

"Les gens sont plus à l'aise avec l'idée de partager davantage d'informations mais aussi avec celle de le faire avec plus de personnes. La norme sociale a évolué avec le temps", estime Mark Zuckerberg, fondateur du réseau social le plus populaire de la planète. Fort de cette conviction, les paramètres de confidentialité par défaut ont été récemment modifiés pour les 350 millions d'utilisateurs de Facebook (AFP). Le nom, la photo du profil, le sexe, la ville de résidence, la liste d'amis et les pages dont un membre est fan sont désormais devenues accessibles à tous les utilisateurs du réseau. Impossible de cacher que vous êtes dingues Michelle Torr ou de Frédéric Lefebvre, que vous soutenez le PS ou que vous aimez faire du naturisme.
Pas si grave?
Zuckerberg se justifie : "Lorsque j'ai commencé dans ma chambre de Harvard, la question que posaient les gens était : Pourquoi mettre des informations sur Internet ?Et puis, dans les cinq ou six dernières années, les blogs ont explosé, ainsi que tous ces services qui permettent d'échanger des informations". Et c'est vrai, notamment pour les moins de 40 ans, la vie privée s'affiche en ligne, sans complexes. La journaliste Emily Nussbaum explique, provocante, que "les enfants d'aujourd'hui n'ont aucune pudeur, sentiment de honte, ni de vie privée. Ce sont des frimeurs, des putains de la célébrité, de petits vauriens pornographiques qui mettent en ligne leurs journaux intimes, numéros de téléphone, poésies stupides et photos cochonnes". Aux Etats-Unis, 10 à 20% des jeunes admettent avoir déjà envoyé des photos (ou "sextos") d'eux, nus, sur le Net ou via leurs téléphones mobiles. Une absence de pudeur comparée, par certains chercheurs*, à l'attitude désinhibée avec laquelle les jeunes des années 60-70 abordaient la sexualité. Si leurs parents sont terrorisés à l'idée que ces documents tombent dans les mains de pervers, les jeunes estiment que la "vraie vie"est bien plus dangereuse que leur monde digital.
Une source d'information incontournable
Pour ceux qui ont grandi dans la crainte de Big Brother, tout cela n'a rien de rassurant. L'absence de vie privée sur Internet fait le bonheur des cabinets de recrutement qui consultent naturellement les informations disponibles sur Internet relatives à un candidat? mais aussi des détectives privés. Pour eux, ?Facebook est très efficace, bien plus utile que les fichiers policiers comme Edvige. La Cnil ne nous met pas des bâtons dans les roues. Les gens racontent toute leur vie en détail. Et le plus fou : les informations sont exactes, la plupart ne mentent même pas.?
En fait, il ne faut pas se tromper d'outil. Selon Xavier Desfeuillet, directeur de l'agence de "e-réputation"Hington &Klarsey, spécialisée dans le "nettoyage"de données compromettantes en ligne, "il ne faut pas percevoir Internet comme un média, avec une déontologie, mais comme un bistrot qui accueille des discussions de tiers, motivées par un désir de s'exprimer sur des idées politiques ou des situations, ou en réaction à des opérations de communication lancées par des sociétés commerciales". Pour éviter les mauvaises surprises, il faut apprendre à maitriser l'outil et limiter l'accès des données aux personnes choisies. Encore faut-il que les règles établies par les réseaux sociaux ne changent pas en cours de route, pour permettre l'augmentation des revenus publicitaires. Selon le site ReadWriteWeb, Facebook avait justement mis en avant le contrôle de la vie privée, avant ce revirement "suspect". Pour les auteurs du blog dédié aux technologies internet, le réseau social "fait preuve d'une attitude intolérable, avec des explications d'une superficialité qui frise le foutage de gueule".
Marie-Pierre Parlange (www.lepetitjournal.com) mercredi 13 janvier 2010
*Voir la thèse du professeur Ravi Sandhu, responsable de l'Institut de la cyber sécurité à l'université du Texas à San Antonio dans l'article du Monde : Vie privée, un problème de vieux cons ?
En savoir plus :
Lefigaro.fr : Sur Facebook, la «norme» est d'exposer sa vie privée
Read WriteWeb France: Facebook se fout de la gueule du monde
Le Monde : Vie privée : le point de vue des "petits cons"








































