la même mer ". Pour autant la spiritualité n'est pas la religion et c'est de la première dont il s'agit ici. Shafak nous montre à travers ses quarante règles que le soufisme n'est autre que la religion de l'Amour. Cet amour dont il est question transcende le temps et l'espace mais également les croyances, les cultures et le genre. Il s'agit d'un amour total puisque "Tout amour, toute amitié sincère est une histoire de transformation inattendue. Si nous sommes la même personne avant et après avoir aimé, cela signifie que nous n'avons pas suffisamment aimé".
Elif Shafak nous offre un roman poétique sur l'amour et la spiritualité, évoquant parfois les contes des mille et une nuits, mis en perspective de notre époque actuelle et de la culture occidentale. Elle crée avec brio des "ponts" comme elle aime le dire, entre les cultures orientale et occidentale mais aussi entre le XIIIe et le XXIe siècle. "J'ai des clients qui viennent des quatre coins du monde." déclare un aubergiste de Samarcande. "Au bout de quelques verres, ils racontent tous les mêmes histoires. Les hommes sont les mêmes partout. Même nourriture, même boisson, mêmes vieilles foutaises." Les hommes sont les mêmes partout et de tout temps et il en va de même pour l'amour. Ainsi l'amour qui unit Rûmi et Shams fait miroir à l'amour qui rattrapera très vite Ella et Aziz puisque comme Shafak le dit si bien, les histoires sont universelles et n'ont besoin ni de passeport ni de visa pour parcourir le monde.
Un livre sans nul doute mystique qui nous guide dans un voyage avant tout intérieur. Certains se laisseront porter, d'autres y liront une belle histoire d'amour.

Audrey Scarbel (www.lepetitjournal.com/istanbul) vendredi 2 décembre 2011

lepetitjournal.com istanbul
Publié le 2 décembre 2011, mis à jour le 5 janvier 2018

Flash infos