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« Hong Kong Star » , une chanson remplie de stéréotypes ?

Les paroles de la chanson de France Gall, écrites par Michel Berger, ont parfois été perçues comme une succession de clichés sur les habitants de Hong Kong. Pourtant, l’intention de l’auteur était d’abord de faire passer un message.

Hong Kong Star France GallHong Kong Star France Gall
La pochette du 45 tours de France Gall nous replonge dans les années 80.
Écrit par Guillaume Clément
Publié le 26 novembre 2023, mis à jour le 4 décembre 2024

Image d’Epinal de Hong Kong

Rétrospectivement, quand on écoute la chanson de France Gall de 1984, les premières impressions peuvent être une succession de stéréotypes pas toujours flatteurs. La ville de Hong Kong est ainsi qualifiée de « Las Vegas de bazar ». Les vedettes locales sont dévalorisées par la locution restrictive « ne que » dans « Tu n’es qu’une Hong Kong Star ».

Plus polémique encore dans les paroles de Michel Berger, une première impression donne une sorte de valorisation de normes de beauté basée sur les origines ethniques. Ainsi, une phrase de la chanson semble donner une gradation dans le côté désirable du regard : « Tu t’es fait débrider les yeux, mais comment faire pour qu’ils soient bleus ». De même, le fait de n’être « qu’une Hong Kong Star » est justifié dans la chanson par une autre remarque sur l’apparence ethnique : « T’as un Chinois dans ton miroir ».                                                                                                          

Carnet de voyage de Michel Berger, ...

En réalité, le texte de cette chanson devait refléter raconter une expérience réelle. Après avoir été quitté par Véronique Sanson, Michel Berger a épousé en secret France Gall en 1976. Avec elle, ils enchaînent une série de voyages en Asie en 1982. Ils visitent ainsi Bangkok, Macao et Hong Kong.

C’est justement à Hong Kong que le co-auteur de Starmania est marqué et déçu par ce qu’il voit à la télévision locale. Ce qu’il raconte dans la chanson ressemble à des « grands mélos d’amour » et « feuilletons au kilomètre ». Autrement dit, il n’enchaîne pas des clichés préétablis, mais cherche plutôt à traduire les impressions que les vedettes hongkongaises ont d’elles-mêmes. « T’as pas la peau qu’il te faudrait », reflète ainsi beaucoup moins une dévalorisation par Michel Berger qu’une auto-dévalorisation par des artistes hongkongais qui commencent à utiliser des artifices qu’ils considèrent comme esthétiques, par exemple le blanchiment de la peau ou le débridage des yeux.

 

Message politique contre les Etats-Unis ?

Une autre façon d’analyser cette chanson peut aussi être une critique de la domination américaine en Asie. L’année précédente, en 1983, Hong Kong vient d’adopter un régime de change fixe arrimé au dollar américain. Michel Berger lui oppose dans la chanson le « vrai pays du dollar ».

De même, alors que Bruce Lee et Jackie Chan triomphent aux Etats-Unis, ils sont cantonnés dans des films d’arts martiaux par les grands studios américains, avec des films tels que « le Chinois se déchaîne » (1978). « Toi, t’aurais voulu jouer Hamlet », ouvre en écho la chanson de France Gall pour dénoncer cette impossibilité pour les acteurs chinois d’endosser certains rôles flatteurs au cinéma.

Bref, Michel Berger semble appeler à une sorte d’émancipation artistique de Hong Kong, mouvement qui interviendra effectivement plus tard, avec par exemple la consécration du cinéma de Wong Kar-wai dans les années 1990 et 2000.

En tout cas, en France, la chanson de France Gall, assortie d’un clip tourné dans les rues de Hong Kong, trouve facilement son public. Le single s’écoule à 250.000 exemplaires et finit par grimper à la sixième place du Top 50 créé cette année-là.

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